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Préfet de l’Isère ou Préfet de police de Grenoble ?

Publié le 30 juillet 2010 par Hmoreigne

 Rupture républicaine ? La multiplication de l’installation de policiers à la tête de départements “sensibles”  souligne une conception bien curieuse du rôle des Préfets et de l’Etat. Voué aux remplacements express et médiatisés, le corps préfectoral rappelle dans l’anonymat qu’un préfet représente l’État et que l’État ne se réduit pas à la police.

Le 21 juillet à la suite des graves violences survenues dans un quartier populaire de Grenoble l’Elysée annonçait l’éviction du préfet Albert Dupuy, en poste depuis décembre 2008 et son remplacement par Eric Le Douaron, un ex-haut gradé de la police.

Le tour de passe-passe avait suscité l’émoi du corps préfectoral fatigué d’être malmené et déconsidéré par l’exécutif. Ce matin encore sur France Inter, Michel Destot , qualifiait d’ “injuste” le traitement kleenex réservé à Albert Dupuy, considéré comme un bon professionnel.

Pour le Maire de Grenoble,  la sécurité publique est un pilier élémentaire de la cohésion sociale. S’il faut un minimum de tranquillité publique ce dont le département et sa ville a besoin c’est d’un préfet intervenant dans tous les champs, capable d’assurer la bonne coordination de tous les services de l’Etat, pas d’un préfet seulement policier.  L’élu socialiste n’a pas caché sa méfiance à l’égard “d’annonces jamais suivies d’effet”. Dans ce sens, la fédération PS de l’Isère  estime que “Ce qu’il faut surtout ce sont des moyens pour renforcer la police à Grenoble qui a perdu 120 policiers depuis 2002″.

Le plus dérangeant vient non du fait que les préfets jouent le rôle de fusibles mais que l’on considère que leur métier n’en est pas un, comme si  on pouvait s’improviser dans cette fonction. Comme si le social, l’économie, la prévention, le logement ne constituaient pas la majorité du travail alors que la sécurité dans les faits n’en représente que 20%.

Devenir préfet de région ne relève plus du bâton de maréchal, mais plutôt d’un profil de directeur général, qui connaît tous les dossiers, dessine une stratégie de l’action publique, et laisse les préfets agir sur le terrain“, confirme l’un d’entre eux de façon anonyme, devoir de réserve oblige au Figaro.

Conscient de son échec en matière de sécurité, Nicolas Sarkozy se défausse sur les préfets sans se rendre compte qu’ils deviennent les spectateurs impuissants d’un Etat qui se délite.

Le Figaro rapporte que lors d’une réception le 8 juillet dernier à l’Élysée, le président de la République n’a pas mâché ses mots : “Vous allez m’en vouloir, mais je vous dis une chose: je veux vous voir la nuit dehors avec les troupes, avec les gendarmes, avec les policiers, et puis régulièrement ! Il ne peut se passer un trimestre sans que le préfet n’ait été dans une barre, dans une patrouille”, “Cela n’existe pas de ne pas avoir de résultat. On ne peut pas être chef et dire: ce n’est pas moi, je n’y peux rien”, “je n’aime pas les gens qui font des erreurs en étant immobiles et qui ne s’engagent pas”.

Les mots ne suffisent pas à guérir les maux. Thomas Legrand a bien analysé la grande faiblesse du Sarkozysme, c’est la distorsion entre le discours et les actes. Un narcissisme tellement profond que le Président finit par croire que dire c’est agir. 

Prémonitoire, le journaliste écrivait le 16 octobre 2009 dans Slate.fr : “C’est exactement ce qu’il se passe, par exemple, pour les questions de sécurité, questions marqueurs du sarkozysme par excellence. L’insécurité ne baisse pas, il ne change pas de politique, il fait convoquer les préfets pour leur tenir un discours. Il leur remonte les bretelles! Tout le monde comprendra que passer un savon à un préfet sans lui donner l’ordre de changer de méthode ou sans lui donner de moyens supplémentaires ne changera rien! Le préfet enguirlandera les directeurs départementaux de la sécurité qui vont s’empresser de gronder les responsables de la police et de la gendarmerie, qui finiront par essayer de faire du chiffre pour avoir la paix.”

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