Magazine Politique

Tribune de Laurianne Deniaud dans les Echos: "L'autonomie pour tous les jeunes"

Publié le 10 novembre 2010 par Letombe

 

Censé bénéficier à plus de 160.000 jeunes pour un coût d’au moins 200 millions d’euros, le RSA touchera péniblement quelques centaines de jeunes à travers l’ensemble du territoire national.

Le 1er octobre ont eu lieu les premiers versements du RSA Jeunes, extension aux jeunes actifs de moins de 25 ans du dispositif du même nom. Présentée par MM. Fillon et Daubresse comme une grande mesure sociale à destination de la jeunesse, c’est un exemple de plus de l’inefficacité et de l’hypocrisie avec lesquelles le gouvernement traite les jeunes de France, dont plus de 20 % vivent aujourd’hui sous le seuil de pauvreté.

Inefficace, car le dispositif est tellement restrictif que le gouvernement lui-même évalue le nombre de bénéficiaires d’ici à la fin de l’année à seulement 15.000. En effet, pour prétendre y avoir droit, il faut avoir travaillé à temps plein au moins deux ans au cours des trois dernières années. Un jeune subissant les CDD, l’intérim, le temps partiel se trouve exclu du dispositif. Tout comme un jeune ayant eu la chance d’être pendant deux ans en CDI à temps plein, car, s’il perd son emploi, il bénéficiera des allocations chômage pendant dix-huit mois à un niveau heureusement supérieur au RSA et, au-delà de cette période, il ne peut plus bénéficier du RSA. Seul un jeune chef d’entreprise pendant deux ans et qui fait faillite pourra bénéficier du RSA Jeunes. Ainsi, dans le Pas-de-Calais, où un habitant sur quatre a moins de 25 ans, ce sont à peine 200 personnes qui pourraient être éligibles au dispositif. Dans le Finistère, le Conseil général a reçu 20 demandes, mais un seul jeune répondait aux critères. Ce ciblage montre bien à quel point la droite est déconnectée des « galères » et des aspirations de la jeunesse dans son ensemble. Au final, la mesure phare du gouvernement pour éradiquer la pauvreté dans la jeunesse, présenté en son temps comme devant bénéficier à plus de 160.000 jeunes pour un coût d’au moins 200 millions d’euros, touchera péniblement quelques centaines de jeunes à travers l’ensemble du territoire national.

Hypocrite, car il ne s’agit ni plus ni moins que d’une politique d’affichage. A grands renforts médiatiques, le gouvernement va s’empresser de mettre en scène le lancement du RSA Jeunes, instrumentalisant la misère dans laquelle se trouvent de nombreux jeunes chômeurs, travailleurs et étudiants et fustigeant l’assistanat. Pourtant, ils oublieront de dire que depuis 2002 aucune politique d’ampleur en faveur de l’insertion sociale, professionnelle et pour l’emploi des jeunes n’a été engagée en France. Ils oublieront aussi de dire que l’allocation précarité de M. Daubresse touchera moins de 10.000 jeunes, qui pourront à peine payer leur alimentation et leur chauffage. On ne pourra reconstruire l’avenir de notre pays avec une génération qui ne connaît que précarité et insécurité sociale.

Alors que 150.000 jeunes sortent du système scolaire sans qualification, c’est aujourd’hui 100 % d’une classe d’âge qui doit pouvoir bénéficier d’une formation. Parce que de nombreux jeunes ne peuvent aujourd’hui choisir librement leur vie, parce qu’un jeune sur deux est obligé de travailler pour financer ses études, nous proposons la mise en place d’un parcours d’autonomie pour les jeunes en formation et en insertion professionnelle. Enfin, un revenu d’insertion doit être versé à toute personne ayant été salariée dès lors qu’elle ne touche plus d’allocation chômage, sans discrimination d’âge. A quel âge sommes-nous majeurs en France ? A 18 ans, à 25 ans ? Existe-t-il deux sortes de majorité, l’une politique et l’autre sociale ? A ces questions, nous répondrons que non. Il est en effet insupportable que les droits sociaux les plus basiques soient différents selon que l’on a plus ou moins de 25 ans.

La jeunesse de France ne se satisfera plus longtemps du dédain et de la stigmatisation permanente du pouvoir. Ce que le politique ne lui accorde pas, notre génération le conquerra soit par la rue, soit par les urnes."

Tribune publiée par Laurianne Deniaud dans Les Echos

Merci à MJS Soissons


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Letombe 131283 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines