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1990, c'était il y a 20 ans !

Publié le 31 août 2010 par Atango

L'un de mes correspondants m'a adressé un commentaire, que je vous invite à lire au bas de l'article "la colère du vieux lion." Ayant constaté que ma réponse était plutôt longuette, je l'ai réécrite afin d'en faire une chronique, que voici.

Bonjour, Alessandro et merci pour ton témoignage.

J'ai moi-même vibré pour cette équipe de 90, et je peux te chanter du début jusqu'à la fin "Un estate italiana", même si je ne comprends rien aux paroles. Suite au match Cameroun-Argentine, j'avais tremblé sans interruption pendant deux heures : le choc.

Après le premier but de Milla contre la Colombie, j'étais sorti en courant de la maison, et je m'étais retrouvé dans le centre-ville, à 300 mètres de là, sans savoir comment. Heureusement qu'il n'y avait pas un chat dehors, et que toutes les voitures étaient garées.

C'est te dire ce que cette période a eu comme impact sur moi, et ce que représente Roger Milla pour le Cameroun.

Mais 1990, c'était il y a 20 ans !

Joël Matip n'était même pas encore né. Or, depuis cette période, nous n'avons plus rien fait de bon en Coupe du Monde. On sait pourquoi : 1994 fut raté parce que l'équipe de 90, que personne n'osait toucher, était vieillissante et qu'elle dormait encore sur ses lauriers. Lors de la Coupe du Monde de 1998 en France, les Lions furent victimes d'un arbitrage néfaste. En 2002, l'amateurisme et l'impéritie des dirigeants minèrent la campagne Corée-Japon, alors que nous disposions de notre génération la plus talentueuse. Je passe sur la tragédie 2006. En 2010, malheureusement, nous avons encore échoué.

Là aussi, on sait pourquoi, puisque tout s'est passé dans la presse. Il suffit de suivre le fil des interviews. Certains propos de Paul Le Guen qui laissaient entendre qu'on lui imposait certains joueurs. Certains articles de presse qui, par anti-etoïsme primaire, vouaient le même Le Guen aux gémonies parce qu'il avait osé enlever le brassard à Rigobert Song, comme si le capitanat (terme camerounais) était une position sociale. Certains journalistes qui, travaillant pour d'obscurs lobbies, ont harcelé le sélectionneur national en prétendant avec un culot phénoménal que le "tout le peuple camerounais" réclamait le même Rigobert Song.

Et cette sortie de Roger Milla, entièrement à charge contre Samuel Eto'o, et qui venait verser de l'eau au moulin de ceux qui entraient en rebellion. Résultat, un groupe divisé en Afrique du Sud, une guerre larvée et une ambiance pourrie jusqu'à la moëlle, avec les conséquences qui s'ensuivent. Tous ceux qui ont participé à la préparation de cet échec se connaissent. Ce sont des adultes, et ils doivent regarder leur conscience.

Sur cet espace, on ne peut pas être accusé de jouer les justiciers de la 25e heure, puisque chacun de ces actes a été dénoncé immédiatement, et que toutes nos prédictions ont été avérées. Aucun mérite : il suffit d'avoir un peu de jugeotte et de ne pas se laisser aveugler par la détestation de Samuel Eto'o.

En résumé, Milla est un héros, je suis le premier à le dire. Mais les faits qui lui ont attribué ce statut datent de 20 ans, et son comportement actuel ne fait que discréditer cet héritage. On aimerait qu'il en fût autrement, mais c'est comme cela et il faut le dire. Ceux qui prennent sa défense (en acceptant de sa part ce que nous reprochons tous à juste titre à Samuel Eto'o) devraient réfléchir à cela en dehors de tout sentiment d'idolâtrie (il paraît qu'il faut être fan aujourd'hui pour mieux haïr demain).

A propos de Samuel Eto'o, j'entends dire ici et là que suis l'un de ses "inconditionnels". Ce qui reviendrait à dire que je le soutiens, quelle que soit la situation. Il n'y a rien de plus faux.

Aujourd'hui, je célèbre par des articles les exploits sportifs d'Eto'o, comme j'ai célébré à l'époque ceux de Roger Milla. Il s'agit d'un compatriote qui est l'un des meilleurs au monde dans son domaine, et je suis fier de lui pour cela. Cela ne m'empêche pas de le critiquer lorsque je l'estime nécessaire, en faisant attention à ne pas lui mettre sur le dos des faits qui s'expliquent par la lâcheté, la couardise ou la cupidité de ceux qui le laissent parfois faire et lui accordent des passes-droits.

A l'époque où Eto'o avait donné une interview pour "frapper du poing sur la table" alors qu'il n'était même pas encore capitaine, j'avais proposé qu'il soit sanctionné par quelques matchs de suspension. A plusieurs reprises, j'ai critiqué sa soif constante de reconnaissance et de respect, ses postures de star et tous ses dérapages en communication.

L'ennui, c'est que ce jeune homme polarise une forte quantité de haines d'origines diverses. Et pour ceux qui le haïssent, le critiquer, c'est encore être de son côté, c'est mou, c'est hypocrite. Il faut faire comme eux : le honnir tous azimuts et de fond en comble. Ce n'est qu'à ce prix qu'ils vous supportent et permettent que vous puissiez respirer à leurs côtés.

Eh bien, tant pis, mais je continuerai à être ce que je suis : un analyste sans parti et sans parti-pris. Je peux me tromper, mais jamais je ne me censurerai et jamais je ne verserai dans l'outrance à propos de qui que ce soit. Je juge les actes et non les hommes, parce que les hommes sont perfectibles, et que ce sont les actes qui leurs permettent de s'améliorer.

Cher Alessandro, j'espère que nous pourrons à nouveau vibrer pour une équipe camerounaise en Coupe du Monde. Ne serait-ce que pour débloquer les horloges camerounaises qui se sont bloquées à 1990. Il y a 20 ans.


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