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Arche de Zoé : N’Djamena se fait justice

Publié le 27 décembre 2007 par Willy


La cour criminelle de N’Djamena a condamné, sans distinction, les six Français de l’association à huit ans de travaux forcés. Paris demande leur rapatriement.
Huit ans de travaux forcés: au milieu d’une salle comble et surchauffée du palais de justice de N’Djamena, la sentence est tombée hier soir pour les six membres de l’Arche de Zoé. Qui ont paru sonné à l’énoncé du verdict. La vraie surprise est l’absence de distinction entre les inculpés : le logisticien Dominique Aubry ou l’infirmière Nadia Merini, qui a fondu en larmes, avaient-ils la même responsabilité qu’Eric Breteau, le véritable chef d’orchestre de cette opération ?

Deux des Tchadiens inculpés, le maire et le secrétaire général de Tiné, ont été acquittés. Ibrahim Souleimane, le chef de village soudanais qui avait servi d’intermédiaire, et Moahamat Dagout, un chef de canton, ont eux été condamnés à quatre ans de prison ferme. Un autre intermédiaire qui n’a pas encore été inquiété, le colonel Mahamat Eritero, pourrait également être poursuivi dans cette affaire, selon le procureur.

Dédommagement. Ce dernier avait requis entre sept et onze ans de travaux forcés pour les membres de l’Arche de Zoé. «Les travaux forcés, cela consiste à aller en brousse casser des cailloux ou travailler sur un chantier gratuitement» , précisait hier Brahim, devant le palais de justice après le verdict. Mais selon des sources informées, Eric Breteau et ses cinq compagnons d’infortune devraient être rapidement transférés vers la France pour y purger leur peine en vertu d’un accord franco-tchadien (lire ci-dessous). Les condamnés devront par ailleurs payer 60 000 euros de dédommagement pour chacun des 103 enfants qu’ils voulaient emmener, soit 6,18 millions d’euros.

Les avocats de la défense n’ont donc pas réussi à convaincre les juges que toute cette affaire relevait d’une maladroite «folie d’amour pour tirer du malheur les enfants du Darfour», comme le soulignait lors de sa plaidoirie Me Gilbert Collard. L’avocat, tout comme ses collègues, avait insisté sur le désintéressement de leurs clients et l’émotion qu’avait suscité chez eux la tragédie du conflit au Darfour, aux portes du Tchad. «Eric Breteau a un cœur énorme», avait ainsi souligné Me Céline Laurenzon, son avocate, alors que Me Collard rappelait l’influence sur les accusés d’une doctrine élaborée «par l’actuel ministre des Affaires étrangères» qu’il a résumée ainsi : «Tout est possible pour sauver des vies.»

Tout est possible certes, sauf d’emmener en France de faux orphelins du Darfour recueillis en réalité dans des villages tchadiens et dont les familles n’avaient pas «compris» que la «vie meilleure» promise à leurs enfants leur était offerte en France et non au Tchad. Même si les membres de l’Arche de Zoé ont certainement été dupés par leurs intermédiaires, ils ne se sont guère montrés curieux. Trop pressés de réussir pour s’attarder dans l’est déshérité du Tchad.

«Drames». «Toute cette affaire n’est pas un drame mais plusieurs drames», a souligné Eric Breteau, à la fin du procès. «Si ces enfants sont soudanais et se retrouvent désormais privés d’une vie meilleure, c’est un drame. S’ils sont en réalité tchadiens et qu’on nous a menti c’est un drame et je suis navré et désolé car nous n’avons jamais eu l’intention de séparer des familles», a-t-il ajouté.

«C’est bien que les accusés soient jugés en terre d’Afrique, car c’est ici qu’ils doivent s’expliquer», avait conclu Me Mario Stasi dans sa plaidoirie. Ils se sont donc expliqués. Sans convaincre cette «terre d’Afrique» qui les a condamnés.

Par MARIA MALAGARDIS -http://www.liberation.fr/


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