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Retour vers le futur

Publié le 15 novembre 2010 par Rhubarbare

L’impact du futur sur le présent fait partie des standards de la SF et du fantastique, et c’est un thème plutôt mal vu par la science et la psychologie mécanistes car peu compatible avec les principes objectifs de causalité (l’effet précède la cause). Pourtant ce sujet intéresse des chercheurs dans différents domaines, au point que certains envisagent par exemple la possibilité d’un futur rétroactif limitant les possibilités de découverte du LHC au CERN, ce sur quoi j’avais fais ce billet l’an dernier.

D’autant que la rétroactivité semble démontrée, faute d’autre théorie, pour une version améliorée de la fameuse expérience des fentes de Young en mécanique quantique. Expérience bien expliquée dans cet article Wikipédia et que je résume ici en ces quelques mots: dans l’expérience d’origine le fait de faire passer un photon au travers de deux fentes génère une figure d’interférences. Figure qui disparaît si on fait en sorte de mesurer dans quelle fente passe le photo – on obtient alors que des “hits” derrière l’une ou l’autre fente, sans interférences. Mais si on modifie encore cette expérience pour effacer, après le passage du photo, toute trace de l’instrument de mesure on retrouve les interférences. Autrement dit, le photo “sait à l’avance” que la mesure sera effacée plus tard, donc il agit comme si la mesure n’était pas effectuée.

Mais voilà que dans un tout autre domaine, la psychologie, un chercheur reconnu de l’Univesité de Cornell, le Dr Daryl Bern, est en pĥase finale de publication d’un article dans le prestigieux Journal of Personality and Social Psychology relatant ses recherches dans le domaine de la rétroaction au niveau psychologique. Le Dr Bern s’est notamment fait un nom avec le concept de self-perception – la perception de sa propre attitude en fonction de son propre comportement, tout comme on perçoit l’attitude d’autrui en fonction de son comportement.

Son idée géniale: utiliser des expériences classiques en psychologies mais montées à l’envers. Ce qui permet de rassurer la communauté scientifique car les expériences n’ont rien de mystérieux, tout en produisant des résultats pour le moins surprenants. Premier exemple: un test classique consiste à faire apprendre à un groupe d’étudiants une liste de mots puis à les leur faire réciter afin de déterminer leur capacité de mise en mémoire. Bern fit la même chose mais ensuite fit sélectionner de manière aléatoire par un ordinateur un sous ensemble de ces mots pour chaque étudiant, qu’ils durent recopier. Il s’avère que les étudiants avaient, lors du test, mieux retenus les mots qu’ils durent subséquemment recopier. Pas par une grande marge, seulement 3% à 4% au-delà de ce que la probabilité voudrait, mais néanmoins signifiante.

Autre exemple, basé sur l’effet subliminal: on sait que le fait de faire passer un message subliminal avant un choix influence le temps de décision à faire ce choix. Dans le test utilisé par le Dr Bern, le fait de flasher le mot “laid” au niveau subliminal (le mot est compris par le cerveau mais n’est pas reconnu consciemment) avant une jolie image augmente le temps nécessaire pour décider si l’image est jolie ou pas, alors que le fait de flasher “beau” va au contraire raccourcir ce temps par rapport au temps de choix moyen sans information subliminale. Causalement correct. Sauf que dans ce cas-ci, le Dr Bern fait passer les messages subliminaux après l’image. Et pourtant il retrouve les traces d’accélération / ralentissement du temps de choix de l’expérience classique.

Voià donc pour deux des nombreuses expériences menées par le Dr Bern et qui semblent aller dans la direction d’une remise en question de la linéarité temporelle, de la stricte causalité à sens unique. Déjà le neuropsychologue Benjamin Libet (petit article ici) avait montré, quoique de manière imparfaite et ses résultats sont à prendre avec des pincettes, un phénomène de “remontée dans le temps” du cerveau: la réponse cérébrale semble précéder le choix conscient. Peut être Einstein ne croyait-il pas si bien dire lorsqu’il qualifiait le temps de simple illusion. 

Billet en accès libre sur rhubarbe.net 

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