Submarino.
Thomas Vinterberg.
Nick allume une cigarette. Il a ...quoi? 10,12 ans? Il a aussi et surtout un bébé dans les bras. Un nourrisson, deux garçons, une mère qui rentre pour distribuer des tornioles et s'endormir dans sa pisse et son vomi. Nick détenteur de l'autorité est à peine plus âgé que son cadet. Souvent, les deux frangins volent la nourriture, fument les clopes et boivent le Vermouth de la"maman" Pas grave: ça permet de déconsigner les bouteilles vides pour acheter du lait en poudre. Nick et son frère cherche un prénom dans l'annuaire et baptisent le bébé.
La nuit de trop. Alcool, cigarettes et sono à fond. Ne pas entendre les pleurs. Seuls, fêter l'évènement. Au matin, Martin, le bébé fraîchement baptisé à l'arrache, est mort.
La mort subite du nourrisson, ça s'appelle. Moi, j'opte plutôt pour la mort subtile du bébé qui reprend ses billes, pas client de cette vie qui démarre mal.
Bienvenu dans "Submarino" de Thomas Vinterberg déjà remarqué pour "Festen", un règlement de compte familial.
"Submarino"n'est pas un documentaire sur la vie des sous mariniers, c'est la vie qui touche le fond. Celle des enfants qui grandissent sans s'élever. Les mals embarqués qui ne feront jamais surface. Une enfance en apnée pour des vies qui s'essouffleront.
Poils au menton et vingt ans plus tard, Nick pousse de la fonte et descend des bières. Il sort de sa piaule à la demande de Sofie pour un petit câlin. Sofie est mère sans enfant. Les services sociaux lui transmettent les dessins et les lettres gribouillées mais pas l'enfant qu'ils lui ont retiré. Nick sort de son foyer pour stationner devant une cabine téléphonique. Il tape sur le clavier un numéro tiré d'un bout de papier froissé. Il tire rarement le bon numéro! Il tape aussi sur la machine sourde à ses appels au secours.
Quand tu as passé ton enfance de foyer en famille d'accueil, abandonné par une "mère" alcoolique avec un frère dans la nature et l'autre dans un petit cercueil blanc, t'as le droit d'en vouloir un peu à la vie et aux cabines téléphoniques. Nick se brise la main qu'il faudra amputer, mais pas de suite. Plus tard, quand il sera en prison. Pour le moment, il va souffrir un peu et se soigner à la gnôle. Pas grave: cette main l'innocentera d'un crime qu'il s'est attribué pour sauver la mise à Yvan. Yvan, c'est le frère d'Ana. Ana, c'est le nom tatoué sur cette main meurtrie et marquée, bientôt coupable. Ana s'est coupée assez vite de la vie et de la compagnie de cet enfant cassé casé dans un corps d'athlète qui s'éveille en sueur les nuits de fièvre, de cris et de larmes. Elle avorte de Nick, de son mal-être et de l'embryon qu'elle porte. Nick ramasse Yvan sur le trottoir.Sans doute parceque quand il est avec lui, il est avec elle.
Ivan est obèse et légèrement neu-neu.
Difficile à caser. Pourtant plein d'affection, il a un soucis avec les filles: il les étrangle quand elles crient.
Sofie ne crie pas quand Yvan la touche. L'ami de son amant est son amant. Nick se retire quand l'Obaise retire le O avec Sofie.
Sofie a due crier puisque Ivan l'a étranglée.
Nick n'a d'autres cadeaux que sa liberté à offrir à Ana. Il endosse le crime d' Yvan et se retrouve dans une cage encore plus petite que sa vie. Pas grave: il retrouve son frère cadet. Père, célibataire, toxico, dealer maladroit. Au placard pour toute l'enfance de Martin. Martin! Comme le petit frère mort le jour de son baptême. Le père et le fils ont chacun le Z de Zorro dans la poche. Le justicier just'àtemps les réunira. Promesse d' un soir d'optimisme et de frigo plein.
Nick:
"- c'est toi frérot?
Il y a des barreaux de prison bien solides entre les deux frères et de l'amour intact et costaud.
- oui!
- il y a longtemps que tu es là?
- trois semaines.
- maman est morte!
- je m'en fous!
- tu as été un bon grand frère, tu as fait ce que tu as pu.
- qu'est-ce que tu dis?
- j'ai un fils: Martin.
- où est Martin?
- Je ne sais pas, moi aussi j'ai fais ce que j'ai pu.
- qu'est-ce que tu dis?
- je m'arrête là, Nick!"
Les portes claquent. La promenade est terminé. La parenthèse entre les frères aussi.
Les barreaux sont costauds comme la fraternité, mais juste un peu plus: Nick ne pourra empêcher le suicide de son cadet!
Innocenté parce qu' il était impossible d'étrangler Sofie d'une seule main, l'amputé sort de prison.
Martin, néo orphelin à temps plein, a un plan B pour retrouver papa: Martin se souvient.
"- tant que tu porteras cette lettre sur toi, nous serons ensemble!"
La lettre Z comme Zorro qui réunira le père et le fils.
Voilà pourquoi on retrouvera Martin pendu dans l'église au dessus du cercueil blanc de son papa.
Ce Zorro, quand même, c'est vraiment un justicier!
"- Cela ne se fait pas de raconter la fin d'un film!
- ce n'est pas la vrai fin.
- alors?
- alors, c'est la mienne car je ne survivrai pas à un "Submarino II !"
B2-C2.Touché, coulé!
Abscisse et ordonnée, l'image et le son aussi lucides qu'une lame de rasoir viennent de trancher ton manichéisme en deux. Cherche pas où est le bien, où est le mal, ce sont juste des vies de merde qui existent quelque par dans le monde d'en bas. Cherche pas l'enfer, cherche pas le paradis, les parallèles jamais ne se rejoignent. Elles se cotoient. Parfois assez proche l'une de l'autre!
Linéaire, sans rupture de rythme, le film démarre haut dans l'abscisse et ne retombe jamais avant le générique de fin et toi tu oublieras de râler parce que tu ne trouves pas de place pour garer ta bagnole, passque là mon gars, ma gamine, y a du malheur!