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Retraites : les 7 désinformations de Sarkozy pour contrer la contestation sociale

Publié le 24 septembre 2010 par Juan
Retraites : les 7 désinformations de Sarkozy pour contrer la contestation socialeJeudi 23 septembre, environ 3 millions de personnes ont défilé en France, un mouvement de plus forte ampleur que le 7 septembre dernier. Mais Nicolas Sarkozy s'en fiche un peu. En fin de journée, il a réuni François Fillon, Eric Woerth et Georges Tron pour « faire le point.» En d'autres termes, préparer le coup d'après. Depuis 10 jours, les diversions ont été nombreuses, évidentes et soulignées. Depuis 10 jours, tout a été dit pour décourager les protestataires. Tout au long de la journée de jeudi, le gouvernement a poursuivi son travail de manipulation sémantique. Et tout, absolument tout, est concocté dans le bureau de Nicolas Sarkozy.
« oui, tout se décide à l'Elysée.» déclarait hier matin Dominique Paillé, le porte-parole de l'UMP, sur la radio publique Le Mouv. On n'en doute pas. Une fois de plus, la cohérence des éléments de langage répétés par les proches ou moins proches du Monarque ne lasse pas de surprendre. Voici une courte revue des 7 mensonges délivrés depuis l'Elysée contre la contestation sociale.
1. « Cela ne sert à rien. »
Sur tous les tons, dans toutes les gammes, les responsables de Sarkofrance ont répété que le projet de réforme des retraites n'était modifiable qu'à la marge puisque Sarkozy ne cèderait pas. Tous les journalistes font semblant de s'interroger ici ou là sur la suite à donner aux manifestations. Et même quand la proposition (implicite) d'assouplir l'âge de retraite à taux plein pour les femmes émane de Gérard Larcher, le président UMP du Sénat, le gouvernement réitère qu'il ne changera rien, qu'il ne peut pas faire de cas particulier. L'injustice faite aux femmes est pourtant flagrante: celles nées après 1951 devront travailler - pardon, cotiser plus que leurs homologues masculins. Après l'encourage nataliste des années 1970 et 1980, voici la retraite-sanction des années 2010.
Fichtre ! Si Sarkozy refuse tout amendement au président du Sénat, c'est donc qu'il n'y a rien à espérer, n'est-ce pas ? Belle erreur, joli mensonge ! Sarkozy sous-estime l'amertume populaire. Le gain politique que le Monarque bling-bling de l'Elysée espérait tirer de sa réforme sera nul.
2. « Même pas peur ! »
Minorer par avance l'ampleur des manifestations et de la grève, afficher sa sérénité et sa confiance sont une autre technique de déstabilisation somme toute classique. Ainsi Raymond Soubie, le conseiller social de Sarkozy, a décrit, à l'avance, la «journée d'action»  comme « une figure sociale classique.» L'Elysée est confiant, répète le Figaro : « les hommes du président ne veulent pas claironner, mais cachent difficilement un optimisme inattendu alors qu'ils ne sont qu'à la mi-temps de «la» bataille de Verdun du quinquennat. Car, pour le moment, le scénario des retraites est le seul qui suive le plan prévu. »
3. « Il y a des risques d'attentats. »
Lors du Conseil des ministres, Nicolas Sarkozy a confié à ses ministres que la menace terroriste n'était pas une manipulation:  « On ne fait pas de la politique sur ce genre de sujet.» Vraiment ? Dominique Paillé, porte-parole de l'UMP, suggérait mardi qu'il pouvait être dangereux de manifester. Mardi 21 au soir, François Fillon annonçait qu'il prendrait contact avec les responsables de l'opposition pour partager quelques informations sur les menaces terroristes... au Niger. Sur son blog, Bruno Roger-Petit s'indigne : « C'est la treizième fois en huit ans qu'un gouvernement de droite nous fait le coup de la menace terroriste.» Jeudi, comme par hasard, l'Elysée annonçait que Nicolas Sarkozy avait réuni un nouveau Conseil de défense et de sécurité au sujet des otages Français, la quatrième réunion depuis le 16 septembre. Quel besoin Nicolas Sarkozy a-t-il  de communiquer sur la tenue de chacune de ses réunions, sachant qu'aucune information concrète n'en filtre ensuite ?


4. « Les banques vont payer. »
Comme par hasard, Christine Lagarde, la ministre de l'Economie, a annoncé mercredi, veille du jour de grève, que la taxe bancaire, qui ne concernera qu'une vingtaine de banques, décidée en juin dernier, et qui visera les placements à risques des établissements bancaires, rapportera 504 millions d'euros dès 2011 et peut-être 800 millions dans deux ans. « Elle frappera les banques françaises, au titre de leur activité internationale, mais aussi les banques étrangères, au titre de leur activité française » a précisé la ministre. François Baroin, pourtant ministre du Budget, s'est fait grillé la politesse par sa collègue. Il y avait urgence à communiquer sur ces futurs efforts que l'on imposera aux méchantes banques.
5. « Il n'y a pas d'alternative. »
Mercredi, le Figaro publie en une les résultats d'un sondage sur-mesure, réalisé par l'ineffable Opinion Way : « Retraite : la promesse du PS ne convainc pas les Français.» Il faut coûte que coûte prouver, répéter, démontrer qu'il n'y a pas de miracle, qu'aucun projet alternatif n'est viable face aux enjeux des déséquilibres des comptes de retraites. C'est faux, mais la Sarkofrance préfère répéter le mensonges plutôt que de confronter chacune des mesures alternatives proposées à son projet. Eric Woerth, jeudi soir, osait expliquer : « On a bien expliqué la réforme et on doit continuer, parce qu'il y a quand même des gens dans la rue, quand même des grèves. » Le ministre était pourtant bien en peine pour répondre à une députée UMP, Chantal Brunnel : « Monsieur le ministre vous avez raison de dire que c'est l'inégalité salariale qui explique la faible retraite des femmes. Pourriez-vous maintenir l'âge du taux plein à 65 ans pour ces mères de famille qui, à travers leur enfants, participent au financement de la retraite par répartition ?». Et Eric Woerth, piteux, lâcha: « Je ne peux pas répondre par oui ou non à cette question ».
6. « Les Français ne sont pas mobilisés »
Jeudi 23 septembre, l'Elysée et les syndicats se sont livrés à une bataille de chiffres plus vigoureuse que lors des précédentes manifestations sur l'ampleur de la mobilisation. Pour Sarkozy, il s'agit de démontrer que les Français acceptent cette réforme difficile mais « incontournable » Selon la police, moins d'un million de manifestants ont défilé. Ils étaient 3 millions selon les syndicats. Certains écarts en deviennent ridicules : ainsi à Marseille, la police annonce 22 000 manifestants; les syndicats 200 000. A Bordeaux, la fourchette oscille entre 37 000 et 120 000. Qui faut-il croire ? Prenons la moyenne : 2 millions, c'est quasiment le même nombre que les annonces syndicales du 7 septembre dernier. A l'Elysée comme au gouvernement, on a contesté toute la journée l'ampleur des manifestations. Dès 13h30, la préfecture de police de Paris ne compte que 40 000 manifestants aux départ des cortèges. Vers 14h, le ministère de Brice Hortefeux totalisent 400 000 personnes sur la France entière. Le soir sur France 2, Eric Woerth insiste: « Il y a une décélération incontestable de la mobilisation. »
7. « Les syndicats sont divisés »
Raymond Soubie (à l'Elysée), Eric Woerth et ses conseillers (au gouvernement) tentent de faire croire que le front syndical est désuni, preuve d'une relative acceptation, par certains, des paramètres fondamentaux de la réforme. Dans le Figaro, sur LCI, ou sur Europe 1, on insiste sur l'opposition entre la CGT et la CFDT, d'un côté, et le front Solidaires, de l'autre. On glose sur les divergences tactiques, la craintes des uns de se faire déborder, l'envie des autres d'en découdre à coups de grève générale. Mais jeudi, force était de constater que le front syndical était uni: Bernard Thibault (CGT), Annick Coupé (Solidaires), Bernadette Groison (FSU) et François Chérèque (CFDT), tous présents en tête des cortèges, se sont félicités à l'unisson de la réussite de la mobilisation.
Au final, Nicolas Sarkozy fera sans doute passer sa réforme, début octobre, au Sénat. Mais sa victoire lui est déjà volée. Qu'il amende ou pas sa réforme, le mal est fait : cette réforme est impopulaire car injuste. Sarkozy aura du mal à capitaliser sur cette éventuelle victoire à la Pyrrhus.
Ami sarkozyste, quand partiras-tu à la retraite ?


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