Et si j'ai voulu...

Vous ai-je déjà parlé des enfants que je n'aurai jamais ?
Ils n'ont rien d'exceptionnels. Ils sont comme tous les enfants de tous les parents, sauf qu'ils viennent de très très très loin.
Ils viennent d'au-delà du ciel. Même plus loin ! Ils viennent d'au-delà des nuages. Encore plus loin ! Ils viennent d'au-delà de l'espace. Infiniment plus loin ! Ils viennent de l'Inexploré, là où même les navettes spatiales ne peuvent accéder. Là-bas, il paraît qu'ils sont heureux et que leurs sourires font briller nos étoiles et tourner notre lune...
Mes enfants n'ont pas de noms. Je ne les ai pas nommés parce que ce qui est nommé est réduit. Alors je ne les appelle pas. J'attends qu'ils m'appellent...
Ils n'ont pas d'âge non plus. C'est préférable. L'âge ne sert à rien, sinon à fêter les anniversaires. L'âge n'a pas d'importance. Ce qui compte, c'est d'exister, d'être là. Et Dieu sait s'ils sont bien là, mes enfants...
J'aurais bien aimé que mes garçons soient nés dans des choux et mes filles dans des roses, mais je ne crois pas qu'au pays de l'Inexploré, bien que je n'y sois jamais allé, il pousse des choux et des roses...
Comme tous les parents de tous les pays, je pense très souvent à mes enfants. Ils sont dans mon esprit comme les paroles d'une belle chanson qu'on n'oublie pas. Tous les matins, quand je me réveille, je pense à eux. Toutes les fois où je croise des fleurs, je pense à eux. Quand le ciel pleure, je pense à eux. Quand le vent chante, je pense à eux. Quand je suis seul, je pense à eux...
Je suis né pour penser à mes enfants. Ma peau est imprégnée de leurs odeurs. Mes choix sont guidés par leurs voix. Mon être tout entier se nourrit de leur vitalité. Même s'ils viennent de très très très loin. Même s'ils ne sont pas nés dans des choux ou dans des roses. Même si ce sont des enfants que je n'aurai jamais...
Et si j'ai voulu vous parler d'eux, c'est parce qu'aujourd'hui, mon tout dernier a fait son tout premier pas...
Je suis comblé.