C’était prévisible, l’opinion commence à changer par rapport au début de la période contestataire. L’analyse de ces enquêtes qualitatives est certes complexe, mais on ne retrouve plus les chiffres bloqués à hauteur de 70% de complaisants du début. Toucher au Gasoil et à l’Essence pouvait laisser entrevoir un tel résultat. Il y a d’ailleurs des subtilitées : si 61% comprennentt, chiffre déjà en baisse, seulement 51% soutiennent, changement notable. La compréhension est une chose, le soutien une autre.
En revanche l’idée que la réforme était inévitable reste au zénith avec un corollaire péjoratif : elle aurait dû être plus juste. Mais les Français, «malgré le sentiment de difficulté», comprennent «qu’il va falloir travailler un peu plus longtemps».
Il est donc possible, qu’en matière de stratégie, l’exécutif ait fait le bon choix. Il est bien possible également que les syndicats soient bel et bien tombés dans le « piège » qui leur était tendu. Dans quelques mois, la réforme sera passée et entérinée, restera dans les esprits du plus grand nombre la fermeté de l’exécutif et l’inutilité relative des désordres.
Une autre raison de ce “retournement” naissant : le faux et l’usage de faux de plus en plus aveuglant.
A l’occasion de cet important débat sur les retraites, nous avons eu l’occasion de constater à quel point les chiffres diffusés par les uns et les autres sont sujets à caution. Les uns et les autres font usage de faux … Soit très directement, soit par omission, soit parce qu’ils ne parlent pas de la même chose. « Combien de Français se seraient arrêtés même à des chiffres vrais» peut-on lire dans un forum : triste habitude de les considérer comme débiles. Beaucoup ont compris qu’il ne fallait pas impunément mélanger des choux, des spaghettis et des châtaignes … Entendre ensuite des Ministres se féliciter de « la qualité du débat » ne manque pas de sel. «Ce qui compte, c’est que les Français comprennent l’enjeu», ajoute un autre !
Illustrons avec un exemple et le mot d’ordre de la gauche dite unie sur le sujet : “60 ans et à taux plein”, rien de plus fallacieux et contre-productif. En effet les socialistes ne défendent nullement, à l’inverse du NPA, la retraite à 60 ans et à taux plein. C’est même la ligne de démarcation entre le PS et sa gauche. Là encore les Français ne sont pas dupes. Il suffit de lancer ensuite dans le débat des considérations comme la pénibilité, le handicap, les mères de trois enfants et de « balancer » des chiffres sans aucune prospective sérieuse, les uns pour rassurer, les autres pour affoler et petit à petit l’opinion comprend avec maturité la malhonnêteté du débat.
La question demeure assez simple : les gains de productivité enregistrés par la société marchande et capitaliste doivent-ils servir à gonfler les profits financiers ou à augmenter les salaires (y compris les salaires indirects, comme la retraite ou les allocations chômage)? Cette question fondamentale, ce n’est pas la réforme qui la tranche, ni les propositions alternatives de l’opposition, et ça aussi ils l’ont compris.