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Un Président très chrétien

Publié le 06 novembre 2010 par Malesherbes

Notre petit-père du peuple-riche est peut-être adultère mais malgré tout dévot. Il avait donc été particulièrement blessé lorsque, suite à son discours de Grenoble et aux actions de son ministre Hortefeux contre les Rroms, l’actuel occupant du trône de Saint-Pierre avait déclaré, depuis sa résidence de Castel Gandolfo, et en français s’il vous plaît : «  Les textes liturgiques de ce jour nous redisent que tous les hommes sont appelés au salut. C'est aussi une invitation à savoir accueillir les légitimes diversités humaines.».

Nicolas Sarkozy a pu depuis obtenir assez rapidement une audience du Pape et est revenu plutôt satisfait de celle-ci, au point de citer en son Conseil des Ministres les déclarations de Benoît XVI : « Les Etats ont le droit de réglementer les flux migratoires et de défendre leurs frontières ». Soit, mais je ne pense pas que quiconque parmi les opposants à la politique menée par le sieur Besson ait mis en doute ce droit. Le pape a poursuivi ainsi : « en garantissant toujours le respect dû à la dignité de chaque personne humaine ». S’il a bien retenu cette seconde proposition, puisqu’il l’a pieusement lue, notre Président ne s’est visiblement pas senti visé par elle. Cependant, pénétrer à l’aube dans un campement illégal, rafler tous ses occupants, séparer femmes et enfants des hommes, les embarquer dans des bus sans leur permettre d’emporter quelques-uns de leur maigres biens, si le chanoine de Latran s’imagine respecter ainsi la dignité de ces malheureux, je le plains sincèrement.

On a reproché à certains, à propos de ces événements, de faire des rapprochements avec des périodes sinistres de notre histoire. Bien sûr, le sort des Rroms en 2010 ne saurait être comparé avec celui des victimes des camps de concentration. Mais s’il existe entre ces deux époques une immense différence de degré, il n’y a par contre aucune différence de nature. Dans un cas comme dans l’autre, c’est oublier que celui qu’on déporte est un autre soi-même.

Puisque le sentiment religieux qui habite notre Président est si fort, lui qui place le curé au-dessus de l’instituteur, il me semble opportun de l’engager à méditer sur les fondements de sa foi. Parmi les Evangiles, ceux de Matthieu, Marc et Luc rapportent tous trois le commandement : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ». Celui-ci peut sembler imprécis : qui donc est mon prochain ? C’est l’Evangile de Luc qui nous apporte la réponse, avec la parabole du bon Samaritain. Alors que plusieurs passants négligent un malheureux dépouillé par des brigands et laissé pour mort au bord du chemin, c’est un Samaritain, un exclu, méprisé comme hérétique par les Juifs, qui lui porte secours. Le message est sans équivoque : le prochain, c’est l’autre, celui qui est différent, d’une autre religion, l’étranger, mais qui demeure un autre soi-même.

Monsieur Sarkozy est dans l’erreur : son prochain, ce n’est pas son frère Lagardère, Madame Bettencourt ou un courtisan du Fouquet’s. Non, son prochain, c’est ce tsigane, accusé de tous les maux, que sa police chasse avec brutalité.

Qu’attend donc ce très Saint-Père, qui sait être très explicite dans sa condamnation du préservatif, pour se débarrasser un peu de ses prudences langagières et rappeler clairement à un fidèle si fervent où se trouve la Justice ?


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