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«Sarkozy t’es foutu ! Les jeunes sont dans la rue»… Les livres et les cahiers au feu et Ségolène au milieu ?

Publié le 19 octobre 2010 par Kamizole

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Personnellement, je suis ravie de voir les jeunes de plus en plus nombreux dans les manifs. C’est nettement visible dans les cortèges syndicaux depuis celle du 24 juin 2010. C’est tout autant leur avenir que celui de leurs parents ou grands-parents. J’avais déjà signalé ce qu’en disait le président de la JOC à cet égard, à savoir que de nombreux jeunes qui ont très souvent des jobs précaires hésitent à se mettre en grève quand bien même seraient-ils tout aussi opposés à cette réforme des retraites. Peur d’être licenciés, bien évidemment. J’y suis d’autant plus sensible que j’ai milité pendant 7 ans à la JOC à Orléans et ensuite Paris quand je fus élève infirmière.

Or donc, Ségolène Royal a eu l’inconscient toupet d’appeler les jeunes à rejoindre les rangs des manifestants (Flash-info du Figaro, 12 oct. 2010). Ah ! mes amis… Quelle nouvelle volée de bois vert ! en Solognot, on appellerait cela «eun friction à l’huile de coteret ». Quoi qu’elle fasse ou dise, elle se fera toujours «bafûter» (critiquer, dénigrer) par les ténors et autres porte-parole de l’UMP.

Le déchaînement de la meute UMP fait plaisir à voir. Toujours les mêmes chiens de garde, je les imagine fort bien bavant en aboyant à se rompre les jugulaires.

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Ressassant tous les mêmes arguments – les fameux «éléments de langage» fournis clef en main par l’Elysée. D’ailleurs l’heure et le sujet sont si graves que même le «Pöv c…» en chef s’y est mis ! Sarkozy dénonce l’appel à manifester de Royal en direction des jeunes ais-je sur le NouvelObs (13 oct. 2010).

Le brillantissime Eric Besson – digne émule de Darquier de Pellepoix en son ministère de l’Immigration et de l’Identité nationale – n’y manque pas et comme à l’accoutumée nous ressort son argument favori : “Est-ce qu’elle se sent portée par les évènements ou est-ce qu’elle a décidé de forcer le destin dans la compétition interne au PS?”. Que Ségolène Royal et Martine Aubry soient tout à fait sur la même longueur d’ondes en dénonçant l’acharnement du pouvoir à passer en force nonobstant l’hostilité de la population ne l’effleure même pas. Son disque dur est resté bloqué sur la haine inextinguible à l’égard de Ségolène Royal. Attitude qui en dit long sur son psychisme. En cela, il ressemble exactement à son nouveau mentor : Œdipe non réglé.

Il aurait trouvé Ségolène Royal «hallucinante»… J’ai beau savoir qu’il a des dents propres à rayer le parquet des ministères et de l’Elysée, je lui conseillerais néanmoins d’éviter les moquettes : jusqu’à preuve du contraire, cela ne se fume pas ! Faute de temps et autant d’envie, je ne reprendrais pas ses anciens propos contre Ségolène Royal quand elle dénonça le «système Sarkozy corrompu», étant certaine d’y retrouver du parfait copié-collé : «Une Ségolène Royal qu’on n’a pas vue aussi démagogique et aussi irresponsable depuis longtemps» lis-je entre autres dans le NouvelObs.

Le clou : «Qu’un leader politique puisse dire comme ça “je leur demande de descendre dans la rue” tout en ajoutant mais “pacifiquement”, mais qu’est-ce que ça veut dire ?»… La pauvre tache ! notez que je reste extrêmement polie.

Cela me semble au contraire tout à fait responsable si j’en crois mon expérience des manifestations étudiantes et lycéennes auxquelles j’ai participé quand j’étais une étudiante tardive (entre 40 et 45 ans) mais j’espère non attardée. Et ensuite, les fâcheux incidents qui ont eu lieu depuis. J’ai le parfait souvenir d’une manif où plus nous avancions – les étudiants étaient toujours relégués derrière les lycéens - plus l’air était saturé de gaz lacrymo… Vitrines brisées, voitures vandalisées. Cela ne venait nullement des lycéens mais – déjà ! – des trublions de banlieues. Les flic laissant faire !

Affrontements et autres vitrines brisées, vols et déprédations sont devenus le lot courant des manifes-tations d’étudiants et de lycéens. Ce n’est d’ailleurs pas leur fait mais de voyous de banlieue qui viennent perturber les manifestations et s’acharnent physique-ment non seulement contre les forces de l’ordre mais également contre les étudiants eux-mêmes. Il a même été démontré, s’il m’en souvient cela se passa à Nation il y a quelques années, que parmi les provocateurs se trouvaient un certain nombre de policiers en civil !

Les lycéens et étudiants n’ont d’ailleurs pas attendu les appels du PS pour se mobiliser contre cette réforme. L’UMP crie – comme d’habitude – à «l’instrumentali-sation» par la gauche, les gauchistes et les mouvements étudiants ou lycéens mais c’est bien la preuve manifeste qu’ils n’y connaissent rien. Quand ils ne se sentent pas concernés les jeunes ne se mobilisent pas. Les militants de l’UNEF et autres mouvements lycéens auront beau tracter, faire autant de discours qu’ils le veulent à l’entrée des lycées, des facs ou en AG : les salles ou les amphis resteront quasi vides.

Il faut que le terreau soit suffisamment fertile. Il l’est assurément aujourd’hui comme le souligne Martine Aubry : «Le Premier ministre prend vraiment les jeunes pour des enfants… malheureusement, les jeunes ont l’impression d’être une génération sacrifiée. Ils connaissent aujourd’hui la dureté du marché du travail, la précarité. Ils savent calculer, comme tout le monde”.

Nicolas Sarkozy monte sur ses grands chevaux (ses talonnettes ne lui suffisent plus

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). Selon des députés Nouveau Centre reçus à déjeuner mercredi 13 octobre 2010 - ils viennent à la soupe ! – il aurait dénoncé l’appel à manifester contre la réforme des retraites lancé par Ségolène Royal en direction des jeunes «le jugeant pas sérieux de la part d’une ex-candidate à l’Elysée»… «Mme Royal ne peut pas avoir été candidate à l’élection présidentielle et demander sérieusement à des enfants de 16 ans de manifester pour une retraite qui les touchera dans un demi-siècle» - c’est moi qui souligne ! - et plus globalement, il a accusé le PS de faire preuve «d’irresponsabilité» sur cette réforme.

J’ai le souvenir d’un dossier consacré à la biographie de Nicolas Sarkozy dans l’Express (?) avant l’élection prési-dentielle et d’y avoir lu entre autres, qu’en juin 1968 il comptait bien participer à la grande manifestation de la droite sur les Champs-Elysée en catimini contre l’avis de sa mère laquelle ayant subodoré la chose prévint le directeur du lycée où il était scolarisé et qui le consigna dans l’établissement. Quel âge avait-il ? 13 ans puisqu’il est né en 1955 !

Deux poids deux mesures, donc. Quand ce sont les jeunes de droite qui souhaitent manifester, c’est parfait mais si la jeunesse de gauche descend dans la rue, elle est persona non grata. J’ai d’ailleurs bien rigolé en lisant ce bandeau sous les images de BFM : Benjamin Lancar, le chef – contesté – des Jeunes Pop qui déclare «je connais des lycéens qui ne descendent pas dans la rue»… Ben voyons ! Ceux qu’il connaît – dans sa tour d’ivoire au demeurant – sont nés une cuiller d’argent dans la bouche et ne se sentent nullement concernés. La seule chose qui les préoccupe c’est d’obtenir des postes, électifs ou non. Leurs salaires seront à la hauteur de leurs ambitions de même que leurs retraites…

C’est aussi ridicule que l’appel de Raymond Soubie (le conseiller de Nicolas Sarkozy en matière sociale) qui conseille aux jeunes de manifester en faveur de la réforme des retraites qui serait faite «pour eux» ! lis-je sur France Soir (12 oct. 2010). Ils prennent vraiment les jeunes et les Français pour des cons ! Dans 50 ans, Nicolas Sarkozy ne sera plus là pour constater les dégâts de cette réforme, laquelle vraisemblablement ne sera pas la dernière car l’usine à gaz qu’ils entendent mettre en place ne tiendra même pas jusqu’en 2020.

Les jeunes qui s’opposent à cette réforme, de même que leurs parents, sont tout à fait conscients que laisser passer cette nouvelle attaque contre les retraites ouvre la porte à une chaîne sans fin d’attaques contre les acquis sociaux. Croyez-vous que si l’on m’avait dit quand j’avais entre 15 et 18 ans que non seulement la retraite de mes parents était compromise mais qu’au surplus je ne toucherais vraisemblablement rien aujourd’hui, j’aurais accepté de mettre la tête sur le billot ?

Mai 68 ne s’explique pas – les grèves ouvrières et l’occupation des usines qui se sont étendues comme une traînée de poudre, sur fond de blocage total des chemins de fer – si l’on ne pense pas aux ordonnances de 1967 sur la Sécurité sociale qui portaient – déjà – un sacré coup à la protection sociale. Là aussi, tout est parti de la base, parce que les dirigeants syndicaux de l’époque, les Georges Séguy (CGT), Eugène Descamps (CFDT) et André Bergeron (FO) freinaient des quatre fers. Sans oublier le PC : Waldeck-Rochet et Georges Marchais qui tire à boulets rouges sur les “gauchistes” et notamment Daniel Cohn-Bendit. Quant aux socialistes, ils étaient quasi invisibles si l’on excepte Michel Rocard (alors au PSU).

Pensez-vous que la jeunesse soit aveugle ? Bien au-delà de la seule réforme des retraites, c’est ce pouvoir qui les fait enrager, à l’instar de leurs parents. Ils n’ont aucun avenir et le savent pertinemment. «Génération sacrifiée» et cela ne date pas d’aujourd’hui. Il y a encore quelque temps l’on nous disait que les jeunes, habitués à la débrouille individuelle et aux petits jobs, ne se sentaient pas concernés par la question des retraites. Aujourd’hui, ceux que l’on a longtemps présentés comme une «génération égoïste» sont nombreux à se mobiliser et à se sentir solidaires de leurs aînés.

Les “gloutocrates” qui nous dirigent ressemblent tout à fait à Cronos dévorant ses enfants. Un pays qui sacrifie ainsi sa jeunesse au nom du seul profit de quelques uns ne peut plus être considéré au nombre des pays civilisés. Nous sommes entrés dans une période de barbarie monstrueuse qui se répercute de haut en bas de la pyramide sociale. Et je considère au contraire que ces jeunes témoignent qu’ils appartiennent à la partie du corps social restée saine.

Je ne peux que vous conseiller la roborative lecture de l’article de Nicolas Domenach Quand les petits marquis de la pensée inique s’en prennent à la jeunesse (Marianne 2, 18 oct. 2010) qui égratigne à belles dents les éditorialistes de droite (ceux du Figaro s’en donnent particulièrement à cœur joie !) qui s’acharnent dans un bel ensemble contre «les lycéens n’ont aucune raison valable de contester, si ce n’est sécher les cours».

«Ces élèves mal élevés – qui ignorent tout du texte des réformes, manifestent pour manifester, pour louper les cours (…) Rien que des enfants qui prétendent imposer la dictature des monômes à tous les gouvernements (…) des chahuts d’adolescents»…

Si ce n’est que cela, j’aimerais que l’on m’expliquât l’acharnement du pouvoir à mater cette révolte. Qu’il y ait eu des incidents parfois graves, c’est évident. Mais j’ai bien scruté les images, notamment à Nanterre et il est évident que la plupart de ceux qui en étaient responsables étaient encore une fois des voyous profitant des manifs des lycéens. Le pouvoir laisse dégénérer les manifs pensant discréditer les lycéens et rassurer son électorat ultra-sécuritaire.

Je conclurais en disant que si à 15 ans ce sont des enfants qui ne comprennent rien à rien et feraient mieux – soit de manifester en faveur de la réforme qui serait faite pour leur bien : cette fois ce sont Rama Yade et Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France (de quoi se mêle-t-il, çui-là ?) qui s’y collent – soit de retourner sur les bancs du lycée, je trouve formidablement curieux que Laurent Hénart ait pu soutenir la loi qui autorise depuis janvier 2005 le travail de nuit à partir de 15 ans !

Trop jeunes pour manifester - en sachant pourquoi - mais assez vieux pour taffer la nuit ! Comptez sur mémé Kamizole pour taper comme une sourde sur ce clou. Encore une tête de Turc que je mettrais bien volontiers au carré.


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