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Derrière la vitre d’un car de Japonais à Paris

Publié le 02 novembre 2010 par Ledeclic

Les Français ont souvent pour seule image des Japonais ces groupes de touristes qui sillonnent les villes en car sans jamais en descendre. Mais que ce passe-t-il réellement à l’intérieur de ces véhicules ? Reportage de l’autre côté de la vitre.

Derrière la vitre d’un car de Japonais à Paris

Une pluie fine coule sur le visage d’un groupe de touristes japonais qui traversent la place du palais royal à petits pas rapides, ils suivent une guide qui tient une pancarte à bout de bras. Ils s’engouffrent dans un car. Un car de japonais, ça va de soi.

Dix-neuf personnes ont pris place à bord. Quatre ou cinq dames âgées papotent tranquillement. Quelques jeunes couples observent la rue depuis la fenêtre. Deux étudiantes, la vingtaine à peine, ont les yeux écarquillés. Elles gloussent, l’air gêné, lorsqu’un Français les salue. Une fois les ceintures bouclées, la guide, Emiko, demande aux passagers de saluer le jeune chauffeur Pascal.

« Bondjoulou !»

La guide, assise à l’avant, débite dans un microphone des explications historiques saupoudrées d’anecdotes sur la vie des Parisiens. Les regards s’arrêtent sur les piétons qui traversent au rouge, qui fument dans la rue et jettent leurs mégots par terre.

« Les Parisiens peuvent paraître désagréables, mais ils apprécieront que vous disiez bonjour, bonsoir et merci. »

tour Eiffel en plastique

Chacun acquiesce en silence. Il n’y a pas un bruit dans le véhicule, si ce n’est le déclic des appareils photos au détour du Moulin rouge, ultime figure glamour de la culture française. Arrivé en bas du Sacré Cœur, Emiko sonne le quartier libre. Le temps est désormais clair. Quarante minutes seront accordées pour aller visiter la basilique, prendre les photos et redescendre à la station Anvers. Les touristes évitent soigneusement les vendeurs à la sauvette qui les attendent de pied ferme pour écouler leur stock de tours Eiffel en plastique.

Emiko vit à Paris. Trois fois par semaine, elle guide ses compatriotes pendant deux heures trente dans les rues de la capitale. « Je fais toujours le même trajet, on voit les choses qui intéressent spécialement les Japonais ».

La société HIS, déjà évoquée lors de mon périple à Guam, est la plus grande agence de voyage japonaise. Elle propose des formules comprenant généralement hôtel, pension complète et activités « à la carte », comme cette visite en car. Tout semble conçu pour que les voyageurs nippons ne soient pas bousculés et retrouvent leurs repères où qu’ils soient dans le monde.

Visiter le supermarché

Tomohiko a offert ce voyage à son amie Yukari pour ses trente ans. Les deux tokyoïtes au look branché logent dans un hôtel que HIS leur a dégoté à Bagnolet, en Seine saint Denis.

« Nous n’avons pas encore eu le temps de nous faire une première impression sur Paris, nous sommes arrivés hier, explique Tomohiko. Nous avons visité le supermarché, c’était très impressionnant. »

La nourriture est souvent le motif principal d’un voyage pour les Japonais. Ils attachent beaucoup d’importance aux traditions culinaires et photographient autant leur assiette que les monuments.

Le car repart droit vers la Tour Eiffel. En passant par la place de l’Opéra, Emiko ne manque pas de montrer le Uniqlo, magasin de vêtement japonais qui a ouvert il y a moins d’un an. « C’est une chance qu’il ait pu ouvrir à côté d’un bâtiment aussi beau que l’Opéra Garnier. C’est vraiment un plus pour l’image ».

Arrivé sur le parvis des Droits de l’homme, Emiko déclare solennellement qu’il est « l’heure de la photo de la tour Eiffel ». Dix minutes montre en main pour former un V avec ses doigts de sourire dos à la tour. « Cheeezu ! » C’est dans la boîte.

Le car repart alors en passant rapidement devant Notre Dame et Saint Michel avant de s’arrêter devant le Printemps-Haussmann. Le magasin est apprécié par les Japonais, notamment depuis que son petit frère a ouvert ses portes dans le très chic quartier tokyoïte de Ginza. « Finir par le shopping, c’est tellement japonais », souri l’un des voyageurs.

Emiko guide le groupe vers une porte à l’opposé de l’entrée principale. Surprise à l’intérieur : le personnel est nippon et accueille le groupe avec force courbettes. Au comptoir de la boutique Takashimaya, partenaire de HIS, un homme d’une quarantaine d’années, visiblement rôdé à l’exercice, explique où se trouvent les différents produits dont les Japonais raffolent, comme les parfums ou les sacs Louis Vuitton… Le groupe se sépare après une visite groupée des toilettes. Tomohiko et Yukari boudent ce shopping forcé et décident de quitter le magasin.

« Les sacs Vuitton et les grandes marques ne sont plus tellement populaires chez les jeunes. Aujourd’hui ce sont plus les Chinois qui achètent ce genre de chose », explique Yukari avant de tourner les talons.

Le couple ira se promener sans guide dans les rues de Paris. Mais ils se coucheront tôt. Demain, ils partiront au Mont-Saint-Michel, autre lieu de prédilection des touristes japonais.


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