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La dernière drague

Publié le 19 août 2010 par Ruminances

Posté par lapecnaude le 19 août 2010

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C'est pas pour dire, il y a quand même des touristes plus cons que nature dans nos parages ! J'espère que cette histoire va vous faire sourire en ces temps pénibles.

Fin d'après-midi. Jour morose en dedans. Ensoleillé au dehors . Je sors  les chiennes, la corvée quand on se sent lamentable. Encore une journée à guetter une étincelle de joie dans le charabia médiatique - à faire et refaire le monde dans sa tête.

Sortir les chiennes, fermer la maison, attendre le bon vouloir de Peï pour la faire monter dans la voiture - sortir du qeureu sans égratigner les voitures des voisins. Attendre un trou dans les files de véhicules  et enquiller la route de l'étang :  calcule ma vieille, çà doit passer !

Mais quelle idée m'a prise de descendre derrière cette foutue église (pas mal en fait l'église XII° à première vue, aux abords fleuris et bien entretenus. Mais elle est tout en pente, avec des marches  - il me faudra remonter. Dur de remonter avec une seule nageoire, je rame (j'ai oublié l'autre quelque part la semaine dernière).

J'ai l'impression d'être une petite baleine tentant de regagner le large. Je souffle autant.

Peu ou prou de pékins à l'horizon, les “filles” vaquent à leurs affaires et je vise le couvercle du sarcophage qui va me servir de siège. Loupé ! Un couillon apparu sur ma droite (côté nul de ma vision) veut caresser la grande et m'engage derechef en conversation sur les canidés.

Polie, j'opine du bonnet et de la voix : hum ! hum ! … ouiiii … Avec force hochements de tête et sourire en coin. L'est grand, cet apôtre, il se drape les épaules avec un grand truc en velours blanc - en velours !

“Touchez, c'est du vrai, comme on n'en fait plus, dit-il. Chevelure blanche (çà me rassure un peu), short et baskets, l'allure type spécial toutou.

Mais, nom de dieu, il me drague cette andouille ! … C'est bien à moi qu'il parle ! Et çà, pour parler, il parle. De son chien, qu'il a tant aimé, qui est mort il y a deux ans. Il lui a écrit un poème. Lisez Madâame, dit-il en sortant un papier de son porte-feuille. Une ode  !…

Il l'aimait tant, son chien, qu'il vient de le faire “empailler”. J'ai les boyaux qui commencent à se tordre. Il a signé un contrat devant notaire comme quoi le survivant de son couple (il est marié) en prenne soin et le garde jusqu'au bout.

Toujours polie, je lui demande où il a garé son épouse, “elle m'emmerdait, je suis parti me promener”. Discrètement, je tanguote sur la tombe où je suis installée. Il enchaîne : “Depuis toujours j'aime la campagne…” Ma parole, il me prend pour une paysanne native ! Une limousine… Les charolaises (je parie que ce mec roule en R4), les provinces françaises, il est du nord, près de Lille (va me demander d'où je suis - gagné !) …

Nous voilà partis pour un tour de France. Mazette, il connait mieux la carte des vins que des chapelles, celui-là ! Il aime les monuments historiques, les châteaux (du dehors, parce que les histoires des guides c'est barbant) - et zou, atterrissage à Oradour sur Glane (j'ai dû louper quelque chose dans son discours, l'aurait pu trouver quand même quelque chose de plus gai cette gonfle)

Commence à faire long, le gonze. Il raconte ses visites, on s'y croirait.: Ah ! Pétain, quel grand homme ! (mais il est vraiment con). Il a accepté de prendre le déshonneur de la France sur sa personne ! Sans Pétain, il n'y aurait jamais eu de Gaulle et le reste ! (le reste, la peste et le choléra, on le subit, pas la peine d'en rajouter).

Je glisse toujours : ” Savez-vous, Madâame, que j'étais contre la guerre d'Algérie (ces vieux schnocks, quand ce n'est pas celle du grand-père, du père, ils se rabattent toujours sur leurs hauts-faits, va bien finir par me raconter son enfance malheureuse), on m'y a envoyé en stage 3 mois, fallait leur laisser leur pays à ces gens là, en pleine guerre Madâame (et brave en plus, l'a pas été objecteur, l'a dû se faire réformer) “.

Petit pas par petit pas, je glisse sur la tombe où je me suis installée. J'écoute, je subis : “finalement la Bretagne, c'est pas çà, il pleut, mais ils ont de belles vaches, des normandes, celles qui donnent beaucoup de lait (l'a pas vu les cochons). J'ai voyagé partout en France, Madâame, je suis spécialiste en hydraulique des trains d'atterrissage d'avions.

Je me disais bien, un planeur, mais c'est pas vrai, il est shooté ! Intarissable, il babille, grand escogriffe harnaché de son dessus de lit en “vrai velours” (vais finir par croire qu'il sort de l'H.P) .  C'est fait : “J'ai travaillé à Lyon, infirmier visiteur de l'H.P.

Là, je décroche. Trop fort. Soudain, il se souvient qu'il y a des langoustines à dîner, il se fait tard, il a de la route à faire.

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Nous nous séparâmes, émus et attendris de cette rencontre par deux poignées de mains - prolonge pas ou je tombe.

Je regarde s'éloigner cet olibrius dégingandé en rigolant.

J'ai oublié de lui demander de quelle race était son chien, et si c'était un Saint Bernard ?

Ah ! ces aventures de vacances !!!


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