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François Hollande enterre la France, et la politique, en 20 propositions

Publié le 01 octobre 2010 par Edgar @edgarpoe

La politique c'est l'art de gérer les affaires humaines au sein d'une collectivité. Dans une collectivité souveraine, il y a peu de domaines que l'on s'interdit d'aborder. S'il est louable que des notions comme la déclaration des droits de l'Homme ou la Constitution s'imposent au législateur, cela laisse, dans la plupart des cas, de nombreux champs de décision.

Dans la France d'autrefois, avant le grand choc européen, le président de la République pouvait battre monnaie - faire financer les déficits publics en émettant de la monnaie, lever des taxes sur les produits importés, faire varier son taux de change ou décider d'une paité fixe. Toutes décisions réversibles en fonction des nécessités du moment et des opportunités.

Aujourd'hui, le président de la République peut expulser quelques camps de roms sous les yeux des caméras, mais guère plus. L'essentiel de sa politique lui est dicté par Bruxelles, qui applique des textes gravés dans le marbre d'un système dément.

François Hollande, qui se prépare pour être président de la République - peut-être n'en a-t-il pas la capacité, en tout cas il en a l'ambition - vient de publier ses 20 propositions pour la France.

On y lit nettement la soumission du personnage à cette vaste fumisterie européenne, tant il se glisse dans la peau d'un président potiche :

Première proposition : "Création du contrat de génération incitant les entreprises à embaucher des jeunes et à les faire former par des seniors".

C'est fort louable d'instituer une sorte de tutorat, on voit mal cependant en quoi c'est à la hauteur des enjeux du moment. Sans doute faut-il considérer que, prises ensemble, ces 20 propositions vont changer la donne.

Poursuivons donc :

Proposition n°2 : "Créer 400 000 places d’accueil pour la petite enfance". Sans aucune ironie, c'est une excellente idée. J'avais déjà relevé que Dominique Meda, dans son ouvrage sur le modèle social français, souhaitait un service de crèches gratuit pour les enfants de 0 à 3 ans. Hollande est déjà en recul, il ne parle ni de gratuité, ni même de service public. Il a déjà intégré que la Commission européenne s'opposerait, dans l'heure, à un service public et gratuit.

Proposition n°3 :  "Renforcer la sécurité à l’école". On ne peut qu'être impressionné par un engagement aussi hardi. Il s'agit sans doute de pouvoir, plus tard, intégrer l'idée Ségolienne de faire entrer l'armée dans les écoles.

Proposition n°4 : "Améliorer les aides au logement pour les jeunes en augmentant le forfait charges retenu pour le calcul de ces aides". Je suis sûr que pour quelqu'un qui sait de quoi il s'agit, c'est une proposition intéressante et digne d'un Président de la République.

Proposition n°5 : "Mise en place d’un système d’allocations ou de prêts publics permettant aux étudiants de financer leurs études". Là je dis bravo ! On pourrait appeler ça des bourses d'études.

Proposition n°6 : "Attribuer à chaque salarié une « dotation éducation » dont le crédit serait d’autant plus important que la formation initiale a été courte". Ca c'est bien. Cela permettrait de tenir compte de l'injustice qu'il y a à ce que des jeunes bons élèves soient  obligés d'interrompre leurs études faute de financement parental.

Proposition n°7 : "Revenir sur la loi Hadopi et redonner la liberté aux internautes, tout en préservant les droits des auteurs." Comme ça tout le monde est content. Yapluka !

Proposition n°8 : "Créer un impôt citoyen en fusionnant l’impôt sur le revenu, la CSG et la prime pour l’emploi et en taxant de la même manière tous les revenus, ceux du capital comme ceux du travail". Bien vu. C'est une façon de ponctionner plus les revenus du capital, qui ont trop grossi depuis longtemps. C'est sans doute la proposition la plus importante de l'ensemble.

Proposition n°9 : "Réformer la fiscalité du patrimoine en faisant de l’ISF un acompte sur les droits de succession". Ca c'est invraisemblable de saloperie. Cela revient à supprimer l'ISF sans le dire, ou à abaisser fortement les droits de succession, au choix. En aucun cas cela ne peut passer pour une mesure de gauche, c'est juste une façon sans doute, pour notre expert comptable, de faire passer la pilule de la proposition précédente.

Proposition n°10 : "Chaque niveau de collectivité doit disposer d’un ou plusieurs impôts dont il aura la maîtrise". Waou. Quelle audace ! Il s'agit là sans doute de se rallier les grands féodaux du PS. L'impact direct sur les citoyens est minime.

Proposition n°11 : "Une réforme des retraites nécessaire mais qui soit juste et permette à ceux qui ont suffisamment cotisé pour avoir droit à une retraite à taux plein de partir à 60 ans. Pour les personnes ayant eu une carrière interrompue, calculer la pension sur la base des 100 meilleurs trimestres et non des 25 meilleures années". Palme d'or du "je prends le lecteur pour un imbécile". Il s'agit d'écrire "60 ans" dans la proposition, pour  faire croire qu'on y tient alors qu'on ne s'engage pas sur ça. Mériterait une exclusion du candidat Hollande pour foutage de gueule.

Proposition n°12 : "Préparer de nouveaux états généraux de la santé". Sic.

Proposition n°13 : "Réformer le crédit d’impôt recherche afin que l’effort budgétaire bénéfice aussi à la recherche universitaire". Puissant. Mériterait au mieux de figurer dans un amendement de loi de finance.

Proposition n°14 : "Inciter fiscalement les entreprises à réinvestir leurs bénéfices". Effet incertain, dépendant fortement de la hauteur de l'incitation.

Proposition n°15 : "Réformer le contrôle des banques afin qu’elles ne prennent plus de risques susceptibles de mettre en péril, leur activité de crédit". Toute la planète a le même programme en ce moment. Hollande garde sans doute la solution en réserve pour l'annoncer dans l'entre-deux-tours...

Proposition n°16 : "Instaurer une contribution carbone sur les entreprises". Ca tombe bien, toutes ces entreprises qui investissent trop, il est temps de les refroidir.

Proposition n°17 : "Lancer un plan de transition énergétique de 50 milliards d’euros sur dix ans". Pas mal. Il serait cependant intéressant de savoir vers quoi on se dirige, vers quoi on transite : solaire, éolien, vélo ?

Proposition n°18 : "Retirer nos troupes d’Afghanistan d’ici à 2014". Deuxième foutage de gueule extraordinaire. Je rappelle qu'Obama a promis de retirer ses troupes en 2011...

 Proposition n°19 : "Passer d’une politique d’aide au développement à une politique de développement partagé". C'est dur d'arriver à 20 propositions, du coup on a demandé au stagiaire qui traînait par là de sortir un truc. Personne ne sera fâché par cette proposition et le stagiaire a le sentiment d'écrire l'histoire de France. C'est du win-win.

Proposition n°20 : "Engager des discussions avec l’Allemagne afin de fusionner les forces conventionnelles terrestres de nos deux pays". C'est une proposition symbolique, certes, qui ravira tous les cavaliers français qui ont toujours rêvé de conduire un panzer. Elle montre surtout qu'au fond l'Europe, pour les français, c'est la volonté de ne plus jamais être en guerre contre l'Allemagne. C'est parfaitement normal et sain. Sauf qu'il est dangereux et démagogique de croire que parce qu'on souhaite, il faut. Et qui commandera ces troupes sinon Bruxelles ?

 *

 En conclusion, Hollande s'est glissé dans la peau du parfait Président de la république euro-compatible. Les Etats-Unis réfléchissent à une taxation des produits chinois pour répliquer à la dévaluation du yuan (cf. Paul Krugman). Hollande sait et a intégré que cela regarde Bruxelles et s'interdit d'avancer une idée à ce sujet. Tout est à l'avenant : rien sur l'euro ni sur la BCE, rien sur l'Europe en général. Et des propositions qui mériteraient une interdiction d'exercer un mandat politique tant elles attentent à l'intelligence de l'électeur. Plus une proposition n°9 qui aurait pu figurer dans le programme de Sarko. L'UMP se fera sans doute un plaisir de la reprendre telle quelle en expliquant qu'il s'agit d'une mesure d'ouverture !

On se demande si en réalité, avec ses propositions, Hollande ne tente pas juste de préempter Matignon, voire Bercy, tant c'est indigent et technicien comme approche.

Mais non. En fait il faut juste parvenir à ce degré de renoncement à toute ambition pour faire un bon candidat compatible avec les "avancées" européennes.


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