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Révélations de Dominique Hummel - 2ème partie : un soarin' et des améliorations à Danse avec les robots à venir

Publié le 28 septembre 2010 par Blogfuturoscope

Entretien avec Dominique Hummel, président du directoire du Futuroscope - Seconde partie

Article Attractions du Mercredi 29 Septembre 2010

Propos recueillis par Pascal Pinteau

Quelles ont été les premières choses que vous avez apprises en arrivant, et les découvertes les plus surprenantes que vous avez faites en relevant ce défi ?

Il y en a un certain nombre. En intuition marketing, j’ai tout de suite pensé que nous avions intérêt à nous adosser à la créativité française, et aux acteurs du monde du divertissement et de l’image de notre pays. Au-delà d’une approche marketing, j’ai cherché des signatures pour cultiver la différence entre le Futuroscope et des parcs comme ceux de Disney. J’ai donc approché des artistes qui avaient envie de travailler avec le Futuroscope. C’est ce qui avait déjà été fait il y a très longtemps avec Jean-Jacques Annaud, lorsqu’il avait réalisé le film LES AILES DU COURAGE pour le Parc. J’ai pris mon bâton de pèlerin et j’ai pu constater que le Parc avait une très bonne image. Ensuite, il a fallu apprendre à travailler avec des artistes, car on ne peut pas fonctionner avec eux comme on le fait avec un prestataire de service auquel vous faites revoir sa copie si cela ne va pas. L’artiste, lui, est dans son œuvre. Vous prenez donc avec lui le risque de l’œuvre. Pas toujours évident d’être en phase…  Luc Besson a été très à l’écoute et a tenu compte de nos indications. Cela n’a pas toujours été le cas.

Ensuite, j’ai tenu à développer l’aspect vivant du parc, car beaucoup de nos attractions étaient basées sur l’image et la technologie. Or le parc ne pouvait être qu’un écrin pour un contenu. Il fallait trouver une vraie ligne éditoriale autour du futur, qui est une thématique sur laquelle nous travaillons toujours. Je crois que toute l’équipe est contente d’être sortie du côté « monoproduit image et Imax ». On ne pouvait pas tout miser sur la technologie pour la technologie. Nous avons donc travaillé en ce sens. A terme, dans les trois ans, cette évolution devrait nous permettre de présenter un tiers d’images à contempler dans leur pur écrin technologique, avec le summum de la qualité, puis un tiers d’images « à vivre » avec le cinéma dynamique, l’interactivité, et puis un tiers de spectacle vivant, comme avec l’attraction « DANSE AVEC LES ROBOTS ».

Quels sont les outils qui vous ont permis de connaître les goûts et les souhaits de votre public, puis d’aller au-devant des visiteurs potentiels qui n’avaient pas encore découvert le parc ?

Nous faisons beaucoup d’enquêtes pour connaître les réactions des visiteurs. Le Futuroscope est l’une des entreprises les mieux structurées sur la connaissance de soi. Ici nous avons trois leviers pour agir : l’attractivité, la satisfaction et le compte d’exploitation. Evidemment les deux premiers se rejoignent dans le troisième, puisqu’ils déterminent ses résultats. Mais il faut savoir analyser tout cela. Comme disait Ford « Si j’avais fait ce que mes clients demandaient, j’aurais construit des calèches avec des chevaux qui avancent plus vite, mais je n’aurais jamais inventé la voiture. » La plupart des innovations sont des ruptures. J’adore cette formule de Tristan Bernard, le grand homme de théâtre, qui disait « Il faut surprendre le public avec ce qu’il attend. » C’est magnifique, parce qu’au-delà du théâtre, cela définit aussi ce qu’est le marketing. Car le public peut vous dire « Ah, bien j’avais envie de cela, mais je n’aurais jamais été capable de le formuler ». Je m’intéresse beaucoup à la sociologie de la consommation. Je milite beaucoup pour ce genre d’études, car il faut que l’on réponde à un besoin sociétal, surtout dans cette période de crise. Il faut que nous arrivions à comprendre et à anticiper les aspirations des gens, car notre visiteur ne nous dira pas quoi faire.

Nous aimerions revenir sur les attractions que vous avez lancées depuis votre arrivée, en vous demandant d’évoquer chaque fois comment l’idée de l’attraction est née, comment vous l’avez réalisée, quelles ont été les difficultés inattendues liées à ces créations et enfin quelles ont été les réactions des visiteurs qui vous ont le plus marquées…

Le fonctionnement que nous avons mis en place, pour compléter ce que je disais précédemment sur la règle des 10/20/60, c’est de faire intervenir une attraction star tous les deux ans, qui va engloutir à elle seule presque l’intégralité des 10% du chiffre d’affaires. Celle-là, c’est la locomotive qui va tirer le parc pendant deux ans, et il faut que l’on puisse communiquer dessus et qu’elle génère une satisfaction importante. Il faut qu’elle nous amène plus de monde et qu’elle rende les visiteurs encore plus heureux d’être venus. C’est ainsi que nous avons fait VOYAGEURS DU CIEL ET DE LA MER en 2004, qui était un investissement de 6,5 millions d’euros. En 2006, c’était DANSE AVEC LES ROBOTS, 7 millions d’euros,  en 2008  LES ANIMAUX DU FUTUR, et en 2009/2010, ce fut ARTHUR L’AVENTURE 4D. A 500 000 euros près, les coûts de ces attractions sont à peu près les mêmes. Après j’ai voulu introduire un deuxième niveau, qui est celui des attractions de reconversion. Il s’agit alors de ne pas refaire le bâtiment, mais de renouveler la technologie ou le contenu. Nous essayons de parvenir à ce but en réalisant des investissements de 2 à 3 millions d’euros. Il y a enfin un troisième niveau, où l’on ne touche ni au bâtiment ni à la technologie, et c’est là que Imax et d’autres fournisseurs nous aident beaucoup. Cette approche nous permet de conserver un rythme de renouvellement perpétuel de 20% du contenu, avec cette triple hiérarchie.

Revenons donc à VOYAGEURS DU CIEL ET DE LA MER…

Le choix de cette attraction s’est fait naturellement, car le tapis magique que vous connaissez bien, en tant que spécialiste de l’image, est un pavillon unique au monde, puisqu’il propose une double projection Imax, devant et sous les pieds des spectateurs qui voient une image sous leurs pieds, au travers d’un sol de verre. J’avoue que pour moi, cette expérience dans son état actuel pose problème, et nous réfléchissons à une solution qui consisterait à retirer les fauteuils de la salle, de manière à obtenir un effet plus proche de SOARING OVER CALIFORNIA (Attraction Disney présentée dans les parcs California Adventure et EPCOT, NDLR.) Malgré cela, c’est un bâtiment qui devenu une des icônes architecturales du parc, mais aussi, au début des années 2000, un des symboles de son non-renouvellement, avec le film dédié aux papillons monarques présenté depuis l’ouverture. Ce bâtiment étant unique, il nous imposait d’initier notre propre production de film, et j’étais convaincu que Jacques Perrin serait le partenaire idéal, car il s’est imposé comme un cinéaste qui est un poète de la nature. J’ai donc entrepris de convaincre tout le monde, y compris Perrin lui-même, qu’il fallait que ce soit lui qui crée le film. Après, il a fallu qu’il découvre le format Imax. Et que nous découvrions sa manière de faire. Perrin lance ses équipes sur un projet, puis il accumule les images. Je dirais que sur le papier, le choix était le bon, mais que le contenu final du film était un peu moins au rendez-vous, parce que cela manque d’histoire. Il faut toujours une histoire…Même dans l’univers pédagogique, c’est la règle universelle. Montaigne disait « Je n’enseigne pas, je raconte ». C’est ce qui explique qu’il y a eu des réactions contrastées autour de cette attraction. Les gens amoureux des grandes images, plutôt plus âgés ont aimé, tandis que les jeunes, évidemment, ne s’y retrouvent pas. Il y a un effet technique à améliorer, car les fauteuils gênent la vision de l’image du dessous, mais nous y travaillons. Il y a donc eu une réponse mitigée sur ce premier acte un peu courageux, qui était tout de même une rupture avec l’axe du Futuroscope ancienne version. Nous voulons nous adresser à la fois à la tête, au corps et au cœur des visiteurs dans chaque attraction, et renouer avec les standards de la profession en matière de sensations. Pour l’étape suivante, je voulais faire un pas de plus dans la sensation, sans passer par l’écran.

C’est ce qui vous a conduit à imaginer DANSE AVEC LES ROBOTS…

Oui, car il fallait trouver une idée de manège, sans que l’on se mette à dire « Tiens, ça y est, ils font des rollercoasters comme tout le monde ! » Et tomber sur ces robots a été une jolie découverte, qui a rapidement convaincu les élus de la région. Nous sortions du monde de l’image pure, même si le grand écran cylindrique qui traverse la salle présente les images de Kamel Ouali et de ses danseurs. Avec les robots,  nous étions dans une thématique nouvelle, cohérente, très « Futuroscopienne » ! Cette attraction a connu d’emblée un fort engouement du public, et s’est imposée dans le Top 3 du parc, où elle est restée depuis. Si c’était à refaire aujourd’hui, je ferais un pavillon plus grand, car on se rend compte aujourd’hui que la capacité est un peu légère, mais on constate aussi que la moitié des gens se contente de regarder ceux qui font l’attraction, et que les observateurs sont aussi contents que ceux qui tentent l’aventure. Dans le futur, nous allons augmenter les effets dans la salle, refaire aussi le pre-show pour lui donner un petit coup de jeune, autour du thème de l’homme « augmenté par le robot ».


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