Il ne joue pas

Publié le 22 juillet 2010 par Lamamandeguillaume

 Guillaume ne joue pas. 

Les conducteurs nous disent de le laisser seul, libre au sol avec des jouets, qu'il finira par y aller, mais non, c'est trop dur, il ne joue pas. 

De la même façon, je ne dis pas que les jouets ne l'intéressent pas, c'est juste une source de frustration, il essaie, s'agace vite, crie et n'en veut plus.

On devrait peut-être insister, le laisser faire. Surtout quand ils nous disent de lui proposer des jouets / jeux de son âge... 

J'en avais déjà parlé, je ne sais plus trop à quelle occasion, mais voilà que la Maman de Romane nous explique qu'elle est prête pour les jeux symboliques et je trouve ca tellement chouette. L'émotion d'une allée franchie, mine de rien, c'est quelque chose de si important. 

Je repense à ce passage du livre de Fournier, quand il achète chaque année des cubes pour son fils. Je ne m'imagine pas acheter toujours des cubes pour Guillaume mais c'est vrai que cela devient de plus en plus difficile de lui choisir un cadeau. 

Guillaume est à l'âge où les petits garçons font rouler des voitures, s'invente des histoires avec les playmobils©, jouent au ballon, collectionnent des cailloux et chevauchent fièrement leur premier tricycle. 

Guillaume ne fait rien de tout ça. En a-t-il seulement envie ? Devrais-je moi jouer avec lui, à inventer des histoires pour lui montrer comment l'on fait ? Comment se construit le psychisme d'un enfant qui ne peut pas jouer car son corps l'en empêche ? 

Bien sûr, on joue avec Guillaume, son papa organise des "bagarres" avec sa soeur, on lui lit des histoires, on joue à se lancer un ballon tous les quatre. 

Bien sûr, on chante des chansons et on gesticule, on lui montre comment détruire des tours de cube... 

Malgré tout, c'est quand même complètement différent... Pour moi, la construction d'un enfant se fait aussi dans tous ces moments où il joue seul, s'invente son monde, se détache de ses parents. 

Je veux bien jouer à la marchande (en l'occurence au marchand) avec lui, mais pas à sa place. 

Est-ce parce-que ses compétences physiques ne lui en permettent pas plus qu'il faut que sa seule activité soit de tenter d'attraper des figurines pendues à une arche ? En a-t-il seulement envie ?

Car il est un fait, Guillaume a changé, il est plus patient, s'intéresse à ce que l'on fait, ses goûts et ses intérets aussi. Rien que pour les dessins-animés, désormais, c'est plus souvent "Piwi" que "BabyTv"... Il adore "123...Bo", "Sid le petit scientifique" ou encore "Sam-Sam" (et "Garfield", et les "Monsieur-Madame", et "Rory la voiture de course", ...). Des dessins-animés de son âge en somme. Et c'est lui qui nous a dicté ce choix, pas nous qui le lui avons imposé. 

Alors voilà, Guillaume ne joue pas, Guillaume grandit tout de même, mais Guillaume n'a ni mains, ni bras, ni langage pour accompagner ce passage aux jeux symboliques. Alors on se plante devant le rayonnage du magasin de jouets, à se demander si ce petit chateau-fort lui plairait, si ca ne serait pas une source de frustration supplémentaire ? Et qu'un jouet reste un jouet et non pas une "stimulation" déguisée.

Guillaume aime les jouets qui jouent tous seuls, qu'il peut regarder s'agiter et rêver.

PS : si vous avez des conseils de lecture qui participe à cette réflexion autour du jeu chez l'enfant handicapé, je suis preneuse.

Et question jeu et plaisir, vous pouvez aussi regarder l'éclate totale de Selma au piano.

Petit retour en arrière, sur le même thème  : 

  • "Avancer" (avril 2010)
  • "Un grand jour" (mars 2010)
  • "Une histoire d'intelligence" (mars 2010)
  • "Guillaume serait-il méchant" (février 2010)
  • "King-Kong et cervelle de moineau" (Aout 2009)
  • "Une journée de "stimulation intense" avec Judit" (mai 2009)