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Insécurité, retraite, collectivités ou services publics: les sales coulisses de Sarkofrance

Publié le 29 juillet 2010 par Juan
Insécurité, retraite, collectivités ou services publics: les sales coulisses de SarkofranceIl n'y a pas que l'affaire Bettencourt pour nous révéler des surprises. Alors que Sarkozy s'agite comme un cow-boy contesté après la mort de l'otage français détenu par Al Qaida depuis lundi, son gouvernement est bien en peine de justifier certains effets de sa politique.
Comment déstabiliser les services publics
L'information peut sembler paradoxale : le gouvernement s'attend à des départs massifs en retraites dans la Fonction Publique. En fait, il s'agit de l'une des conséquences du projet de réforme des retraites. Les mères de 3 enfants avec 15 ans d'ancienneté ne pourront prochainement plus partir à la retraite de façon anticipée. Début juillet, Eric Woerth et son ministre de la fonction publique George Tron avaient précipitamment décalé la suppression de cet avantage.
En 2008, 16 000 femmes avaient bénéficié de cette faculté. A compter de 2011, les candidates subiront une décote de retraite, avant la fermeture complète du dispositif en 2012. L'hôpital et l'éducation nationale sont les deux secteurs les plus concernés, car les professions d'infirmiers, d'aides-soignants et d'enseignants sont très féminines. La Fédération hospitalière de France s'inquiète de l'afflux de demandes d'information. Parmi les enseignants, les syndicats estiment à 25 000 le nombre de personnels concernés l'an prochain, dont la moitié environ dans le secteur primaire. Or seulement 3 000 postes sont ouverts au recrutement l'an prochain dans les écoles primaires...
Interrogé sur RMC mardi matin, George Tron tentait de désamorcer la polémique naissante : selon lui, la précédente réforme de 2003 affectant la fonction publique n'avait générer que «10 à 15% de départs supplémentaires» l'année suivante, et, surtout, les fonctionnaires bénéficieraient de 200 millions d'euros pour leurs revalorisations salariales l'année prochaine. Quelle carotte ! On se souvient que le gouvernement a annoncé en juin dernier que le point d'indice de revalorisation des fonctionnaires serait gelé à compter de 2011...
A propos des retraites, on ne découvre qu'aujourd'hui l'existence d'une note de simulation de Pôle emploi sur l'impact financier sur les comptes de l'assurance chômage d'un recul du départ de l'âge de la retraite. La simulation avait été faite à la demande du Medef... en novembre dernier ! Et il ressort que les quelques 9 500 chômeurs ayant 65 ans qui ne pourraient pas partir en retraite cette année coûteront 80 millions d'euros d'indemnités supplémentaires à l'Unedic pour la première année. En rythme de croisière (67 ans pour une retraite sans décote), ce relèvement coûtera 265 millions d'euros en année pleine. On n'a pas souvenir que ce surcoût été mentionné dans la présentation financière communiquée par Eric Woerth le 16 juin dernier.


Comment déstabiliser les collectivités locales
Les collectivités locales vont désinvestir: merci qui ? Merci Nicolas ! L'observatoire des finances locales prévoit une baisse des investissements des régions et des départements dès 2010 à cause de l'effet conjugué de la crise, de la suppression de la taxe professionnelle et du gel annoncé de la dotation de l'Etat aux collectivités locales. « Selon les prévisions inscrites aux budgets primitifs, les dépenses d'équipement des départements devraient reculer de 2,2 % et celles des régions de 3,4 % » écrit-il dans un rapport tout juste publié. La montée en charge du RSA et de l'APA est également pointée du doigt. Globalement, les dépenses sociales ont progressé de 5,3% en 2009, alors que les recettes fiscales ont baissé. Les conclusions de l'OFL sont sans équivoque: «Les départements sont confrontés à un effet de ciseau, entre d’une part des recettes au dynamisme ralenti, et d’autre part des dépenses sociales en forte croissance et sur lesquelles leurs marges de manœuvre sont très limitées. Après plusieurs années de dégradation, leur situation financière s’avère délicate, voire difficile pour quelques uns. » Seules les communes, qui représentent la moitié de l'investissement public local, s'en sortent mieux.
Le rapport souligne que si les dépenses de fonctionnement sont «contenues», voire, dans le cas des département, en baisse,  «la hausse des dépenses d’action sociale des départements est en partie structurelle.» En effet, le vieillissement de la population fait croître régulièrement le coût et le périmètre de l'Allocation Personnalisée d'Autonomie (APA), à plus de 1 millions de bénéficiaires l'an dernier pour coûter plus de 5 milliards d'euros en 2010 (+6% versus 2009). Plus globalement, les dépenses dites d'intervention désormais assumées par les régions, départements et communes s'élevaient à 58 milliards d'euros en 2009: là encore, les transferts de l'Etat sont directement désignés: «la montée en charge des compétences transférées entraîne une très forte progression au cours de ces dernières années pour ce premier poste de dépenses courantes (+ 32,8% depuis 2004). »
Autre précision d'importance, les dépenses de personnel des régions «évoluent depuis plusieurs années au rythme des transferts de personnels, essentiellement en provenance de l’Éducation nationale. Elles sont en hausse de 14,2%, ce qui est faible comparé aux évolutions des années précédentes. Les régions ont accueilli la majeure partie des personnels transférés en provenance de l’État sur les années 2006 à 2008, et ces dépenses ont été multipliées par 4 en 4 ans. » Avant, pendant et après la campagne des élections régionales, l'UMP et le gouvernement ont eu beau jeu de dénoncer la hausse des dépenses de personnel des collectivités locales. Le rapport rappelle que cette hausse provient des derniers transferts de personnel de l'Etat (15 000 fonctionnaires de l'Education nationale encore transférés en 2009 aux départements). Depuis 2005, quelques 130 000 fonctionnaires ont ainsi été passés sur le budget des départements.
Côté recettes, les concours financiers de l'Etat représentent 28% des ressources des collectivités locales. Contrairement à l'Etat, ces dernières sont soumises à une règle d'or, l'équilibre de leurs comptes. A compter de 2009, le périmètre de ces concours a été élargi, afin de prendre en compte les derniers transferts et la modification prochaine de la fiscalité locale. Pour la période 2009-2011, leur montant est désormais indexé sur l'inflation. Il s'élève à 97 milliards d'euros en 2009 (en hausse de 1,1 milliards versus 2008), et à 98 milliards en 2010. L'effet de ciseau se précise : la crise augmente les besoins sociaux, mais les recettes, tant fiscales qu'émanant de l'Etat, stagnent: «Globalement amorcé en 2007, confirmé en 2008 et 2009, le resserrement des marges de manœuvre des collectivités locales s’amplifie en 2010 et devient préoccupant.»
Comment déstabiliser la police
Lundi soir, on apprenait qu'un contrat avait été placé sur la tête des policiers de la Brigade Anti-Criminalité de Grenoble. Les policiers concernés et leur famille auraient été enjoints de quitter la région. « Elles visent ce service en général et des collègues en particulier. On peut même parler de contrats. Cela émane de gens agissant dans un contexte mafieux qui considèrent la BAC comme une bande rivale » a confié un policier du cru au Parisien. Des armes, et pas n'importe lesquelles, ont été découvertes lundi, à Grenoble dans un bar du quartier de la Villeneuve : un pistolet-mitrailleur Uzi, deux pistolets de calibre 9 mm et un autre de calibre 7,65. Est-ce la guerre ? Un syndicaliste policier rappelle qu'«à partir du moment où c'est un bandit chevronné qui est mort sur cette intervention, le milieu du grand banditisme et les bandes veulent venger sa mort
Dès mardi matin, François Fillon dénonçait: «Cela montre la violence d'un banditisme qui doit être combattu de la façon la plus extrême. Cela montre d'ailleurs le caractère très vain des polémiques sur les affaires de police de proximité. (...) On est en face de gens extrêmement dangereux, extrêmement violents et donc nous allons donc devoir répondre avec une extrême détermination. On met les familles qui sont menacées à l'abri mais on met en même temps beaucoup de moyens pour retrouver les auteurs de ces menaces; ils seront arrêtés et ils seront déférés à la justice.» Le premier ministre est gêné. Son gouvernement a réduit, et continue de réduire, les effectifs de police et de gendarmerie. Pourtant, depuis des années, les violences aux personnes ne font que progresser.
Face à cette progression de l'insécurité, Sarkozy n'a semble-t-il qu'une réponse : virer les préfets locaux les uns après les autres, et mettre la pression sur les autres, primes au mérite à l'appui. Il a confirmé mardi le remplacement de celui de l'Isère, après celui de Seine-Saint-Denis (en avril dernier).
Mercredi, il tenait sa fameuse réunion sur les gens des voyages et Roms. On ne reviendra pas sur cette curieuse habitude sarkozyenne qui consiste à communiquer (parfois) sur son agenda personnel: cette réunion est purement intra-gouvernementale. Aucun représentant des gens du voyage n'a été convié. A son issue, le ministre de l'intérieur a annoncé plusieurs mesures, comme la fermeture de 300 camps illicites. Qui est illicite ? Les campements sauvages ou les mairies sans places d'accueil ? Les Roms coupables d'atteintes à l'ordre public ou de fraudes seront «quasi-immédiatement» reconduits en Roumanie ou en Bulgarie. Enfin, Brice Hortefeux a promis que 10 inspecteurs des impôts iront «contrôler la situation des occupants.» Dix, pas plus... Hortefeux a cette formule brillante de sous-entendus: «En effet beaucoup de nos compatriotes sont à juste titre surpris en observant la cylindrée de certains véhicules qui traînent les caravanes.» Beaucoup de nos compatriotes sont aussi surpris de la persistance de certaines déclarations d'un ministre de la République déjà condamné.


Comment déstabiliser l'emploi
Les statistiques du chômage à fin juin ont été publiées, et elles sont, comme souvent, mauvaises. On oublierait presque la promesse du PDG de l'entreprise France, un lundi 25 janvier 2010 devant 11 Français sur un plateau de TF1: vous allez voir, le chômage va baisser. Quand ? On ne sait pas. Il n'avait pas précisé. La reprise est donc plus que timide. Tout le monde, sauf le gouvernement, le prévoyait. Au 30 juin, seul le contingent des demandeurs d'emploi de catégorie A (c'est-à-dire sans aucune activité dans le mois) a diminué d'un modeste 0,3%. Globalement,  près de 3,958 millions de personnes ont déclaré une période d'inactivité en juin en métropole, en hausse de 0,4%, pour atteindre un solide 4,2 millions si l'on ajoute l'outre-mer. Même le chômage de longue durée progresse. Merci qui ?
Christine Lagarde, la ministre de l'économie a livré une de ses formules dont elle a le secret : le marché du travail français est dans «une stabilisation selon le schéma de la tôle ondulée, qui est due à une situation de croissance économique qui devrait s'améliorer au second semestre». Avec la crise, on a oublié que la loi TEPA d'août 2007 a toujours un effet désastreux sur l'emploi : en défiscalisant les heures supplémentaires, Sarkozy a fait coup double : en 2008, il a précipité la dégradation de l'emploi intérimaire et à durée déterminée, les entreprises profitant de l'effet d'aubaine de cette défiscalisation pour sacquer le personnel temporaire. Depuis le début de l'année, la timide reprise les conduit à privilégier les heures supplémentaires aux détriments des recrutements.
Merci qui ?

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