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Mouvement social : comment en sortir ?

Publié le 19 octobre 2010 par Hmoreigne

 Le plus difficile n’est pas de commencer un mouvement social mais bien de savoir le terminer. Alors que les syndicats commencent à se diviser sur la suite à donner à six journées de mobilisation qui n’ont pas émaillé la détermination du gouvernement, l’affrontement recherché par Nicolas Sarkozy commence à porter ses fruits. Les blocages tendent à faire basculer en faveur de l’exécutif la masse silencieuse des français qui comprend la grève mais refuse d’être prise en otage.

Nicolas Sarkozy aime à jouer avec le feu. Suffisamment pour qu’on suspecte à son encontre un côté pyromane. L’ancien ministre de l’intérieur aime de toute évidence les situations de crise pour les montées d’adrénaline qu’elles provoquent. De Human bomb aux émeutes de quartiers en passant par la crise caucasienne sans oublier la menace d’effondrement du système bancaire, Nicolas n’est jamais tant Sarkozy que dans ces situations où l’on passe à un cheveu du collapsus, de la rupture, mot si cher à son vocabulaire.

Aujourd’hui nous y sommes. La situation est dangereuse. La radicalisation s’oppose à la radicalisation. L’exécutif se refuse à reconnaître un début de légitimité au mouvement social et, une partie grandissante de celui-ci commence à remettre en cause la légitimité démocratique du pouvoir en place. Un choc des extrêmes dont la démocratie est vouée à être la grande perdante. A la majorité qui affirme par des coups de menton que la rue ne dictera pas sa loi au parlement, celle-ci répond par une menace d’embrasement et de paralysie du pays.

Attention, danger. Nous ne sommes pas dans le folklore traditionnel de mouvements d’humeur de gaulois irascibles. Les racines du mal sont profondes. La France qui proteste exprime une longue accumulation de frustrations et de rancœurs. Le problème n’est plus tant la réforme elle-même avec son cortège d’injustices et de mépris du dialogue social que le contexte dans lequel elle se situe.

Nicolas Sarkozy se voit aujourd’hui présenter la facture pour avoir laissé croire que, contrairement aux aveux d’impuissance de ses prédécesseurs, le pouvoir politique par le biais de l’hyperprésidence pouvait encore avoir prise sur le cours des choses. Pour cacher ses échecs Nicolas Sarkozy n’a eu de cesse que de trouver à chaque fois des boucs émissaires. Mais, à force d’avoir crié au loup, les vrais messages d’alertes ne sont plus entendus.

La réalité c’est que le pays est le dos au mur, le couteau sous la gorge avec une dette publique dont le remboursement des seuls intérêts dépassera 50 milliards en 2012. 50 milliards d’euros si les taux de prêts ne sont pas revus à la hausse. A l’affût, les milieux financiers guettent. Le moindre signe laissant à penser que la France est rétive aux réformes nécessaires pour apurer sa dette se traduira par une dégradation de sa note, une augmentation mécanique du taux de prêt et donc de la dette.

La sortie de crise passe aujourd’hui par une réponse politique et syndicale responsable qui redonne sa place au collectif et au participatif, à l’opposé de la concentration de tous les pouvoirs à l’Elysée et à l’existence d’un parlement simple chambre d’enregistrement.

En opposant une fin de non-recevoir à la demande de Martine Aubry, mais aussi de la CGT et de la CFDT, de suspendre le débat au Sénat sur le projet de réforme, le premier ministre a délivré un message clair, hostile au principe de négociation sociale, qui appelle une réponse dans les urnes et non dans les rues.

Avec responsabilité, certains syndicalistes en ont pris acte. Tel Jean Grosset, dirigeant de l’UNSA, lorsque celui-ci déclare “Nous sommes en démocratie. A un moment donné, le politique prend le pas sur le social. Quand le parlement vote une réforme, même si elle ne nous convient pas, nous ne pouvons faire comme s’il ne se passait rien“.

Peuple “politique”, les Français rejettent le système de caste avec lequel on renoue insidieusement et aspirent à un changement, à une movida de notre société. Les peurs, les déceptions et les frustrations d’aujourd’hui sont porteuses d’un besoin d’espérance qui ne peut se traduire que dans un projet politique alternatif élaboré de façon participative et présenté aux suffrages en 2012.

Restera à savoir quelle attitude adopter d’ici là. Alain Touraine s’inquiète du danger d’une mise entre parenthèse de toute action syndicale dans cette période. Il a assurément raison. La vigilance est de mise.

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