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Stéphane Hessel, mon héros

Publié le 14 novembre 2010 par Mister Gdec

Stéphane Hessel, mon hérossource de la photo ici

Je viens de découvrir ce petit bijou d’humanité dont je partage si intensément le contenu, découvert grâce au blog Les Vregens, que je ne connaissais pas du tout… Ce billet, publié avant-hier par Médiapart,  me donne l’occasion de témoigner moi-aussi par ce partage sur mon blog,  de manière beaucoup plus vibrante et circonstanciée que je ne saurais le faire, de toute la reconnaissance et l’admiration que je nourris pour ce grand homme… avant que la grande faucheuse ne le ravisse à nos regards et à notre oreille.

Lettre ouverte à Stéphane Hessel

12 Novembre 2010 Par ApatridemAPATRIDEM, anagramme de MEDIAPART : réfugié (en tchèque: "sans abri").Inscrit(e) depuis Jan. 2010">Apatridem

Monsieur Hessel,

Il y a longtemps que je voulais vous dire mon admiration et ma reconnaissance. Reconnaissance d’homme, admiration de citoyen. Non pas « citoyen français », ce que je ne suis toujours pas après 34 ans d’immigration ; mais « citoyen de France », ce que je suis de par ma vie (qui compte désormais plus d’années en France qu’en Algérie), de par mon quotidien, de par mes écrits, de par mon amour pour la République, de par ma passion de la langue aussi, cette langue que mon subversif compatriote Kateb Yacine considérait à juste titre comme notre « butin de guerre » !… Mon amour pour la République ? Celle de la Déclaration des droits de l’homme dont vous êtes le dernier témoin sans doute, cette République que vous incarnez au sens fort du terme et non pour cette autre République désincarnée, statufiée en la fantasmatique et imperturbable et froide Marianne. Imperturbable, parce que personne avant vous n’est venu lui crier, à ses oreilles de marbre : « Indignez-vous ! »

Votre cri, entre injonction et supplique, nous révèle à quel point nous aussi, citoyens de France comme citoyens d’en France, sommes devenus des hommes et des femmes à la langue de marbre, pétrifiés dans la résignation, le mutisme et la démission. « Indignez-vous ! » N’est-ce pas le même cri qui souleva tant de peuples et les poussa à secouer le joug de l’injustice, de l’arbitraire et de la tyrannie ? Entre injonction et supplique, disais-je. L’injonction : à l’adresse de celles et de ceux qui, par crainte ou par insouciance, continuent de subir, tête basse, avec cette « part de cerveau disponible » qui leur fait lever les yeux juste pour regarder passer le marchand de sable sur leurs petits écrans. La supplique : la vôtre, celle de l’homme de Buchenwald, du pourfendeur de l’autisme d’Israël, de l’irréductible et universel militant qui, aujourd’hui, dans un appel désespéré, exhorte les jeunes générations à « l’insurrection pacifique » pour « faire vivre et transmettre l’héritage de la Résistance et ses idéaux toujours actuels de démocratie économique, sociale et culturelle ».

Monsieur Hessel, je vais m’autoriser une impudique prévision… Je n’ai pas votre âge, quoique d’un âge bien avancé, et je pourrais aussi bien quitter ce monde avant vous. Mais comme les probabilités sont théoriquement en ma faveur, je prends date, pour vous dire ceci : le jour où vous nous fausserez compagnie, ce jour-là, on l’imagine aisément, votre nom, votre œuvre et votre vie envahiront les radios, les télés et les unes de France et d’ailleurs, pour nous dire, à nous orphelins de vous, le poids de Stéphane Hessel dans l’histoire de la République. Mais le peuple de France sera-t-il assez dupe pour croire en la sincérité de ces séides qui font l’opinion, alors que de votre vivant vous auriez, pour la plupart d’entre eux comme pour la plupart des gouvernants, vous auriez été un poids, certes, mais, sauf votre respect, pas n’importe quel poids : une tare. Et comme toute tare, la vôtre dérange, et dérange, en l’occurrence, les pesées marchandes des puissants. Oui, vos indignations comme votre cri (« Indignez-vous ! ») dérangent, et ne dérangent pas seulement les puissants et leurs séides des médias : ils dérangent aussi les « faibles », les démunis, les imbéciles heureux, les électeurs inconséquents, les citoyens invisibles comme le citoyens inaudibles, tous ceux et toutes celles dont vous dénoncez, mine de rien, le silence et la compromission. Monsieur Hessel, vous me dérangez moi aussi, mais je vous admire et vous respecte, et je vous resterai éternellement redevable. Redevable parce que vous me révélez à moi-même, vous mettez le doigt sur deux plaies modernes que je partage avec mes contemporains : la lâcheté et la compromission par le silence et le non-dit. Monsieur Hessel, entendez ma supplique à moi : restez encore un peu, parmi nous, car vous n’avez pas fini de nous déranger, vous n’avez pas fini de réveiller la bête tapie dans l’ombre, et dont vous espérez, dont vous attendez, dont vous réclamez haut et fort le surgissement.

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