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Quatre poèmes de Patricia Laranco.

Par Ananda

 

LES   HAUTS   ESCALIERS.

Le vent souffle dans les hauts escaliers
tout près
du ciel désormais à portée de la main
mais à force de s'élever
les escaliers
ont fini par se perdre au cœur de la nuée
les voici qui sont devenus si éloignés
qu'on ne peut plus les atteindre, ni les gravir.
Les portes battent
avec un son lourd, résonnant
pareil à celui qui sonne dans les clochers
pareil à celui qui cloche dans les sonnets
le vent les arrache quelquefois à leurs gonds
et le ciel cherche toujours
à les remplacer
par ses écharpes de nuages vaporeux
d'où jaillissent non pas des lapins magiciens
mais d'immenses colombes aux ailes immaculées
leur donnant quelque peu des airs de Christ en croix...
Là-bas
tout en haut
les colimaçons du ciel
s'effritent, frôlés par les tranchants du jet stream
les fabuleuses chevauchées de la nuée
s'arquent avec de soudains cabrements de dauphins,
tout frisotte, énorme, dans une irisation
glaciaire, aiguisée
comme de la banquise.
Les troupeaux circulent,
se bousculent à loisir
à grands coups de sabot,
les vents hachent menu
tout le menu fretin
de degrés étriqués, coincés, tordus, velus.
Le désert est en marche, juste sous nos
pieds

n'est-ce pas sûr que l'avenir est pour bientôt ?

EUROPE

Pierre léchée par les ciels froids

par les nues aux mufles mouillés,

le matin est creux

et rêveur

Pierre embrassée d’un cercle bleu

où s’ébattent, en la frôlant

formes d’un blanc bien détaché,

suspens de courts corps cotonneux

pareils à des embarcations

aux flancs neigeux et sans défense.

Le ciel se met à me toiser

du haut de son flegme distant ;

juste à son aplomb, les pavés

baveux que l’ombre retient

dans sa fosse, en secret

hoquètent

où sont les grands soleils mordants,

tonitruants, qui vous rôtissent ?

Nous sommes là : constamment plantés sur des seuils,

ne regardant la vérité

que d’un seul œil

que d’un seul œil-soleil

solidifié au sol,

empalé comme un vampire convalescent.

Nous sommes là ; souvent assommés de sommeil,

de sommes-veilles qui ravaudent le passé,

l’extirpent des nids de nuit et de buissons

à des années-lumière de nos chevauchées.

Nous sommes là, souvent prisonniers  incertains,

la tête tournée vers quelque sens interdit,

quelque voie sans issue aux clins d’œil racoleurs ;

dans l’épaisseur des mots

peut-on trouver

son corps ?

L’espace est lisse

et moi, dessous

et moi, dedans

je vois grandir

son élasticité, je le

sens s’étirer, il est

d’huile

je m’insère dans sa coulée,

entre ses strates d’abstraction

laiteuses qui portent l’odeur

d’un vent hochet chargé de pluie ;

tout se désencombre alentour

son glissement caoutchouteux

éloigne encore les objets

qui sont de plus en plus distants

sa volonté de raréfier,  de faire place nette

agit

pour imposer la liberté

dans sa géométrie brutale.

Pavés sonores et trottoirs blancs

se dérobent sous les souliers

comme des points de fuite hâtifs

tracés de dissolution.

Bientôt deux parallèles vont

celle du chemin et du ciel.

Patricia Laranco.

 


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