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Être des citoyens libres, ou des moutons de Panurge ?

Publié le 04 octobre 2010 par Lecriducontribuable

Cet article a été publié initialement sur Ce que je crois, le blog de René Foulon, membre du Réseau LHC.

Rabotage des niches fiscales, politique d’austérité (ou de rigueur, c’est selon), réduction des déficits publics, allègement de la dette, convergence des politiques fiscales entre la France et l’Allemagne, réforme des retraites… Les prélèvements obligatoires font la Une de l’actualité tous azimuts. On pourrait s’en réjouir si on sentait une véritable volonté de « tailler dans le vif » et de s’attaquer à ces problèmes cruciaux pour l’avenir du pays comme pour le quotidien des Français. Cruciaux, surtout, pour la bonne (!?…) marche de l’économie, qui conditionne les deux autres.

MAIS cette volonté, il faudrait une bonne dose d’ivresse pour la voir, et une bonne dose d’optimisme béat pour s’attendre à ce qu’elle se manifeste. Oh, les mots sont au rendez-vous, les prises de position sont nombreuses et les professions de foi fort affirmées, mais rien n’est plus trompeur qu’une promesse ou qu’une intention déclarée, surtout dans la bouche d’un homme politique en campagne. Et, je l’ai déjà dit, la campagne pour l’élection présidentielle de 2012 a commencé … le 6 mai 2007 ! Alors, pensez, 3 ans et demi plus tard, comme elle bat son plein, et comme les prétendants au trône sont prêts à toutes les duperies pour séduire le citoyen-gogo !…

C’est ainsi que, depuis 2002 déjà, le ministre, puis le candidat puis le Président d’abord, ses ministres ensuite, et les hérauts de sa majorité toutes trompettes hurlantes, nous serinent à qui mieux-mieux que « non, juré-craché, il n’y aura pas d’augmentations d’impôts ». C’est ainsi que les mêmes, la main sur le cœur, jurent que la réduction des dépenses publiques permettra la réduction du déficit abyssal du budget.

C’est ainsi que les mêmes encore nous ont fait le coup de « la crise » pour nous vendre un plan de relance « par l’investissement » (où est-il, l’investissement ?) qui devait, s’il contredisait leurs promesses antérieures, nous sauver de la faillite, doper l’économie et relancer l’emploi. Le plan de relance a bien été dépensé, le déficit creusé d’autant, la faillite tout juste (provisoirement) évitée, l’économie est toujours aussi atone, et l’emploi est toujours en panne…

Les raisons de cette gabegie ? Elles sont nombreuses et variées, mais procèdent toutes du même principe, ce principe qui anime la politique de notre beau pays depuis les années 30 sans presque discontinuer, ce principe que la Constitution (même celle de 1958) appelle « République sociale », que les économistes appellent « État-Providence », et que j’ose appeler « trompe-couillon pour électeurs naïfs ».

Quelle est l’essence de ce principe ? Elle est très simple : il s’agit de faire croire au bon peuple que l’État est là pour résoudre tous ses problèmes, pour payer le médecin, les vacances, les vieux jours, l’école des enfants, le salaire quand on est au chômage ou malade, ou accidenté, et en un mot pour se substituer aux responsabilités naturelles de l’être humain libre et indépendant que n’est plus, grâce à lui, le citoyen-électeur-contribuable-captif qu’il est devenu.

Pour y parvenir, cet État-Providence a plusieurs cordes à son arc, des cordes qui s’appellent les impôts, les taxes, les surtaxes, les cotisations faussement sociales (vraiment salariales d’un côté, faussement patronales de l’autre), CSG, CRDS, TVA… Cette liste n’est pas close.

Mais toutes ces cordes sont usées. Leur effet s’est émoussé. Pour tout dire, elles sont insuffisantes. C’est que s’occuper de tout, payer tout, intervenir partout, ça coûte cher, très cher, trop cher pour rester honnête. Et quand on a pris l’habitude de recevoir, on n’accepte pas facilement que le robinet se tarisse. Alors l’État continue de payer. Encore et encore. Sans en avoir les moyens, mais qu’importe ! Il y a l’emprunt ! Les marchés financiers sont là pour combler les trous. Bien sûr, ça coûte, mais ça permet de faire face. Entendez : « de ne pas perdre la face ». Entendez encore : « de ne pas perdre les électeurs ».

Jusqu’au jour où les marchés n’ont plus confiance, où ils menacent de fermer leur propre robinet, ou d’augmenter drastiquement leurs intérêts. Insupportable. Le coût de cette politique idiote devient insupportable. Le déficit devient insupportable. La dette cumulée devient insupportable. Et les mesures à prendre seront insupportables…

Et quelles sont les solutions que ces apprentis-sorciers prônent aujourd’hui ? Des parades non moins insupportables, bâties sur le modèle qui, justement, a conduit à cette faillite.

Il y a d’abord les professions de foi et les incantations, les postures arc-boutées sur des promesses antérieures, du style « pas d’impôts nouveaux », « pas d’augmentation des impôts ». Puis il y a les volte-faces. François Fillon reconnaissait ainsi dimanche sur M6 que le « coup de rabot » sur certaines « niches fiscales », présent dans le budget 2011, équivalait « bien sûr » à une augmentation d’impôts. Tranquillement. Sans état d’âme, alors que la France est déjà championne toutes catégories des prélèvements obligatoires ! Et puis le même François Fillon qui n’hésite plus à dire que la suppression du bouclier fiscal, qui n’est, rappelons-le, que le remboursement d’un trop-perçu (au-delà de 50 % des revenus, rien que ça…), « n’était plus un tabou ». En contrepartie, il annonce à mots couverts la suppression de l’ISF, ce qui, pour le coup, est (enfin) une bonne nouvelle. Mais les deux annonces réunies, le compte n’y est cependant pas…

Autre bonne nouvelle, si on était assez naïf pour y croire, serait cette annonce, là encore à demi-mots, d’une remise à plat de la fiscalité française. On aimerait tant le croire ! Mais on a cessé depuis longtemps de croire au Père Noël, qu’il habite l’Elysée ou Matignon, que ses lutins soient à Bercy ou rue de Grenelle…

Comme on le voit, les solutions « inventées » par nos grosses têtes au pouvoir ne surprennent plus personne, tant ce sont les mêmes grosses ficelles qu’ils tirent depuis des décennies, quelle que soit la tendance du « patron » de cette République à la dérive. Toujours les mêmes erreurs parce que toujours la même philosophie : un État-maman qui se veut protecteur et qui ne protège rien ni personne, mais qui dépense à tort et à travers, ne serait-ce que pour tenter de faire croire qu’il agit au bénéfice des Français, qui ne voit même pas que ceux-là même qu’il est censé aider (les « plus démunis », ou les « moins nantis », comme on voudra) sont les premières victimes de ses erreurs, qui n’est pas capable de réduire d’un iota les dépenses somptuaires de son administration, qui, pour tenter de le faire néanmoins, se borne à écumer le dixième du trop-plein de ses effectifs, et pas les plus inutiles d’entre eux, qui du fait de cette incompétence à gérer, est acculé à la nécessité d’augmenter encore la ponction déjà notoirement abusive qu’il opère sur les revenus des « plus pauvres des riches », ou des « plus riches des pauvres », comme on voudra là-encore, qui patauge dans la fange des promesses non tenues, des erreurs de gestion et des magouilles, et qui pourtant n’a de cesse de promettre toujours et toujours plus.

Quand se rendra-t-on compte, dans ce pays comme d’ailleurs dans quelques autres, que plus la puissance publique se mêle de ce qui ne la regarde pas, plus elle s’acharne à tout régenter et à tout réguler, et plus les citoyens paient les pots cassés de cette politique qui ne peut qu’échouer ? Quand se rendra-t-on compte, à la fin, que l’État n’est là que pour permettre au citoyen de vivre sa pleine liberté dans la sécurité, que c’est ce citoyen-là qui est naturellement maître de son destin, que c’est à lui de conduire sa vie comme il l’entend, et que ce n’est pas à l’État de le guider, de gré ou de force, sur des chemins qu’il n’a pas choisis, soi-disant « pour son bien » ? Quand comprendra-t-on que l’État ni ses succédanés (départements, régions, EPCI, communes) ne sont pas mieux placés que lui pour décider à sa place, pour lui fournir son pain et son couvert en le faisant payer trop cher pour ça, au lieu de le laisser responsable mais libre ?

Il faut tailler « à la serpe » dans les effectifs de la fonction publique (d’état, hospitalière, territoriale…). Il faut, pour ça, tailler « à la serpe » dans ces « aides sociales » qui n’aident personne mais qui ruinent ceux qui font l’effort de ne pas en abuser. Il faut remettre entre les mains des citoyens, c’est à dire du secteur privé, des pans entiers du secteur public qui n’ont rien à y faire. Il faut redonner à l’individu la plénitude de sa condition humaine, et ne plus le réduire à sa condition de fourmi au service d’une collectivité abusive, castratrice et vorace.

La fonction publique ne cesse de croître alors que les marges de manœuvre du citoyen ne cessent de se réduire. Les dépenses d’aide sociale ont été multipliées par 2,5 en 10 ans, la fraude aux mêmes aides sociales gangrène les comptes publics, les fonctionnaires hospitaliers dénoncent la soi-disant « casse » de l’hôpital public, mais réclament surtout et sans cesse des revalorisations salariales, et dans le même temps on nous annoncent sans honte un bond spectaculaire de la fiscalité pour 2013. Après les élections, bien sûr…

Il faut arrêter de prendre le citoyen pour une vache à lait, et encore plus pour un imbécile. Il faut arrêter de penser que l’individu a moins d’importance que la société. Il faut arrêter de sacrifier l’intérêt individuel au bénéfice de l’intérêt, non pas général (cette notion n’a aucun sens), mais de ceux qui gouvernent et ne pensent qu’à se maintenir.

Il faut pour ça que les citoyens se reprennent en main, et comprennent qu’on se fout d’eux et qu’on leur suce le sang en leur faisant croire qu’on les aide.

Mais quand on voit les millions de moutons de panurge qui défilent tous les 15 jours dans les rues, on se dit que ce n’est pas gagné…


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