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France qui manifeste et Grande-Bretagne qui pleure

Publié le 21 octobre 2010 par Hmoreigne

 Il y avait Churchill qui n’avait rien d’autre à offrir que du sang, du travail, des larmes et de la sueur. Il y aura désormais Cameron et ses coupes sombres. Le premier ministre britannique relègue au rang de boy scout celle qu’on surnomma en son temps la dame de fer, Margaret Thatcher. Cameron le boucher multiplie les amputations dans les dépenses britanniques à des niveaux rarement atteints pour économiser 130 milliards d’euros sur 5 ans. Hier encore présentée comme un eldorado où le libéralo-pragmatisme était censé avoir fait merveille, la Grande Bretagne est désormais au bord de la faillite.

Entre temps, il est vrai, la crise bancaire a fait son œuvre. Pas de quoi pourtant se réjouir. Ce n’est pas parce que nos voisins vont mal que la France ira mieux. Les deux tiers de nos échanges se font avec la zone euro dont la Grande-Bretagne d’ailleurs n’est pas membre.

La sortie de crise sur le vieux continent ne se fera pas en jouant les pays membres de l’UE les uns contre les autres mais au contraire en misant sur un effet de masse critique par une mise en synergie des différentes économies nationales. La sortie par le haut, c’est la reprise de la construction européenne sur la base du triptyque esquissé par Jacques Delors : la compétition qui stimule, la coopération qui renforce et, la solidarité qui unit.

La solidarité c’est justement ce qui fait le plus défaut dans l’UE. La crise Grecque a pointé la victoire des égoïsmes nationaux sur le principe d’appartenir à une même communauté de destin.

A défaut d’un plan de relance européen, voilà désormais les Etats engagés dans une fuite en avant désordonnée dans la chasse aux déficits publics. Le risque maintes fois pointé est celui d’un remède de cheval … qui tue le cheval, que l’apurement des comptes fasse avorter dans l’œuf la faible reprise économique, ses emplois et ses recettes.

L’originalité anglaise, parfois exquise, est ici inquiétante. La peur de la faillite a conduit la coalition gouvernementale à décréter un plan d’austérité sans précédent. Près de 500000 emplois publics seront supprimés, et des coupes drastiques seront effectuées dans les dépenses sociales dans l’espoir de venir à bout d’un déficit record. Pas de chirurgie réparatrice, le ministre des Finances conservateur George Osborne parle sans détours de “coups de hache” budgétaires.

La disparité des situations selon la rive du Channel selon laquelle on se trouve est hallucinante. L’augmentation à 66 ans de l’âge du départ à la retraite chez nos voisins britanniques interpelle quand les Français manifestent leur hostilité à une réforme injuste mais incontournable présentée il est vrai par un pouvoir difficilement crédible. L’image du petit village d’irréductibles gaulois résistant au reste du monde Romain est certes plaisante et flatteuse pour notre ego. Elle est surtout à des années lumières de la réalité économique.

2010 n’est pas 1789 et le reste de la planète n’attend pas de la France qu’elle essaime à travers le monde une nouvelle révolution. Pour une raison bien simple d’ailleurs, c’est que la France et le vieux continent ne sont pas porteurs comme aux au 18éme siècle de valeurs vouées à être universelles ou à défaut, de clés intellectuelles susceptibles de rendre l’époque plus intelligible. A la monarchie, la révolution avait proposé la République. Au capitalisme actuel, aucune alternative ne semble émerger. On peut le regretter mais, on doit surtout s’y résigner et mettre notre énergie dans l’élaboration de dispositifs correctifs portés par une puissance publique qui éclaire et qui protège.

En, 1941, le président Roosevelt évoquait dans un discours les 4 libertés dont celle d’être libre de la peur. C’est l’une des fonctions de l’Etat providence justement d’offrir un filet protecteur censé rassurer face à l’insécurité, le danger et la précarité des situations.

Face aux critiques, David Cameron assure ne pas “couper pour couper”, mais affirme qu’il entend également réformer et refondre l’Etat-providence avec pour objectif de mettre fin à une culture de “la dépendance”. “Si réellement vous ne pouvez pas travailler, nous nous occuperons de vous, mais si vous pouvez travailler et refusez de le faire, nous ne vous laisserons pas vivre aux crochets du travail des autres“, a lancé le Chef des conservateurs qui a multiplié les mesures en cinq mois dont la taxe sur les banques et la réduction du salaire des ministres.

L’originalité de David Cameron réside essentiellement dans la notion d’austérité juste qu’il défend, n’hésitant pas à augmenter simultanément a la fiscalité des hauts revenus et à introduire une progressivité dans la fourniture des prestations sociales qui bouscule les classes moyennes. Pour mieux faire passer les réformes, le gouvernement Cameron doit en outre lancer une consultation publique sur les choix dans les coupes sombres. Un choix il est vrai entre la peste et le choléra mais qui associe les citoyens à un véritable effort de guerre.

Crédit photo : Wikipédia

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