Raymond DEPARDON, né en 1942, est plus qu'un photographe.
C'est un observateur amoureux, vigilant et critique de nos paysages, surtout péri-urbains, de cette France des profondeurs et de ses couleurs parfois cacophoniques, des gens simples....quoiqu'il ne photographie que peu de gens, si ce n'est ceux qui sont complètement incorporés au décor, comme ce garagiste de Poitou Charentes, au bleu de travail si noir....
Cette France que l'on traverse sans voir, avec ses façades colorées, ses maisons fleuries, plantées au milieu de nulle part, des "Sam Suffit" orgueilleux et dérisoires, ses bistrots aux devantures surchargées de messages affriolants, ses côtes à la mer plombée ressemblant à une estampe d'Hiroshige, ses mairies à colombages, ses ronds-points à vous tuer un coureur du Tour...
Cette France où l'on se sent tellement chez nous, malgré le catalogue de mauvais gout qu'elle nous donne à feuilleter.
L'exposition est le fruit d'une drastique sélection : 36 vues, mais en très grand format et en couleurs.
Une sorte de quintessence. Après, on vous explique les influences : photographes américains pendant la crise de 29, Etienne Atget, les précédents chantiers photographiques de l'artiste comme la Mission Photographique de la DATAR, où l'on voyait beaucoup de personnages, la technique : chambre noire, camping-car, vitesse de prise de vue, cahiers de recollement des clichés avec toutes les données et le petit polaroïd de repérage. Passionnant.
On s'imagine pouvoir faire de la photographie comme Depardon, cela semble si facile ? Que nenni, chacune est une oeuvre d'art. Pour certaines, il faut s'approcher de tout près pour constater qu'il ne s'agit pas de peinture.
Un état des lieux actuel et qui donne à penser.
Bibliothèque Nationale de France, site François Mitterrand, Quai François Mauriac, 75013 Paris, jusqu'au 9 janvier 2011.