Le sens de la famille
Ses journées sont chronométrées. Il fait fit de son infirmité éternelle et fait avec pour soulever le poids des charges quotidiennes. Il se lève à 5h00 du matin avec le chant du coq et se couche à 23h30 juste après le dernier téléjournal de la soirée. C’est imagé tout cela, oublions le gallinacé. Il faut bien un repère pour se réveiller et un autre pour mettre fin à toutes les corvées quotidiennes. Quelle corvée? Entretenir ses parents, sa seule famille est plutôt un devoir. Chaque jour, dans l’ordre il aide ses parents à prendre leur douche, puis prend la sienne. Il les installe confortablement au salon, met à leur disposition tout dont ils ont besoin pendant son absence, s’en va pour faire les courses, revient, prépare le petit déjeuner, lave la vaisselle, va travailler, revient pour préparer le déjeuner, déjeune , fait la vaisselle, repart travailler, revient à la maison, se repose un moment, prépare le dîner, fait la vaisselle, aide ses parents pour leur toilette, regarde le dernier téléjournal du soir et va se coucher. Cela dure maintenant depuis 23 ans avec quelques variantes. Je l’ai rencontré dernièrement et je lui ai posé la question bête et très ordinaire comment ça va?
Il m’a répondu que son handicap physique l’empêche de s’occuper davantage de ses parents et que cet état le rend malheureux dans l’exercice quotidien du sens familial.
(illustration: © Pelz - Fotolia.com)
Texte paru pour le blog collectif du 23 octobre. Pour lire la contribution de John Goetelen, Robert Conrad et Danièle Bianchi, appuyez ici