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Et toi, qu’as-tu à donner petit Swabedoodah ?

Publié le 01 octobre 2010 par Koala5

Une jolie petite histoire pour… petits et…grands !

Le petit peuple de Swabedoo

Un jour, alors que le grand lutin vert se tenait une fois de plus au bord de la forêt, un sympathique Swabedoodah vint à sa rencontre. “N’est-ce pas une très belle journée aujourd’hui ?» demanda-t-il avec un grand sourire. «Tiens, prends un fourrure douce et chaude. En voilà une particulièrement belle. Elle t’était très certainement prédestinée sinon cela ferait longtemps que je l’aurais déjà offerte. ”

Mais le lutin ne prit pas la fourrure. Il regarda d’abord tout autour de lui, pour s’assurer, que personne ne l’observait et ne l’écoutait, puis il se pencha vers le petit Swabedoodah et lui murmura à l’oreille: «Hé toi, écoute voir, ne sois pas aussi généreux avec tes fourrures. Ne sais-tu pas qu’un jour tu ne possèderas plus aucune fourrure si tu les offres systématiquement à tous ceux que tu rencontres ? »

Surpris et un peu impuissant, le petit Swabedoodah regarda le grand lutin. Ce dernier lui avait entre-temps pris le sac de l’épaule et l‘avait ouvert. Il sembla vraiment heureux quand il dit: «Je te l’avais dit ! Il ne te reste à peine que 217 fourrures dans ton sac. Donc, si j’étais toi, je serais prudent avec les cadeaux ! ». Sur ces paroles, le lutin s’en alla, laissant le petit Swabedoodah retourner au village. Les paroles du lutin vert l’avaient rendu si confus et malheureux qu’il n’avait, à aucun moment, pensé que ce qu’il lui avait dit pouvait ne pas être vrai. Car en réalité, chaque Swabedoodah possédait un stock inépuisable de fourrures. Il en offrait une qu’aussitôt il en recevait une autre en retour. Et cela se produisait ainsi  encore encore, toute une vie durant. Comment pourrait-il ainsi manquer de fourrures ?

Le lutin aussi savait cela – mais il comptait sur la bonne foi du petit Swabedoodah. Et il se fonda aussi sur autre chose, quelque chose qu’il avait découvert en lui-même et il voulait savoir si cela existait aussi dans le petit Swabedoodahs. Ainsi, il mentit délibérément au petit Swabedoodah puis s’assit à l’entrée de sa grotte, et attendit.

La petit Swabedoodah était assis devant sa maison à Swabedoo, plongé dans ses pensées confuses. Un bon ami passa par là, avec lequel il avait déjà échangé de nombreuses fourrures chaudes et douces. “Quelle belle journée !» s’exclama l’ami qui saisit son sac afin de lui donner une fourrure. Mais celui-ci déclina l’offrande. « Non, non! Garde-la ! » s’écria-t-il «qui sait sinon à quelle vitesse ton stock va diminuer. Un jour, tu seras là sans plus aucune fourrure ! ».

L’ami ne le comprit pas, haussa simplement les épaules, rangea à nouveau sa fourrure dans son sac et repartit en lui adressant un au-revoir timide. Mais il emporta avec lui des pensées confuses, et l’on pouvait entendre le même soir à trois reprises encore dans le village, comment un Swabedoodah dit à un autre: “Je suis désolé mais je n’ai pas de fourrure douce et chaude pour toi. Je dois veiller à ce que mon stock ne diminue pas. ”

Le lendemain, ce phénomène s’était propagé dans tout le village. Tout le monde a commencé à garder ses fourrures. Il s’en offrait encore l’une ou l’autre, de temps à autre, mais cela ne se faisait qu’après un long et minutieux délai de réflexion et de façon très prudente. Et encore, dans ce cas, on s’échangeait plus particulièrement les fourrures les moins belles et les plus usées. Les petits Swabedoodahs devenaient méfiants. Ils commençaient  à s’observer de manière suspecte et réfléchissaient sur le fait si l’autre valait effectivement une fourrure ou  non. Certains sont allés si loin jusqu’à cacher leur sac de fourrure sous le lit la nuit. Des différends éclatèrent sur le nombre de fourrures détenues par tout un chacun.
Et finalement, les gens commencèrent à échanger les fourrures chaudes et douces contre d’autres biens plutôt que de simplement les offrir. Le maire de Swabedoo lui-même fit une enquête afin de déterminer le nombre de fourrures en circulation, puis annonça que désormais leur nombre était limité et instaura les fourrures comme moyen d’échange. Peu de temps après, les petits gens commencèrent à se disputer sur le nombre de fourrures que valait une nuitée ou un repas chez untel ou untel. Il y eut même dans certains cas des vols de fourrures ! La nuit tombée, on ne se sentait plus en sécurité à l’extérieur alors que jadis les Swabedoodahs se promenaient allègrement et sans crainte dans les parcs ou dans les rues pour se saluer les uns les autres et pour s’offrir de douces et chaudes fourrures.

En amont de la forêt était assis le grand lutin vert, observant tout cela et se frottant les mains.
Le pire de tout cela survint un peu plus tard. La santé des petits gens commença à décliner. Beaucoup se plaignaient de douleurs dans les épaules et le dos, et au fil du temps de plus en plus de Swabedoodahs étaient infestés par une maladie appelée « dos voûté ». Les petites gens marchaient de manière courbée et, dans les cas les plus graves, le visage quasiment contre terre. Les sacs de fourrure traînaient à même le sol. Beaucoup commençaient à croire que  la cause de leur maladie provenait du poids de leur sac et qu’il serait mieux de les laisser dans leur maison et les y enfermer. Il ne fallut pas attendre longtemps pour ne plus rencontrer aucun Swabedoodah avec un sac de fourrure sur le dos.

Le grand lutin vert était très satisfait du résultat de son mensonge. Il avait voulu savoir si le petit peuple agirait et se sentirait comme lui quand il éprouvait, comme ce fut presque toujours le cas, des pensées égoïstes. Ils avaient agi ainsi ! Et le lutin se sentait victorieux.

Il se rendit au village des petites gens. Mais personne ne l’accueillit avec un sourire, personne ne lui offrit une fourrure. Au lieu de cela, il fut regardé de manière suspecte, tout comme les petites gens se regardaient entre eux. Le lutin aimait cela. Pour lui, ce comportement signifiait le “monde réel”!

En Swabedoo, des évènements de plus en plu graves survinrent avec le temps. Peut-être à cause de la maladie du « dos voûté » ou peut-être parce que personne ne leur offrait plus de fourrures chaudes et douces – qui le sait exactement ?- certaines personnes sont mortes à Swabedoo. Désormais, tout bonheur avait disparu au sein du village. La tristesse était très grande.

Quand le grand lutin vert entendit cela, il reçut un choc. « Je ne voulais pas cela », se dit-il « en aucun cas, je ne voulais  cela. Je voulais simplement leur montrer comment est réellement  le monde. Mais je ne leur ai jamais souhaité la mort ». Il se demanda ce qu’il pourrait bien faire maintenant et se rappela quelque chose.

Au fond de sa grotte, le lutin avait une mine avec des rochers froids et coupants. Il avait passé des années à creuser la roche de la montagne et à les stocker dans une fosse. Il aimait ces rochers parce qu’ils étaient si froids et si agréablement coupants lorsqu’ils les touchaient. Mais il aimait aussi ces pierres parce qu’elles lui appartenaient toutes. Et chaque fois qu’il était assis à les contempler, il prenait conscience de posséder une grande richesse et cela lui procurait un paisible sentiment de satisfaction.

Mais maintenant, en voyant la misère des petits Swabedoodahs, il décida de partager sa richesse de pierres avec eux. Il  remplit d’innombrables sacs de froides et coupantes pierres, les chargea sur sa charrette et les transporta à Swabedoo.

Quel bonheur éprouvèrent les petites gens de Swabedoo à la vue des pierres froides et coupantes ! Ils les acceptèrent avec gratitude. Enfin avaient-ils à nouveau  quelque chose qu’ils pourraient offrir. Seulement, à chaque fois qu’ils donnaient à autrui une pierre froide et coupante pour leur signifier qu’ils les appréciaient, il résidait, dans leur main et dans celui qui recevait la pierre, un malaise, un sentiment désagréable, une sensation de froid. Cela ne procurait pas autant de plaisir de donner des pierres froides et coupantes plutôt que des fourrures douces et chaudes. On éprouvait toujours une sensation étrange dans le cœur lorsqu’on recevait une pierre coupante, piquante.
On n’était jamais totalement sûr de ce que pensait le donateur à travers son offrande. Le destinataire du cadeau, quant à lui, était souvent confus et acceptait tant bien que mal le présent.
Aussi, il arriva, de plus en plus souvent, qu’un petit Swabedoodah rampait sous son lit pour y retirer le sac avec les fourrures douces et chaudes, afin d’offrir en retour, lorsqu’il reçut une pierre, une fourrure douce et chaude. Dès lors, une joie énorme illuminait le visage de ce dernier! Certains coururent à leur tour rapidement à la maison, fouillèrent dans leur sac afin d’offrir une fourrure plutôt qu’une pierre coupante en retour. Les  pierres ne furent pas jetées, oh non! Par ailleurs, tous les Swabedoodahs ne se promenaient pas encore avec leur sac de fourrures. En effet, les pensées sombres avaient fermement pris racine dans l’esprit des petites gens. On pouvait ainsi entendre les commentaires suivants:
• Des fourrures douces ? Qu’est-ce qui se cache derrière cela ?
• Comment puis-je savoir si mes fourrures sont vraiment désirées ?
• J’ai donné une douce et chaude fourrure, et qu’ai-je reçu en retour ? Une pierre froide et coupante !

• Cela ne m’arrivera plus.
• On ne sait jamais comment on se situe: aujourd’hui des fourrures, demain des pierres.
Probablement que toutes les petites gens de Swabedoo auraient présentement souhaité retourner à ce qui était encore tout à fait naturel à l’époque de leurs grands-parents. Certains regardaient tristement leurs sacs de pierre qui traînaient dans un coin de leur chambre, rempli de pierres froides et coupantes et si lourds qu’on ne pouvait les transporter. Souvent, il arrivait qu’ils n’avaient même pas une pierre à offrir comme cadeau lorsqu’ils rencontraient un ami. Les petites gens de Swabedoodah souhaitaient de plus en plus, en secret, et sans jamais le dire à haute voix que quelqu’un vienne leur donner des fourrures chaudes et douces. Dans leurs rêves, ils s’imaginaient allant dans la rue avec un visage souriant, heureux, et se donnant mutuellement des fourrures chaudes et douces comme au bon vieux temps.

Malheureusement, lorsqu’ils se réveillaient, il y avait toujours quelque chose qui les retenait de le faire.

Ce quelque chose était justement lorsqu’ils sortaient et voyaient comment le monde « est réellement » !

Voilà la raison pour laquelle le cadeau d’une fourrure chaude et douce n’arrive encore que très rarement, et personne ne le fait en public. On le fait secrètement et sans en parler. Mais cela arrive ! – Ici et là-bas, encore et toujours. Peut-être que toi aussi un jour… ?



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