Laurent (deuxième partie)

J'ai voulu remettre la main sur ta correspondance, mais des innombrables lettres que j'avais précieusement gardées pendant toutes ces années, je n'ai pu en retrouver que six...
Lorsque je les relis, je ne peux m'empêcher de songer à ce qu'aurait pu être notre histoire si tu n'étais pas allé au front.
As-tu conservé la cassette audio que je t'avais envoyée les premiers jours suivant ton départ ? Possèdes-tu toujours les quelques portraits que tu m'avais à maintes reprises sollicités durant tes multiples expéditions ?
Sans doute m'en as-tu beaucoup voulu. Parce que je n'ai su t'attendre. Parce qu'à ton retour, je n'ai pu te donner ce que tu étais en droit de recevoir. Mais comment avais-je pu continuer à espérer alors que ton engagement envers les forces militaires se prolongeait de mois en mois... ?
Au fil du temps, mes "Mon très cher Laurent..." s'étaient transformés en "Cher Laurent..." et même si j'avais fini par passer à autre chose, je continuais à t'écrire avec autant d'affection.
Finalement, la vie ne nous aura pas laissé le temps de vraiment nous connaître.
Nous nous sommes revus chez toi. Une dernière fois. Une sorte de "retrouvailles d'adieux". Tu ne m'a montré aucun désappointement. Nous avons discuté, un peu comme deux étrangers...
Et avant de te quitter, je n'ai rien trouvé de mieux que de m'excuser et sans vouloir me retourner, j'ai rejoint Pascal, comme pour mettre un terme à une passion qui s'était trop vite consumée...