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Le grand manège des retraites

Publié le 12 octobre 2010 par Jlhuss

C’est le jour … Parlons-en ! L’importance du dossier est incontestable, comme sa difficulté. On pourra dauber à l’infini sur la forme adoptée par le gouvernement pour, à la fois, engager le débat et préparer les décisions. A juste titre, il apparaît que mener une telle réforme à marche forcée sur une partie de l’été, en imposant dès le départ des « bornes » non négociables est sans doute lourd de conséquences et d’incompréhensions : « Le Gouvernement ne reviendra pas sur le relèvement des bornes d’âge, parce que cette mesure est essentielle à l’équilibre du système. »
Les échéanciers politiques ont leur responsabilité dans cette manière de procéder et tout spécialement le quinquennat, mais les occupants des septennats précédents n’ont pas été très prolixes sur le sujet. Pour rester sur la forme, qui pouvait penser que Nicolas Sarkozy, amateur de “rupture”, procéderait autrement et se coulerait dans le moule des grands prédécesseurs immobiles ? Certains observateurs , pourtant en général avertis, vont même jusqu’à imaginer à l’occasion de la grève reconductible décidée par les syndicats, une attitude de provocation du Président à leur égard “je suis resté droit dans mes bottes là ou d’autres ont cédé” (allusion non déguisée à Juppé et aux grèves de 1995 …)

Au passage, l’Immobilisme des grands ancêtres était eut-être justifié ? C’est aussi une partie d’un débat opposant, en fait, le court terme au long terme.

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Sur le fond, la réflexion devient de plus en plus compliquée au fur et à mesure que s’étalent dans la presse et sur les écrans de télévision les chiffres, les régimes spéciaux, les taux pleins et autres mères de trois enfants associées à la pénibilité et aux carrières fractionnées. Ajoutons le chômage des plus de 55 ans et la difficulté pour les jeunes d’entrer en phase d’activité pour emberlificoter les discours. Comme toujours dans les débats fortement connotés politiquement, la synthèse et la simplification cèdent le pas à l’anecdotique et aux effets de chiffres pas toujours honnêtes. C’est dommage de transformer ainsi un débat de cette importance en une espèce de guerre de religion.
Il pourrait apparaître légitime pourtant de raisonner sur une donnée très simple et fondamentale, celle de la durée de quotisation. Mais c’est sans doute trop fondamentale et trop simple !

Certains pensent que la raideur gouvernementale repose sur une recherche immédiate à visée extranationale, celle du désendettement. Il est vrai qu’actuellement une partie du paiement des retraites est financé par l’emprunt. Ils décrivent donc les réformes proposées comme ne répondant pas véritablement à des nécessités inhérentes aux problèmes démographiques et à l’allongement de la vie, propos et arguments rabâchés par les chantres de la réforme. Ils énoncent qu’en réalité le projet a pour finalité de réduire la part de la richesse nationale consacrée au financement public des pensions et à réduire la dette publique.
« L’office statistique de la commission européenne, Eurostat vient à point d’actualiser ses projections. Celles-ci indiquent la part de son PIB que chaque pays de l’Union consacre et devra consacrer au financement des pensions d’ici à 2060, pour faire face au surcoût dû au choc démographique. La France y apparaît en position très favorable. C’est un des pays où le papy-boom sera le moins onéreux. Le surcoût n’y dépassera pas un dixième de point de PIB d’ici à 2025 ; et il atteindra un point à son apogée, en 2035, avant de diminuer progressivement jusqu’en 2060. »

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Le gouvernement, plus qu’une réforme pour après-demain, poursuivrait beaucoup plus un bénéfice à court terme en réduisant le déficit public par compression de la dépense. La crise ne serait pas étrangère à cette précipitation, le déficit s’étant creusé par contraction des recettes.
Du côté des promoteurs de la réforme l’insistance se fait assourdissante sur la nécessité de sauvegarder la répartition choisie à la Libération dans un monde qui bouge avec une durée de vie qui s’allonge. Ils insistent sur des avancées sociales, telle que la prise en compte pour la première fois de la pénibilité : c’est un droit nouveau pour les travailleurs dont l’état de santé s’est dégradé à la suite d’expositions professionnelles à des facteurs de pénibilité ; ces salariés pourront continuer de prendre leur retraite à 60 ans à taux plein : on notera ici l’avancée réalisée par un sur place.
Ces promoteurs ajoutent par la voix du Ministre en charge : « D’abord, si vous posez la question aux Français : « Voulez-vous, oui ou non, sauver le régime par répartition ? » la réponse est « oui ». Tout le monde semble d’accord là-dessus, et au fond il n’y aurait donc pas de débat idéologique sur les retraites. S’il devait y en avoir un ce serait celui entre capitalisation et répartition. Il semblerait tranché depuis longtemps, depuis le Conseil National de la Résistance. C’est l’apparence que chacun veut donner.

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La vraie question des Français est souvent beaucoup plus simple et repose sur une préoccupation majeure : cette réforme est-elle juste ? A cette préoccupation, il est bien sûr impossible de répondre véritablement. En fait, quand sont évoquées les retraites chapeaux et les stock-options d’un côté, et la pension de la grand-mère de l’autre, se mélangent deux systèmes : celui de la répartition et celui de la capitalisation.
Faudrait-il alors, pour que “justice” soit effective, interdire toute référence à la capitalisation et toute possibilité d’y avoir recours ? C’est un tout autre débat … Mais il ne serait pas idiot de faire en sorte que la capitalisation puisse participer plus et mieux à la répartition.
Dans ce climat passionnel, au milieu d’un imbroglio entretenu, certains, les plus démagos, souhaiteraient faire trancher le peuple par référendum ; on mesure l’inconséquence d’une telle revendication à l’écoute des débats actuels. Vous pouvez être certains que le grand “manège” des retraites n’a pas fini de tourner.


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