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Qui a dit : «Que Nicolas Sarkozy se “remanie” lui-même» ?

Publié le 12 octobre 2010 par Kamizole

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Chronique annoncée depuis si longtemps d’un présumé mais inutile “électrochoc” cet énième remaniement n’intéresse personne. Pas plus d’effet sur l’opinion publique qu’un “aca d’iau” sur les plumes d’un canard, que désormais les discours de Nicolas Sarkozy : tout le monde s’en fiche éperdument. Ce n’est même plus «cause toujours, tu m’intéresses…». Ce qui prédomine aujourd’hui, non seulement à gauche mais aussi dans une frange non négligeable de la droite classique serait plutôt de l’ordre du «Casse-toi pôv c !»… Juste retour à l’envoyeur.

Les seuls à en faire l’alpha et l’oméga de la politique ? Ceux qui aspirent à être reconduits ou promus et feront assaut de leur bassesse courtisane habituelle. Les “sortants” présumés préparant leurs cartons avec quelque amertume, qu’ils aient déplu au chef ou soient victime du changement de stratégie de Nicolas Sarkozy : à droite toute… «L’ouverture à gauche» - qui n’a consisté de fait qu’en une “droitisation” de quelques seconds couteaux pas vraiment de gauche – aura vécu.

Cela ne date ni du discours frontiste de Grenoble fin juillet, ni même des élections régionales de mars 2010 mais d’un mouvement bien plus général inauguré avec la trash politique de Sarko : «le gros rouge qui tache» destiné à récupérer l’électorat de Jean-Marie et Marine Le Pen. Inauguré avec l’incorporation à l’UMP du Mouvement pour la France de Philippe de Villiers et de «Chasse, pêche, nature et traditions» de Frédéric Naousse il y a un an et poursuivi par le nauséabond débat sur «l’identité nationale» d’Eric Besson, la “seule prise de guerre” de «l’ouverture» à être vraiment passé avec armes et bagages à la droite la plus dure. Suivant à l’évidence sa pente naturelle.

  • Soyons honnêtes. L’ambition et le désir d’obtenir ce “bâton de maréchal” : être ministre ne fait pas plus défaut à la plupart des personnalités politiques de gauche. C’est tout simplement humain. Je ne pense pas que l’ambition soit condamnable en soi à condition qu’elle ne fût point excessive.
  • J’entends par cela qu’elle ne doit pas outrepasser leurs compé-tences… On en revient toujours au fameux «Principe de Peter» et son «seuil d’incompétence» : des individus réussissant à un certain niveau hiérarchique en raison de leurs qualités qui peuvent se révéler des défauts dans un poste supérieur. Rares sont ceux qui, connaissant parfaitement leurs limites, n’aspirent pas à une promotion. «Pour vivre heureux, vivons caché» dit à bon droit la sagesse populaire. A quoi bon s’exposer aux feux de la rampe pour s’y ridiculiser ?

    Autre funeste effet d’une ambition excessive : être prêt à tout pour parvenir à grimper. Cela existe partout, de la politique au monde du travail en passant par les activités associatives. Les exemples foisonnent de personnes n’hésitant pas à marcher sur la tête de ceux qui peuvent leur servir de marche dans cette ascension. Ni à renier leurs convictions et principes pour complaire à ceux qui ont leur carrière entre les mains. Sans doute n’étaient-ils pas très fermes ni bien assurés. Je me souviens d’une savoureuse chronique de Bertrand Poirot-Delpech dans Le Monde, parlant du «crissement de la doublure des vestes retournées»… Heureuse formule !

    Je ne vous ferais pas languir d’avantage. L’auteur de «Que Nicolas Sarkozy se remanie lui-même» est Laurent Fabius (20 minutes 11 oct. 2010) intervenant hier sur Europe 1. Ajoutant cette vérité d’évidence : «Un changement de gouvernement, compte tenu de l’importance que Nicolas Sarkozy attache au gouvernement, cela me paraît second».

  • Sur le plan psycho-pathologique, je pense que Nicolas Sarkozy est bien infoutu de se «remanier» de quelque façon que ce soit au sens psychanalytique du terme. Pour faire court : parvenir à ce que le patient découvre les mécanismes qui l’enferment dans des cercles vicieux pour que l’énergie vitale qui en est prisonnière puisse circuler de manière moins perturbatrice.
  • J’ai beau avoir beaucoup d’imagination, il me paraît impossible d’envisager Nicolas Sarkozy acceptant – en toute humilité – de s’allonger sur un divan pour faire ce lent et patient travail d’introspection devant un psychanalyste, qui forcément le dominerait ne serait-ce que par la position pendant les séances (mais il y a aussi des psychothérapies analytiques en face-à-face) et par son savoir… Connaissant par ailleurs son solide mépris pour les intellos, s’il n’abondent pas dans son sens.

    C’est aussi l’évidente preuve que son mal dépasse largement la simple névrose, fût-elle obsessionnelle. En effet, il est communément admis que le névrosé se sait malade et souhaite guérir alors que pour le psychotique (qui ne souffre pas moins d’intolérables angoisses) ce sont les autres qui sont fous. Entre les deux, grand nombre de “border lines” qui échapperont aux strictes distinctions de la nosographie psychiatrique et à la description des manuels.

    Je ne saurais dire si Nicolas Sarkozy pense être le seul à ne pas être dérangé. En revanche, qu’il soit intimement convaincu d’être le seul capable dans tous les domaines ne fait point de doute. Il ne risque donc pas de se «remanier» de quelque façon que ce fût : il a toujours raison et ceux qui ne partagent pas ses convictions, forcément tort.

  • Sur le plan de la politique et de l’exercice du pouvoir, Laurent Fabius a bien raison de souligner que Nicolas Sarkozy – l’omniprésident, véritable «Maître Jacques» de l’action politique : portant toutes les casquettes en même temps - ne tient pas plus compte du gouver-nement que du Parlement, toujours tenus en lisière. La véritable politique est élaborée à l’Elysée et les vrais ministres sont de facto les conseillers du Prince qui dictent leurs “feuilles de route” aux ministres aussi bien qu’aux parlementaires. Qu’elles les conduisent droit dans le mur, est un autre problème.
  • Pour peu qu’il existât des députés et sénateurs qui auraient oublié d’être de parfaits bénis-oui-oui et renâcleraient devant l’ineptie des projets de loi qui leur sont proposés, ils sont “recadrés” par Sarkozy et ses sous-fifres de l’Elysée ou – au mieux – invités à rentrer dans le rang à l’occasion de quelques séances de calinothérapie à l’Elysée.

  • Mais ce constat une fois fait, il faut aller plus loin.
  • Se souvenir d’une part que Nicolas Sarkozy quant il était candidat ou à peine élu président de la république promettait choisir ses ministres en fonction de leurs seules compétences. Promesse qui n’aura pas eu plus de réalité que son projet de “retraite spirituelle” au monastère de la Pierre-qui-Vire (c’est lui qui a viré de destination !) non plus que sa «République irréprochable» et son cortège de passe-droits : En consé-quence nous eûmes droit à un véritable festival de bras cassés et branquignols, le seul critère de recrutement étant l’obéissance absolue au chef.

    Sorte de «perindhe ac cadaver» copié des jésuites à la mode militaire : le petit doigt sur la couture du pantalon et «silence dans les rangs». Ne voir qu’une seule tête, n’entendre qu’une seule voix. Celle du chef. Les sous-of aboyant ses ordres et contre-ordres. Prévenir ses désirs étant le nec plus ultra du parfait ministre docile sinon obséquieusement soumis, la carrière important plus que le bien commun.

  • Ne pas oublier d’autre part que cette soumission obéit à la peur. Ne pas risquer de déplaire au chef qui a la vengeance vissée à l’âme.
  • Gouvernement par la peur, donc. Tendance de tout chef et régime totalitaires. Nous l’avons vu depuis 3 ans et 3 mois de “sarkozysme réel” : des ministres qui n’acceptent de regimber que sous la protection de l’anonymat, se plaignant depuis au moins deux ans de l’influence des conseillers de l’Elysée, de l’autisme de Nicolas Sarkozy et de cette “course à l’échalote” permanente. Je ne connais pas l’origine exacte de cette expression argotique qui daterait vraisemblablement des années 30 et signifie contraindre quelqu’un à courir en le tenant par le col et le fonds du pantalon. C’est dire le degré de liberté !

    Souvenez-vous : au début de son quinquennat, Nicolas Sarkozy n’hésitait pas à déclarer qu’il «noterait» ses ministres et qu’aucun ne devait se croire installé dans ses meubles. Qu’un ministre soit apprécié en fonction de ses compétences et selon les résultats qu’il obtient, rien de nouveau sous le soleil. Ce qui l’est en revanche, c’est la «culture du résultat» tout droit issue du monde de l’entreprise - “barbare” qui plus est avec la mise en compétition de tous contre tous - une des marques de fabrique du sarkozysme : l’Etat n’existe plus - les marxistes devraient être plutôt contents, qui appelaient de leurs vœux le “dépérissement de l’Etat” ! mais il ne semble pas que ce fût le cas aujourd’hui… Il est remplacé par «La Firme»… On peut y voir une petite connotation maffieuse.

    Or, ce «résultat» n’a rien de commun avec la réussite dans le domaine de compétence desdits ministres mais résulte de leur seule soumission. Exit donc ceux qui auront déplu pour avoir témoigné du moindre souci d’indépendance de parole. Quand il est vraiment impossible de les passer purement et simplement à la trappe en raison de leur popularité (Nathalie Kosciusko-Morizet, Rama Yade) et celle-ci étant précisément due à leur compétence - reconnue même à gauche ! - on les change de ministère.

    En 3 ans et 3 mois, Nicolas Sarkozy a déjà pulvérisé tous les records de la Ve République en matière du nombre de remaniements ministériels. Incapable toutefois d’en donner le chiffre exact, je suis allée vérifier sur Wikipedia à l’article Gouvernement Fillon : sans compter le 1er gouvernement Fillon entre l’élection de Nicolas Sarkozy et les élections législatives de juin qui ont suivi, le remaniement annoncé pour novembre sera le 13e ! Bien que n’ayant aucun a priori superstitieux contre le chiffre 13, je ne peux que souhaiter qu’il ne lui portât point chance !

    Vous pouvez comparer avec les mandats des autres présidents de la République pour de plus longues périodes, sous le régime du septennat. Fût-il écourté par la démission (Charles de Gaulle), la mort au cours du mandat (Georges Pompidou) ou la volonté du président d’aligner son second mandat sur le régime du quinquennat nouvellement adopté. Vous trouverez tous ces éléments sur Wikipedia sous l’article consacré à la présidence de Nicolas Sarkozy. Un exemple : François Mitterrand avait “épuisé” 10 ministères mais en 14 ans et qui plus est, avec deux périodes de “cohabitation” – entre1986 et 1988 puis de 1993 à 1995. Il est suivi de près par Jacques Chirac :12 ans et 7 ministères dont les 5 ans de cohabitation avec Lionel Jospin.

    Certains feront remarquer que nonobstant le nombre de remaniements il n’y a eu qu’un seul premier ministre : François Fillon. La plaisante affaire ! Comme si nous ne savions pas que celui que Nicolas Sarkozy osa présenter comme un simple «collaborateur» (Ô ! le vilain mot) - en contradiction avec tant le texte que l’esprit de la Constitution de 1958 prévoyant un exécutif «bicéphale» avec deux domaines de compétences distincts – n’était au fond qu’une simple marionnette ayant accepté ce rôle de grand avaleur de couleuvres.

    Hyper-président et omniprésident contre hypo-premier ministre ou les signes cliniques de la maladie infantilo-sénile du sarkozysme. On oscille entre «Y a-t-il un pilote au gouver-nement ?» et «Maman, j’ai rétréci le premier ministre». Le problème étant que celui qui croit avoir pris le manche de l’avion présidentiel n’a jamais passé ses brevets de pilote et qu’au surplus, déjà petit (au sens de la mesquinerie) il s’est «rétréci» lui-même de jour en jour.

    Pour preuve, l’article sans concession de Christian Duplan dans Marianne (n° 701 du 25 septembre au 1er octobre 2010) «A l’étranger, les canards lui volent dans les plumes» dont le sous-titre donne le ton : «Sarkozy ment. Sarkozy dété-riore l’image de la France. «La presse étrangère se montre bien plus violente que les journaux français».

    De l’Italien «Il Manifesto» - qui fait sa Une sur les «Figli di Pétain», montrant Berlusconi et Sarkozy copains comme cochon : je pense qu’en italien, “fils de p…” devant avoir la même connotation injurieuse qu’en français, le choix du calambour n’est nullement anodin ! - à la charge de cavalerie du The Economist, passé du dithyrambe complètement stupide avant l’élection présidentielle de 2007 : «La chance de la France» - avec en couverture, la tête du célèbre «Bonaparte franchissant les Alpes au Grand Saint-Bernard» en gloire dans le tableau de David, remplacée par celle d’un Nicolas Sarkozy forcément conquérant – a succédé le plus total désenchan-tement, forcément assassin…

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    Illustré par le titre – «The incredible shrinking président» - to shrink se traduisant par rétrécir… que vous disais-je ! La photo de couverture est trop drôle… Dégrader en même temps l’image de la France, la fonction présidentielle et lui-même. Champion l’artiste ! Une co-production : Sarko, Fillon et UM/Posture… Pourquoi pas un concours pour donner un titre ? Je suggère : «Maman ! j’ai rétréci l’avion ET le pilote»…

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    Tout le monde peut bien entendu participer – soyez les bienvenus ! - mais pour lancer les festivités, je nomine quelques blogueur(euses) qui feront sans nul doute assaut de fantaisie… Une petite «chaîne» comme je les aime… Allez embêter 10 autres blogueurs !

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