Magazine Politique
En s'engageant dans une polémique contre Dominique de Villepin, François Fillon ajoute à la singularité d'un exercice bien particulier de la fonction de Premier Ministre depuis plus de trois ans maintenant.
La brillante victoire de la présidentielle 2007 devait marquer le point de départ d'un défi national impitoyable : la modernisation de la société Française.
Un nouvel exécutif s'installait marqué par trois qualités majeures :
-la jeunesse : l'un des plus jeunes Présidents de l'Histoire de la République Française s'installait à l'Elysée,
- la gagne : le score obtenu ne laissait aucun doute sur le contrat de confiance,
- la tolérance : l'ouverture et l'entrée de personnalités d'opposition annonçaient des frontières politiques nouvelles.
Plus de trois ans plus tard, quatre évolutions majeures sont intervenues :
- de la confiance à la suspicion : les éléments affectifs de confiance se sont peu à peu transformés en éléments quotidiens de choix qui choquent et/ou qui font peur. En 2007, face à une nouvelle initiative de Nicolas Sarkozy, les Français se disaient "il va me séduire". En 2010, ils se disent "il va me punir". Le mot punir peut sembler fort mais il recouvre un sentiment de droits menacés, d'avenir de peurs, d'un quotidien de précarité.
- de la joie à la rancoeur : en 2007, le nouveau couple de l'exécutif était supposé améliorer le quotidien : gagner plus, moins de contraintes, l'énergie positive … En 2010, le seul changement positif semble concerner cette "nouvelle élite" à l'abri des tracasseries du quotidien, trop seule à l'abri du quotidien.
- de l'union à la jalousie : en 2007, le ticket présidentiel allie l'énergie et le calme, le mouvement et la sagesse, la force et la douceur. En 2010, l'opinion trompée par sa nouvelle élite politique cherche le moindre prétexte pour critiquer. Les qualités ne se complètent plus, elles se contrarient. Quand le Premier Ministre échappe encore à la grisaille du jugement sur le Président, il ne protège pas, il encombre.
- de la cohérence à l'éclatement : le circuit court de démocratie entre le candidat et l'opinion, qui était un point fort d'une relation nouvelle, semble être devenu trop court. Il dénoterait un manque de préparation, de réflexion.
Dans ce contexte général, François Fillon n'a jamais incarné le pole d'équilibre que cet ex-séguiniste avait tout pour faire exister.
Si c'est pour terminer non plus comme bouclier mais comme artificier du Président de la République, c'est un exercice bien décevant de la responsabilité de Matignon pour celui qui a longtemps incarné une vision plus noble et élevée des fonctions politiques.