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De la démocratie

Publié le 19 novembre 2010 par Toulouseweb
De la démocratieLes pilotes analysent de nouvelles initiatives d’Air France.
Air France veut reprendre des parts de marché –intérieur et européen- ŕ ses concurrents les plus durs, compagnies low-cost et TGV. D’oů le projet de créer quatre Ťbasesť, dans l’acception Ryanair du terme, délocalisation de personnels navigants et d’avions vers les quatre principaux aéroports de province. Il pourrait en résulter des coűts d’exploitation diminués de 15%. Le projet est intéressant, d’autant qu’il apparaît pragmatique et exclut l’idée de créer de toutes pičces une filiale low cost qui n’avouerait pas son nom.
Ce faisant, Air France affiche une capacité d’action, de contre-attaque, on ne peut plus normale. Elle infléchit la maničre de faire en fonction de l’évolution et des ambitions commerciales de ses opposants, ni plus, ni moins. Tout au plus pourrait-on dire que cette volonté de réagir a mis un peu trop longtemps ŕ se concrétiser.
Ce dossier, ŕ suivre attentivement, suscite ce qu’il est convenu d’appeler des commentaires en sens divers du côté des pilotes. Respectant en cela une tradition ancestrale, ils s’autoproclament partie prenante avec droit de veto et, dans une étonnante gesticulation, ils posent d’ores et déjŕ leurs conditions. A savoir, annonce le SNPL, qu’ils négocieront avec la direction, le moment venu, et qu’ils soumettront le résultat des négociations ŕ l’approbation des membres du syndicat par voie de referendum.
Tout cela est trčs sérieux, voire menaçant. Le SNPL Ťs’est adjoint les compétences de consultants extérieurs spécialisés dans le transport aérien et l’analyse financičreť avant d’apprécier en connaissance de cause le projet de bases opérationnelles provinciales. Déjŕ, les grands mots, ŕ tout hasard : Ťle SNPL n’a nullement l’intention de ‘vendre la profession’ en concédant des efforts de productivité contre du ventť. A bon entendu, salut !
De toute évidence, et pour la deuxičme fois en un mois, le SNPL sur-réagit. Sa prise de position est sans commune mesure avec l’initiative envisagée par la compagnie et, pire, elle installe d’entrée un ton conflictuel qui n’est pas précisément sympathique. En revanche, il serait faux d’en conclure qu’une quelconque ligne jaune a été franchie : ce type de comportement est inscrit dans les gęnes du SNPL depuis bien longtemps, depuis des décennies. Depuis l’époque, par exemple, oů Air France avait dű annuler une commande de Boeing 737 parce que ses pilotes refusaient obstinément l’équipage ŕ deux. Ou encore cette grčve ŕ la veille de la coupe du monde de football de 1998, malvenue, profondément impopulaire, source de commentaires indignés qui, jamais, n’atteignirent Roissypôle (oů se trouvent les bureaux du syndicat).
Evitons soigneusement l’humour facile. Ne disons surtout pas qu’aucune autre grande compagnie au monde ne devrait quémander l’accord de ses pilotes pour mettre en place une Ťbaseť, abstenons-nous d’imaginer les éclats de rire qui égaient le sičge d’EasyJet. Droit dans ses bottes, investi d’une mission de droit divin, imperturbable, le SNPL va étudier le dossier Ťsans tabous ni préjugés, en exerçant les responsabilités qui sont les siennes, en toute transparence et dans le respect de ses statuts et de la démocratieť. Oui, le respect de la démocratie.
Fort heureusement, au męme moment, Air France-KLM met un peu de baume au cœur de ses actionnaires. Les résultats du deuxičme trimestre de l’année 2010/2011 font en effet état d’un trčs net redressement financier. A douze mois d’intervalle, le chiffre d’affaires a augmenté de 18,6%, la recette unitaire a nettement progressé et le résultat d’exploitation atteint 576 millions d’euros, ŕ comparer ŕ une perte de 444 millions il y a un an. Les statistiques d’octobre confirment cette tendance favorable, et cela malgré l’impact de grčves qui ont conduit ŕ l’annulation de 1.800 vols.
Air France sort bel et bien de l’orničre. Ses dirigeants, soulagés, vont de ce fait retrouver un peu de temps pour parler avec les pilotes syndicalistes des grands mérites de la démocratie. On leur souhaite bien du plaisir.
Pierre Sparaco - AeroMorning

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