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Un ouvrage d'approvisionnement en eau potable réalisé dans un village de la commune de Nikki (photo Le Municipal)
"Nous avons beaucoup appris et nos cadres et agents savent aujourd'hui faire le montage des dossiers d'Appels d'offres et suivre le processus de passation de marchés". Cette déclaration du maire de Bopa, Paul Hounkpè, traduit bien l'appropriation par les communes, de leur rôle de maître d'ouvrage. Une appropriation que confirme Guillaume Houinato, chef antenne Mono/Couffo de Protos, une ONG qui accompagne les communes à l'exercice de la maîtrise d'ouvrage depuis la mise en œuvre de la décentralisation. "Les communes maîtrisent aujourd'hui le cadre théorique du processus et au niveau technique, les cadres et agents des mairies savent élaborer beaucoup de dossiers", soutient-il.
Si aujourd'hui, les acteurs communaux se félicitent d'avoir réalisé un grand pas dans l'exercice de la maîtrise d'ouvrage, ils viennent pourtant de loin. Car, jetées en pâture au lendemain de la décentralisation rendue effective en 2002, les communes n'avaient pas les compétences ni les ressources, pour gérer à bien les compétences transférées. Avec un personnel peu qualifié (94% des 4 000 agents territoriaux étaient des agents d'exécution), l'exercice de la maîtrise d'ouvrage dans le secteur de l'eau relevait d'un grand défi.
Ainsi, face à une réforme en marche marquée par l'installation effective des exécutifs communaux, les partenaires techniques et financiers vont voler au secours des communes.
Dans le secteur de l'eau et par rapport à l'appui à la maîtrise d'ouvrage communale, l'ONG belge Protos s'est illustrée dans l'accompagnement des nouveaux acteurs communaux. L'expérience qui a démarré en 1999 avec le programme "Hydraulique et Assainissement en Appui au Développement Institutionnel" (HAADI) et qui s'est poursuivie plus tard avec d'autres programmes dont le Projet d'Appui à la Gestion des Ressources en Eau Locale (PAGIREL) a favorisé l'apprentissage et permis aux communes, d'exercer leurs rôles de maîtres d'ouvrage. Acteurs de premier plan dans le dispositif mis en place par l'ONG pionnière Protos, les communes bénéficiaires ont enregistré beaucoup d'acquis. "Aujourd'hui, des compétences existent dans nos communes", confie Rémi Houézé, Chef du service Développement local et Planification à la mairie d'Athiémé. Fort de cette expérience enrichissante, le chef service technique de Dogbo va plus loin et indique : "Si les autres partenaires nous transfèrent les ressources, on ne va pas nous casser la tête pour conduire le processus de maîtrise d'ouvrage".
La longue marche des communes vers l'exercice par elles-mêmes, de la maîtrise d'ouvrage s'est reposée sur un vaste programme de renforcement des capacités des acteurs. Des décideurs aux cadres et agents techniques d'exécution, tous les acteurs intervenant dans la chaîne du montage des dossiers d'appels d'offres ou du processus de passation des marchés ont été nourris par plusieurs sessions de formation. Élaboration des Termes de référence et des Dossiers d'Appels d'Offres (DAO), appropriation des outils de suivi/évaluation, suivi des cahiers de charges des ONG d'intermédiation sociale..., les thématiques développées par les partenaires (Protos, SNV et autres), ont conduit à asseoir des administrations locales à même de conduire le processus. Au terme de ces différentes sessions de formation, les communes édifiées ont commencé par jouer les premiers rôles. C'est le cas à Dogbo où le Chef du service technique de la mairie, Dominique Ballo, témoigne que l'exercice de la maîtrise d'ouvrage est assuré par la commune. Il nous décrit le processus : "Pour le processus d'identification des localités d'intervention, cela se fait au niveau du conseil communal. Lorsque les demandes sont enregistrées au niveau communal, la liste des localités retenues, nous allons au Service de l'Eau pour vérifier si ces localités n'ont pas déjà été pris en compte par un autre projet, afin d'éviter le double emploi".
A l'étape de la réalisation des infrastructures, la commune est encore au centre de l'intervention. Dominique Ballo poursuit : "la détermination de la nature de l'ouvrage, l'élaboration des avis d'appel d'offres, l'évaluation des offres et la prononciation de l'adjudication, la contractualisation et le suivi de la réalisation des ouvrages se fait par la commune". Les services déconcentrés de l'État sont sollicités pour s'assurer de la conformité des différentes opérations avec les stratégies sectorielles. L'intervention des bailleurs dans le processus consiste aujourd'hui, à veiller au respect des différentes procédures retenues d'un commun accord avec les communes, par leur "avis de non objection" nécessaire avant toute signature de contrat de réalisation d'ouvrage.
Si l'accompagnement des partenaires a favorisé et favorise encore l'exercice de la maîtrise d'ouvrage dans certaines communes à l'instar des communes du Mono/Couffo, de l'Atacora/Donga ou du Borgou, dans d'autres communes, l'apprentissage en est encore à ses débuts. C'est le cas dans la cité lacustre de Sô-Ava où le Secrétaire général de la mairie, Dominique Faïsou confie que l'exercice de la maîtrise d'ouvrage par la commune n'est pas encore une réalité. Confrontée au manque de ressources financières et de cadres compétents, la commune connaît des limites. C'est ce qui explique que certains partenaires à l'instar de Emmaüs, opère en lieu et place de la commune. Et pour l'heure, même si les différentes phases de la passation des marchés ou de la réalisation des ouvrages sont connues, la mairie peine toujours à exercer son rôle.
Ailleurs, même au niveau des communes bénéficiaires de l'appui des partenaires pour le renforcement de leurs capacités, des risques planent sur les acquis enregistrés. La trop grande mobilité des cadres ou agents fragilise le processus. Un constat que déplore Guillaume Houinato, qui indique par ailleurs, qu'il faut aller plus loin dans le renforcement des services techniques des mairies. Ce renforcement doit passer par le recrutement de cadres spécialisés en développement local et d'élaboration de projet.
L'autre défi majeur est le renforcement de la collaboration entre les services Eau (SEau) au niveau des départements et les communes. Ainsi, pour une bonne circulation des informations entre les communes et la Direction Générale de l'Eau, les acteurs communaux souhaitent que les SEau soient plus proches des mairies. "Il faut que la DG Eau ait des répondants au niveau des communes comme la DHAB avec les agents d'hygiène ou le ministère de l'Agriculture avec les Responsables de Centre régional pour la promotion agricole "R/CeRPA", signale le maire de Klouékanmey. Car, si on peut gouverner de loin, on administre de près et la gestion de proximité est gage d'efficacité".
Benin_marches_communaux.mp3 (555.52 Ko)Par Alain Tossounon - Nombre de lectures web de cet article (hors podcasts, smartphones et tablettes): 2798 fois - Contenu mis à jour le 12/08/2010
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