Retrouvez l’article dans son contexte original sur LesEchos.fr.
23/08/10 - Les Echos
L’ONG française a amorcé un tournant dans sa stratégie de communication, avec sa première campagne d’affichage de près de 25.000 euros dans le métro parisien. Après une hausse de ses dons de 62% en 2009, l’association entend accroître sa notoriété.
JEANNE DUSSUEIL, LES ECHOS
Pour la première fois, l’ONG Secours Islamique France (SIF), peu connue dans l’Hexagone, s’est offerte une campagne publicitaire massive dans le métro parisien. L’opération, qui a duré une semaine, a coûté 25.000 euros à l’association et a couvert 83% du réseau publicitaire de la RATP, visible chaque jour par plusieurs millions de Franciliens. Crée en 1991 par sa maison-mère internationale, Islamic Relief Worldwide, l’entité française a lancé une nouvelle stratégie pour élargir son éventail de donateurs.
Victime d’un déficit d’image, l’association espère sortir de son «anonymat», après avoir levé 19,4 millions d’euros de fonds en 2009, soit une hausse de 62% de son budget par rapport à 2008. «Les gens pensent que nos dons ne sont destinés qu’aux populations musulmanes. Il nous faut désacraliser le nom de l’association pour être perçu comme les autres ONG», explique Dunia Oumazza, la responsable de la communication au SIF. L’ONG n’est actuellement connue que de 4% du grand public, selon un barème de l’association France générosité, qui mesure la notoriété des ONG françaises.
Un déficit qui est toutefois compensé par un don moyen élevé :100 euros en moyenne par donateur, contre 30-40 euros pour la Croix Rouge. Avec 99% de donateurs musulmans, «la politique de l’association est d’avoir désormais une communication affinitaire plus que communautaire», indique Dunia Oumazza. Grâce à l’opération dans le métro parisien, l’association espère ainsi atteindre 20 millions d’euros de dons pour le budget 2010, après des recettes 2009 historiques en raison du conflit israélo-palestinien.
La mention «France» devant les minarets
L’ONG a conscience de la difficulté rencontrée par la communauté musulmane à diffuser une image positive. En avril dernier, elle a décidé de «relifter» son logo en réduisant la présence des deux minarets, auparavant plus visibles. «Nous avons préféré mettre en avant la mention ‘France’ sur le cercle pour souligner notre identité franco-française auprès du grand public», souligne Dunia Oumazza. L’association qui emploie une cinquantaine de salariés, laïcs ou musulmans, dans le nord-est de Paris, et plus de 80 représentants permanents dans le monde, souhaite ainsi éviter la stigmatisation. L’association se défend de faire de la politique… alors que son engagement en Palestine s’est élevé à 3,3 millions d’euros en 2009 -en tête des zones géographiques. «La situation exceptionnelle à Gaza a mobilisé nos donateurs, mais nous ne donnons aucune préférence au Proche-Orient.» Hasard du calendrier, l’ONG compte aussi beaucoup sur la campagne d’affichage pour intervenir après les inondations au Pakistan.
Les négociations avec la RATP sont à l’image de la nouvelle dynamique voulue par l’association. Lorsque l’ONG s’est présentée aux diverses régies publicitaires, l’entreprise s’est d’abord montrée réticente à l’égard de l’association. «Pour obtenir l’accord final, il a fallu montrer que notre but n’était pas religieux. Nous avons ensuite bénéficié des même avantages que la RATP accorde aux ONG», raconte la représentante. Les retours sur cette campagne sont eux significatifs : surpris, les Franciliens ont appris l’existence de l’association.