Voici un superbe film. Précisons d'entrée qu'il n'est pas "géopolitique" ; ou plus exactement, les conclusions géopolitiques que l'on peu en tirer sont éloignées du traitement du film. Il a un succès incroyable (voir ici) peut-être parce qu'il approche une certaine vérité (mais aussi qu'il a bénéficié d'une belle campagne de presse et d'un bouche à oreille exceptionnel).
Alors ?
1/ Alors, ce film est comme une réponse à l'excellent "Agora" : souvenez-vous, j'avais déjà aimé ce film, alors pourtant qu'il était fort critique avec certaines conceptions de la religion. Des chrétiens pratiquants pouvaient en sortir meurtris ; et pourtant, ce film était excellent, dans sa forme comme dans son fond. C'est d'ailleurs parce que je l'ai apprécié que je n'ai aucune gêne à apprécier "des hommes et des dieux" sans courir le risque d'être accusé de parti pris.
2/ Le film est d'abord splendide pour ses qualités cinématographiques : un cinéphile, quelque soit son accord avec le propos, sera emporté par la mise en scène et l'authenticité retenue des acteurs. Surtout, la scène du verre de vin, sur fond de "Lac des cygnes" de Tchaikovsky, est absolument sublime, alors pourtant qu'aucun mot n'est prononcé : la progression de la joie vers la peur puis l'acceptation et l'abandon confiant est un sommet de cinéma.
3/ Outre ces qualités formelles, le film montre des réalités humaines, simplement humaines, avec des hommes qui doutent et croient et font confiance... Malgré l'irruption violente du politique, on assiste à une lutte pour ne pas céder à cette "tentation politique" : alors, à la différence d'Agora, la religion devient une protection et donc une réunion des peuples : elle est une antidote au choc des civilisations, instrumentation dévoyée de la religion. Et comme le dit une villageoise aux moines : vous êtes la branche et nous sommes les oiseaux : on ne saurait mieux dire à quel point la religion relie, y compris entre l'islam et la chrétienté : là encore, tout le contraire d'Agora.....
Ainsi, il y a des illustrations différents du rôle de la religion et d'un certain héroïsme : païen chez Ipathie, alors que cet héroïsme prend le nom de sainteté chez les chrétiens. C'est au fond la même chose. Ces films sont à voir en duo.
Olivier Kempf