JE N'ECRIRAI PAS
In times of violence, personal predilections for niceties of color and form seem irrelevant.”
Adolph Gottlieb, The portrait and the modern artist, 1943.
Tant que couronnes et drapeaux dissimuleront les crissements des carcasses
Tant que le métal ébrasé arrachera ses pétales à la fleur de nos chairs
Tant que les mains se serreront aux sourires entendus serments de racaille au flanc des noires limousines
Tant qu’on jugera l’orthodoxie des caresses à l’aune des chromosomes partagés
Tant que durera le sinistre ballet des cardinaux aux sermons avaloirs
Tant que fusera l’effeuillement assassin des innocents dans la déraison bucolique des ainés
Tant qu’à défaut de larmes on extorquera au jeu des cétacés des baignoires de sang
Tant que vivra l’enfermement la mort dispensée le vertige du gouffre
Tant que pèsera l’opprobre sur les épaules des voyants
Tant que la vindicte des jeunes héros surhumains
Tant que leur âme insouciante
Tant que
Non
Je n’écrirai pas
La timide étincelle du soleil qui se meurt ou de celui qui renait
Les astres et la récidive des corolles
Le décompte des voluptés
Je n’écrirai pas
Ces faons qui pour mieux nous séduire traversent l’asphalte sans souci de l’automobiliste
Le bénéfice de l’altérité
La liste inconvenante des petits miracles
Je n’écrirai pas la fureur elliptique des matins de juillet où l’orgasme prend à la gorge comme une résurgence
Les rires indécents qui frémissent sous les draps
Les lendemains frénétiques
Non
Je n’écrirai pas la douce fraîcheur qui lape nos épaules nues ces soirs où tu m’entraines sous les grandes ombrelles de verdure
Ta main dans ma main
Et sa main dans tes cheveux
Arnaud DELCORTE.