Intermède

Les mots se feront absents, sur les parvis d'aurore.

Ils prennent une vacance, après quatre années et demi de flots roulants, grondant, déchirant l'azur du petit matin de leur giboyeuse cavalcade.

Les mots vont prendre le balai et faire le ménage, trier, classer, redorer le blason d'un atelier peu à peu transformer en capharnaüm.

Les mots vont revenir, la source ne s'en est pas tarie. Ils germent encore, hors les murs, comme des herbes sauvages.

Simplement, ils ont besoin de reposer yeux et mains, et de changer quelque chose à leur univers, pour se donner écrin à leur taille.

Ils vous préparent de somptueux cadeaux, pour vous faire patienter, bien avant qu'il ne soit l'heure du sapin, de la cheminée, et du traîneau.

Les mots ne font pas de caprices. Ils ne sont pas en berne. Ils voyagent chaque jour, en l'esprit qui les porte, et la résurgence ne tardera pas.

Ils se reposent, marquent une pause, et se déposent dans le bassin de décantation des jours.

Restez vigilants, amis qui passez. Le vocabulaire veille au grain et les pages s'accumulent qui, un jour, font volumes. Prenez en soin: ce sont vieux grimoires qui disent une mémoire. C'est elle, une fois que nous avons tout oublié, qui nous donne encore la force de penser.

Xavier Lainé

Manosque, 12 novembre 2010