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Asefi avait l'air triste, Wyclef a finalement échoué à sortir vivant de la première étape.
- Je ne te saisis pas bien Asefi. J'avais jamais perçu que tu pouvais appuyer sa candidature. Je t'ai même entendu participer à ce discours élitiste ayisien qui ne voulait pas d'un rappeur à la présidence.
- Ce n'est pas que je l'aurais appuyé, c'est qu'il y aurait au moins eu une campagne. Que les autres candidats, les partis, auraient été forcé de se démener. Préval n'a même pas fat de campagne lors de la dernière élection présidentielle ! Lors de deux derniers exercices, on n'a pas atteint 3% de participation. Atour de moi, personne ne veut aller voter le 28 novembre prochain. Avec Wyclef, la population se serait mobilisée.
- J'avoue que sur ce dernier point, un petit peu de mouvement ferait du bien.
- On sera encore coincé avec ces 'politiciens d'expérience' qui discourent à nous donner la nausée et qui n'arrivent pas à consolider une quelconque action de l'État. Penses-tu sérieusement que le pays peut se reconstruire avec les candidatures présidentielles actuelles ?
- Je n'ai pas le droit d'avoir une opinion là dessus …
- Labadie ! Arrête de niaiser comme on dit chez vous. Il n'y a rien actuellement - un leader politique ou une vision politique - qui pourra mobiliser les 9 millions d'ayisien à sortir du merdier dans lequel on baigne depuis des années. Il faut que la population se mobilise pour que ceux qui seront à la tête du gouvernement sentent qu'ils ne pourront plus se sortir la mousse du nombril et s'emplir les poches à temps plein. Qu'ils devront livrer.
- Wyclef aurait pu faire la différence ?
- Wyclef n'aurait pas été élu, les gens ne sont pas imbéciles. Je ne sais pas d'où cette rumeur est sortie mais elle a été répétée partout, tellement qu'elle est devenue une vérité. Wyclef n'était pas LE candidat des jeunes ! J'ai discuté avec plusieurs jeunes et on n'en a entendu à la radio ou à la télé, l'appui des jeunes à Wyclef était très mitigé. Les haïtiens sont attachés à un certain formalisme, à une certaine vision élitiste de la fonction, Wyclef n'aurait pas passé la rampe. Ce qu'il aurait fait, c'est de mobiliser la population à l'égard de la 'chose' politique et pousser nos politiciens à modifier leur façon de faire.
- Il y en a plusieurs qui pèsent que tu rêves un peu en couleur.
- C'est exactement ça le problème. Quand une population en n'arrive à décrocher d'une manière aussi importante de sa vie politique nationale, on permet des années d'immobilisme politique et social, le terreau le plus fertile pour la corruption. Quelques petites catastrophes naturelles (ouragans et tremblement de terre) ne servent qu'à augmenter le flot des dépenses de la communauté internationale. Je te le dis Labadie, on n'en sera au même point dans un an si les gens ne se mobilisent pas. Le catalyseur aurait pu être Wyclef.
- Il pourrait continuer de l'être. Imagine qu'il décide d'appuyer activement un candidat et qu'il participe à la campagne.
- Là, c'est toi qui rêve en couleur !