Ainsi va la « révolution bolivarienne », où l'on résout les problèmes en tuant le messager.
Depuis des années, le gouvernement vénézuélien ne fournit plus de chiffres sur la criminalité, alors même qu'elle figure en tête des préoccupations des Vénézuéliens dans tous les sondages. Selon l'Observatoire vénézuélien de la violence, Caracas est devenu une des villes les plus dangereuses au monde, avec un taux d'homicides de 140 pour 100.000 habitants (contre 18 pour 100.000 habitants à Bogota, par exemple) et plus de 16.000 assassinats ont été commis au Venezuela en 2009 – un chiffre à mettre en comparaison avec les 4.550 homicides recensés en 1998, année de l'arrivée de Chávez au pouvoir. Le fait que le Venezuela possède un des taux de criminalité les plus élevés au monde met clairement en évidence la négligence d'une des fonctions de base de tout gouvernement. Toutefois, le régime para-dictatorial de Chávez tente à la fois de minimiser le problème et d'en rejeter la faute sur le capitalisme. Son insensibilité à ce problème est évidente et l'on a même pu voir récemment le président de la chaîne publique Telesur plaisanter sur ce sujet lors d'une interview réalisée par CNN.
La semaine dernière, le journal El Nacional avait publié en première page la photo d'une dizaine de cadavres amoncelés dans une morgue de Caracas. L'image était reprise trois jours plus tard dans le journal Tal Cual.
Après que le gouvernement ait jugé la parution « pornographique », arguant que le sujet de la violence serait devenu un « facteur anti-révolutionnaire », un tribunal de Caracas contrôlé par le pouvoir (car au Venezuela, les juges savent bien ce qui les attend lorsqu'ils hésitent à appliquer les oukases) y a réagi en interdisant aux médias de publier durant un mois des « images à caractère violent, sanglantes, grotesques, de faits divers ou non qui sont une atteinte à l'intégrité psychique et morale des enfants ».
En signe de protestation contre cette censure autoritaire, El Nacional est sorti lundi avec des espaces laissés en blanc barrés du mot « censuré ». Ainsi va la « révolution bolivarienne », où l'on résout les problèmes en tuant le messager.