Mon dernier article portait sur l'augmentation du prix des fruits et légumes, entre 2009 et 2010. Sachant que je suis lorrain, il me semblait indispensable de compléter mon propos en évoquant la mirabelle (pas la reine, même si elle est charmante, mais le fruit), qui bénéficie en Lorraine d'une IGP (indication géographique protégée) imposant un cahier des charges draconien. L'origine du nom de ce fruit est assez incertaine puisqu'on évoque tantôt une altération d'un nom italien ou une origine latine, mais également un maître-échevin de Metz nommé Mirabel, qui lui aurait donné son nom au XVe siècle...
Quoi qu'il en soit, ma région compte environ 1 200 hectares de vergers professionnels, soit près de 300 000 arbres. A cela, il faut bien entendu ajouter les arbres des particuliers, sachant qu'un mirabellier commence à donner des fruits au bout de huit ans et peut porter jusqu'à 100 kg de mirabelles, soit 10 000 mirabelles... Pas étonnant, dans ces conditions, que la Lorraine assure à elle seule 70 % de la production mondiale de mirabelles ! Rappelons que si la saison de la mirabelle ne dure que 6 semaines, de mi-août à fin septembre, elle donne lieu à une grande fête durant laquelle se déroule, depuis 1947 à Metz, l'élection de la Reine de la mirabelle, dont la gagnante de l'édition 2010 est Caroline, une jeune thionvilloise de 18 ans.
Malheureusement, au plan économique, la récolte 2010 de mirabelles qui s’annonçait plutôt bonne – après une année 2009 exceptionnelle – pourrait être victime des nombreuses pluies de ces derniers jours qui ont fait exploser les fruits les plus mûrs. Ces dégâts devraient contraindre à un tri plus sélectif des fruits, ce qui nécessitera deux fois plus de main-d'oeuvre (la récolte mobilise, chaque année, près d'un millier de travailleurs saisonniers)... et débouchera par conséquent sur l'augmentation du prix de vente – on parle déjà d'une hausse d'un euro au kilogramme ! Les industriels n'accepte en effet que très peu de fruits éclatés (maximum 10 %, en général). Le reste ne peut être destiné qu'à la distillation, mais cela rapporte cinq fois moins au producteur...
Un an d'attente pour 6 semaines de récolte, le tout soumis aux aléas climatiques : voilà un bel exemple d'une vraie agriculture-passion, très loin d'un certain capitalisme prônant la privatisation des gains et la socialisation des pertes, au nom de l'intérêt général !