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Jacques Weber et la biodiversité

Publié le 29 octobre 2010 par Rcoutouly

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J'ai une grande admiration pour Jacques Weber. Ce chercheur, travaillant au CIRAD (Centre de Coopération International en Recherche Agronomique pour de Développement), cet intellectuel, économiste et anthropologue, réfléchit aux interactions entre écologie et économie. Il est le seul, à ma connaissance, qui ait compris la nécessité de nouvelles régulations qui permette de construire une nouvelle prospérité sans forcément la lier au "vieux" concept de croissance.

Ecrivant sur cette question depuis fin 2006, je partage cette conviction de la nécessité de nouvelles régulations (Weber parle joliment de "basculement des régulations") dans les champs économiques et politiques. Je suis persuadé comme lui que la fiscalité est un outil crucial pour construire ce basculement.

Bien entendu, nous ne sommes pas d'accord tous les deux sur de nombreux points. Je renvoie le lecteur à nos échanges publiés sur ce site ou sur Terraéco autour des questions suivantes : La fiscalité environnementale doit-elle être mondiale? Doit-elle être élevée? Doit-elle remplacer les taxes sur le travail? Ces débats cruciaux pour l'avenir des nouvelles régulations vont, je l'espère, se développer au fur et à mesure que les communautés scientifiques et, sans doute un jour, politiques s'empareront de ces questions.

Jacques Weber est l'auteur, avec Robert Barbault, d'un ouvrage passionnant dont je recommande la lecture : La vie, quelle entreprise ! Pour une révolution écologique de l'économie, publié aux éditions du Seuil (septembre 2010).

Je voudrais en parler car au delà du sujet commun qui nous intéresse tous les deux, ce livre parle d'abord de biodiversité. Or, cette notion est trop souvent considérée avec bonhomie, sans qu'on la prenne au sérieux. Et je le dis d'autant plus volontiers que jusqu'à la lecture de ce livre, c'est ainsi que je la considérais : "finalement, qu'on perde des tas d'espèces animales, c'est triste, mais finalement beaucoup moins grave que le réchauffement climatique et l'épuisement des ressources en pétrole". Je me trompais. Et, pour comprendre pourquoi, il me faut revenir à ma propre histoire.

Etudiant en BTS forestier au début des années 80,  j'ai "subis" de nombreux cours en sylviculture, pédologie, biologie végétale, botanique forestière, écologie, etc... Et pourtant, la notion de biodiversité ne fut réellement jamais abordée même si le mot a pu apparaître, presque par inadvertance, dans la bouche de mes professeurs. Je me souviens particulièrement d'un ingénieur, travaillant en forêt privée, vantant le travail au bulldozer et à la lame Rome qui permettait de décaper  à la fois toute la végétation et le sol superficiel, avant une plantation. Pour lui, c'était la méthode la plus économique et donc la meilleure. 

Plus tard, travaillant à l'Office Nationale des Forêts, en forêt de Darney dans les Vosges, j'ai participé à la régénération de 2000 hectares détruits par une tornade en 1984. La méthode de la lame Rome avait été pratiqué avec succès (!). Les arbres replantés sur un sol absolument nu mourraient en masse, détruit par la remontée de la nappe phréatique, par la dent du chevreuil et par des graminées qui avaient un boulevard devant elles car la lame Rome avait fait disparaître toute biodiversité. Le coût de l'entretien de ces parcelles gonflait alors, prouvant l'erreur de mon professeur ingénieur : non, le décapage à la lame Rome n'était pas la bonne méthode économique. Depuis heureusement, ces pratiques sylvicoles sont remis en question. Mais que de temps perdu !

Plus tard, lorsque j'étais étudiant en géographie, à la fin des années 80, la notion de biodiversité était, certes, abordée, mais de manière marginale. Pourtant Barbault et Weber démontrent à quel point elle est cruciale si on veut réussir la révolution écologique dont nous avons besoin.


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