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Sarkozozo ou l'action décomplexée

Publié le 02 janvier 2008 par Omelette Seizeoeufs

Un consensus se forme dans ce qu'il faudrait peut-être appeler l'espace public et médiatique. Désormais, pour exister réellement, une opinion doit s'imposer simultanément chez un grand nombre de personnes, ce qui a toujours été le cas, et dans les médias, qui ont leurs propres raisons de relayer une idée.

Un consensus se forme autour de l'Arche de Zoé quant à l'amateurisme des "Zozos", amateurisme qui est à la fois l'excuse qui justifie l'expression d'un mépris tout colonial de la justice tchadienne, et l'explication ultime des agissements. Ainsi, le nouveau journal de droite, Le Monde, écrit :

Ces quatre hommes et ces deux femmes n'en ont pas moins péché par irresponsabilité, mépris des Tchadiens aussi, ignorance de ce qu'est l'Afrique assurément. Mais il y a encore plus grave peut-être : ils ont porté un coup à la réputation de l'engagement humanitaire. Ils ont agi avec désinvolture. Ils ont mené leur mission sans même vérifier si les enfants qu'ils entendaient secourir venaient bien de la province soudanaise du Darfour et étaient bien orphelins. Les bonnes intentions font de la mauvaise assistance : l'humanitaire n'a pas besoin d'amateurisme ; il requiert des professionnels.

L'humanitaire demande de la rigueur, des institutions, une démarche structurée pour éviter les manipulations, les instrumentalisations, les politisations. Les Arche de Zoé ont manqué à ces exigences en voulant s'affranchir de tous les garde-fous, voulant aller vite, faire dans l'urgence, agir directement sur le problème. En somme, être "efficaces". Un mélange de bonnes intentions et d'ignorance de la complexité des réalités.

Si ce consensus a pu se faire petit à petit, de semaine en semaine, on peut se demander si la même logique pourrait s'appliquer, un jour, à l'action de notre Président et Très Grand Homme (TGH). Car, lorsque Sarkozy part "secourir" des hôtesses de l'air, lorsqu'il envoie Cécilia (et Claude Guéant) en Libye, lorsqu'il diffuse des messages pleins de larmes et de compassions aux FARC, lorsqu'il débarque parmi les pêcheurs en les tutoyant et en annonçant que s'il ne venait pas, rien ne serait fait, dans tous ces cas Sarkozy valorise ses interventions par sa volonté d'aller vite, agir directement sans s'embarrasser des instances, des démarches ordinaires. Il est le président extraordinaire qui plane au-dessus de tout cela, à qui les réstrictions ne s'appliquent pas.

Cette façon de faire rappelle celle des Zoé : seule l'action compte, les règles sont pour les cons. Sauf qu'il y a inévitablement un contre-coup, et un coût élévé pour tout le monde. Sarkozy dilapide peu à peu la crédibilité diplomatique de la France, à chaque fois pour des gains immédiats qui servent surtout son narcissisme d'Etat.

Comment faire comprendre au plus grand nombre, ou même aux médias, que ce que l'éditorialiste du Monde appelait "La faute de Zoé" est aussi l'un des défauts principaux de l'action présidentielle, que chacune de ses interventions aura un coût à long terme qui sera supporté par la France tout entière? L'action immédiate, "décomplexée" est celle qui passe le mieux à la télé, qui se résume en une histoire simple avec des jolies images. Elle n'est pas celle qui résoud de véritables problèmes. Pourtant, il est difficile de mettre à la mode les contraintes administratives, les protocoles et les précautions.


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