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Les parcs Disney en Asie

Publié le 11 janvier 2008 par Julien Peltier
La légende veut qu’alors qu’il surveillait ses filles en train de s’amuser dans un jardin public, Walt Disney qui s’ennuyait eut l’idée de créer un parc dans lequel les enfants et les parents pourraient s’amuser ensemble. C’est ainsi que Walt Disney, s’appuyant sur la popularité et la richesse de son univers créa en 1955 le premier parc à thème au monde, Disneyland, en Californie à Anaheim. D'autres projets naîtront dans la foulée... et traverseront l'Océan Pacifique.

Et Disney créa le Parc à Thème...
Le parc d'Anaheim, premier du genre, est constitué de quatre « pays » ou « land » de base, c’est à dire des zones où les décors et les attractions se rapportent à un même thème, comme tous les autres qui suivront. Une Main Street sert d’entrée. C’est une large avenue bordée de commerces, de restaurants qui débouche sur le château au cœur du Parc. Il est toujours tiré d’un des contes portés à l’écran par Disney et diffère parfois d’un parc à l’autre. Ces six éléments sont communs à tous les parcs (à quelques variantes près comme nous le verrons plus loin) et constituent ce que Walt Disney a baptisé « Le Royaume Magique ».

Entrée du Parc Disneyland à l’origine (1955)
Disneyland a grandi, de nombreuses attractions ont été progressivement ajoutées et le parc a subi de multiples rénovations, notamment Tommorowland qui requiert une certaine exigence technologique. Un deuxième parc y a été accolé en 2001 (Disney’s California Adventures) et une myriade d’hôtels et de commerces les ceinturent dorénavant. Malgré ces évolutions, ce parc est aujourd’hui considéré comme un parc de première génération car conçu dans les années 50 et d’une taille relativement restreinte : 30 ha pour le parc lui-même et 73 ha pour l’ensemble du complexe.
Face au succès rencontré par ce premier parc, Disney envisage d’en construire un deuxième, sur la côte est des Etats-Unis cette fois-ci, en Floride. Ce projet est d’une envergure bien plus grande qu’en Californie mais sa base est constituée d’une réplique du parc d’Anaheim.
Disneyworld, comme son nom l’indique, a été conçu dès le départ non pas comme un parc de loisirs pour la population locale a l’instar de son prédécesseur mais comme un centre de vacances, une destination à même d’attirer des touristes du monde entier. Le parc ouvre en 1971 mais devient rapidement un « Resort ». En effet, outre le Royaume Magique, le complexe comprend dès son ouverture de nombreux hôtels, des centres commerciaux, des golfs... Au fil des ans, ce sont même d’autres parcs à thème Disney qui sont adjoints au complexe : EPCOT Center en 1982 sur le thème de l’espace et des 5 continents, Disney MGM Studios en 1989 basé sur l’univers du cinéma et de l’animation, Disney Animal Kingdom en 1997 sur le monde des animaux qui auront rapidement une renommée mondiale. Véritable cœur des parcs Disney, c’est ici, à Orlando, que se décident les orientations futures et que les innovations sont introduites : Space Mountain, l’Orbitron ou encore le spectacle du Roi Lion y sont nés.
Tous plus novateurs les uns que les autres. ces parcs achèvent de faire de Disneyworld un lieu qui fait rêver le monde entier.
Dans le même temps, Disney remporte toujours plus de succès dans son domaine de prédilection : l’animation. Ainsi Les 101 Dalmatiens, Robin des Bois ou Le Livre de la Jungle sont des triomphes dans le monde entier et l’univers Disney fait rêver les enfants bien au delà des frontières américaines. La tentation est alors forte d’exporter le concept du parc à thème et de créer un nouveau Royaume Magique hors de ses bases. Contre toute attente Disney jette son dévolu sur le Japon, ce sera Tokyodisneyland.
Un nouveau « black ship » accoste au Japon
Contre toute attente ? Pas vraiment car au Japon, Disney est très populaire. Les Nippons connaissent parfaitement tous les personnages et Mickey, Donald ou Winnie sont quasiment des idoles. Coté notoriété au moins, il ne devrait pas y avoir de problème même si les films Disney ont régulièrement été surclassés au box office par des productions nationales, notamment celle d’un certain Miyazaki.
Le risque est cependant réel pour l’empire Disney ; l’investissement est important et la population locale en plus d’être très exigeante est attachée à sa culture. Pour une partie de l’opinion, opposée à l’implantation du parc, ce projet est un nouveau « black ship » du nom donné aux quatre bateaux emmenés par le commodore Perry entrés en baie de Tokyo en 1853 et demandant à marchander avec le Japon, sortant le pays de son isolationnisme et lançant l’ère de la modernisation. L’expression « black ships » avait resurgi pendant l’occupation après la seconde guerre mondiale et la tutelle américaine du Japon, elle symbolise une américanisation virulente et l’influence étrangère négative sur l’archipel. Certains considèrent donc ce projet comme un nouvel assaut contre la culture japonaise. Enfin, contrairement à Disneyworld, il ne faudra pas espérer pour ce parc la visite de nombreux visiteurs étrangers étant donné sa situation géographique...
Ce sont donc bien les autochtones qu’il faudra séduire, et là deux théories s’opposent :
soit on reproduit à l’identique les méthodes qui ont eu le succès que l’on sait aux USA avec quelques adaptations
soit on crée un parc différent, emprunt de la culture locale avec par conséquent des modifications importantes par rapport à Disneyworld
Disney n’est pas la première entreprise étrangère à s’attaquer au marché japonais, de grandes enseignes américaines comme Mc Donald ou 7/11 s’y sont essayé auparavant et l’expérience a montré qu’il ne fallait pas chercher à modifier ses produits ou services pour séduire les consommateurs locaux mais qu’au contraire, si ceux-ci se rendaient compte que ce qu’on lui propose ici est différent de « là-bas » (aux USA), ils se sentiraient lésé.
La méthode retenue est donc finalement la première, Disney décide d’appliquer les mêmes recettes que pour ses deux parcs américains mais en réalisant les ajustements jugés nécessaires pour le marché nippon.
C’est ainsi que le parc Tokyodisneyland ouvre ses portes en 1983 à une dizaine de kilomètres de la capitale. C’est encore une fois une copie du Disneyland californien où toutes les grandes attractions sont présentes. On peut l’assimiler à une franchise puisque la majeure partie de capitaux viennent d’un consortium japonais qui en assure aussi la gérance.
Les retouches n’ont pas concerné les attractions à sensation ou technologiques car elles produisent des sensations universelles mais les attractions basées sur la narration et l’ambiance. Par exemple, l’attraction « It’s a small World » (vous savez, celle avec les petites poupées de tous les pays et cette musique qui reste dans la tête pendant des jours) n’est plus un panorama de toutes les régions du monde mais davantage une mise en scène choisie de l’histoire du Japon et de son ouverture au monde. Pas rancuniers chez Disney, on y retrouve le Commodore Perry...

Château de Cendrillon (Tokyodisneyland)
Autre exemple, Main Street USA est ici remplacée par un « World Bazaar » bien plus vaste et entièrement couvert (pour la pluie et la neige) où les japonais peuvent assouvir plus qu’ailleurs leur soif de shopping dans des boutiques de tous les pays et se restaurer dans une ambiance plus proche de notre Disney Village national. Cet endroit est par ailleurs devenul’un des lieux les plus romantiques de l’archipel.
Dans la gestion du parc, l’accent a été mis plus qu’ailleurs sur la propreté, l’ordre et les services ; critères auxquels les Japonais sont très attentifs.

Space Moutain futuriste (Tokyodisneyland)
L’année de son ouverture, le parc reçoit plus de 10 millions de visiteurs (autant que Disneyland) et au début des années 2000, avec plus de 15 millions de visiteurs (dont 95% de japonais) il dépasse Disneyworld et devient le parc de loisir le plus visité au monde.
Un japonais sur cinq s’y rend tous les ans ! Un deuxième parc à thème exclusif y a été ajouté : TokyoDisneySea, parc aquatique basé sur le monde de la mer. Ce triomphe a été un moteur qui a fortement augmenté la notoriété de tous les produits et films Disney. Tokyo Disneyland :était un pari osé, c’est devenu un indéniable succès.
L’audace a payé au delà de toutes les espérances et la tentation est alors grande d’essayer de rééditer l’exploit sur de nouveaux marchés, notamment celui du géant chinois. Entre temps cependant, l’expérience européenne a quelque peu refroidi les ardeurs de
M. Eisner, le PDG de Disney.
Eurodisney : la mécanique s’enraille
Après le succès des parcs américains qui font rêver le monde entier et le triomphe de Tokyodisneyland, Disney se sent prêt à s’attaquer au marché européen qui, à la fin des années 80 a le plus fort potentiel économique à court terme. La France est la première destination mondiale et l’Europe attire plus de 2/3 des touristes du globe.
Là encore l’opération est délicate car même si la popularité de Disney est très forte en Europe, la diversité culturelle du continent constitue autant d’attentes différentes.
Le parc Eurodisney ouvre en 1992, il est comparable en taille à celui de Tokyo et ici aussi on a décidé de réutiliser les même méthodes à savoir une copie du Royaume Magique initial de Disneyworld avec des petites retouches pour coller aux spécificités du marché français et européen. L’accent est donc mis sur les stars Disney européennes comme Pinocchio, Cendrillon ou Peter Pan. Certains décors sont également modifiés comme notre Discoveryland dont le style Art Déco/Futuriste inspiré de Jules Verne est unique, les autres Tommorowland sont bien plus orientés sur le high-tech et le design.
Le contexte dans lequel ouvre le parc est difficile. La France est en récession, les tensions sociales sont fortes et pour les opposants au projet, ce parc est un cheval de Troie de la culture américaine.
Dès l’ouverture, rien ne se passe comme prévu : l’affluence est inférieure de 25% aux prévisions et les produits dérivés ne se vendent pas car ils sont trop chers et les hôtels sont loin de faire le plein; l’action perd 70% de sa valeur en 3 ans !
Les dirigeants de Disney décident alors qu’il faut opérer un remaniement en profondeur. Pour redresser la barre et éviter le naufrage, on décide de baisser les prix des produits estampillés Disney, de pratiquer des tarifs promotionnels et des formules d’abonnement pour les entrées et surtout on tente de relancer l’attractivité globale du complexe en lançant la phase suivante, la construction d’un deuxième parc (Walt Disney Studios) et de Disney Village. Eurodisney devient Disneyland Resort Paris.
Le bilan est satisfaisant car depuis le début des années 2000 les comptes ont retrouvé l’équilibre et la fréquentation s’est stabilisée à un niveau correct. L’expérience reste traumatisante pour la maison mère qui a évité la crise de justesse en sacrifiant au passage plusieurs des hauts dirigeants de la firme.
Disney et le casse tête chinois
Malgré ses difficultés en Europe, la Walt Disney Company n’a pas abandonné l’idée d’ouvrir de nouveaux parcs à travers le monde. Justement, une porte commence à s’ouvrir sur un marché, le plus grand du monde, depuis longtemps observé par Disney en Asie : la Chine. Après des décennies d’autarcie et d’opposition au capitalisme occidental, les successeurs de Mao ouvrent chacun progressivement les portes du marché chinois aux multinationales européennes et américaines.
Ici plus qu’ailleurs pourtant, la partie n’est pas gagnée d’avance pour le géant américain. En effet, des distensions historiques existent entre le gouvernement chinois et la firme aux grandes oreilles considérée depuis toujours comme une menace. Une véritable guerre froide dont le paroxysme a été atteint en 1997 et la crise de « Kundun ». Ce film de Martin Scorcèse sur l’exil forcé du Dalaï Lama et l’occupation du Tibet par la Chine était distribué par Buena Vista, branche de la Walt Disney Company.
Entre temps les tensions sont quand même retombées et les autorités chinoises voient plutôt d’un bon oeil l’implantation d’un tel parc en Chine dont les retombées économiques et en termes d’image seraient très positives.
D’autres gros obstacles se dressent pourtant encore sur la route de Disney ; le premier est le manque de notoriété de la firme et de ses oeuvres dans l’Empire du Milieu. Les premiers dessins animés Disney ont été diffusés avant le seconde guerre mondiale puis plus rien jusqu’en … 1995 avec le Roi Lion ! Ainsi, même si depuis les DVD piratés ont largement été diffusés, Peter Pan, Winnie ou Mowgli sont quasiment inconnus dans ce pays. Même Mulan n’a pas rencontré le succès escompté car trop « occidentalisée » au goût des Chinois !
Pour cela Disney a une solution : la communication de masse. Depuis la fin des années 90, Disney a décidé d’apparaître partout à la télévision, dans des spectacles, dans la rue et même dans des centres commerciaux. Tous les moyens de diffusion sont bons pour éduquer le peuple chinois au monde merveilleux de Disney et rattraper le retard pris. Les différents univers Disney doivent devenir familiers et les images de parcs américains doivent faire envie.
Autre souci, toujours le même, répondre aux particularismes chinois sans perdre son identité car c’est une expérience authentique que les visiteurs recherchent.
Finalement le défi est lancé et c’est à Hong Kong que s’implantera le premier parc Disney en Chine. Le premier car, s’ils tentent toujours de s’en défendre, les dirigeants de Disney comptent se servir de cette ouverture comme un test grandeur nature en vue de l’ouverture d’un deuxième parc, sans doute un complexe de bien plus grande ampleur.
Ce « test » ne peut pourtant pas être un échec car cela nuirait durablement à l’image de Disney en Chine compromettant ainsi son développement futur. Financièrement l’investissement est important mais comme au Japon, une grande partie des fonds proviennent d’acteurs locaux. Ici, et c’est assez surprenant, ce sont essentiellement des fonds publics qui ont permis au parc de s’implanter. Cela constitue pour Disney une garantie à la fois comptable et politique.

Plan du parc Disnyland Hong Kong à son ouverture (2006), on peut voir qu’il est relativement réduit
Pour le reste, l’expérience Disney devait à nouveau faire ses preuves et même si ce projet est relativement modeste (le parc est 5 fois plus petit que Disneyland Paris, 20 fois plus petit que le Royaume Magique de Disney world !), tout est réfléchi pour qu’il soit une réussite.
Hong Kong n’a pas été choisie au hasard ; très puissante économiquement parlant, cette ancienne colonie britannique (jusqu’en 1997) est devenue la plate-forme de transit de voyageurs la plus importante du monde et la ville la plus riche d’Asie. Elle se rapproche d’ailleurs sur plusieurs points des grandes métropoles américaines avec des infrastructures de transport très développées.
Sa situation géographique privilégiée était aussi un atout ; la ville se situe dans la province de Guangdong (70 millions habitants) qui est celle qui a connu la plus forte croissance, à proximité de Taïwan et des autres « dragons » où le niveau de vie est plus élevé, et à quelques heures de vol de l’Australie aussi.
Le parc en lui-même est une copie du parc d’Anaheim dans une version « light » et adaptée au marché chinois. La majorité des indications et narrations sont disponibles en anglais, cantonnais et mandarin (mais pas toutes). Mulan et ses décors sont davantage présents que dans les autres parcs notamment au cœur d’un Fantasy Garden au centre du parc.
La disposition des attractions et des éléments de décors a été repensée conformément eux principes du Feng Shui auxquels les Chinois sont très attachés. Plusieurs bâtiments (hors attractions) sont inspirés de l’architecture chinoise (pagodes) et la plupart des restaurants ont au menu de la nourriture asiatique.
Le parc ouvre le 12 septembre 2006, 5.6 millions de visiteurs sont attendus pour cette première année dont 1/3 de Chine « continentale » dans le plus petit de tous les parcs Disney.
Et les débuts sont plutôt… difficiles. Ainsi lors de l’inauguration et lors du nouvel an chinois, des images de personnes refoulées aux portes, d’enfants en pleurs, de touristes en colère et de files d’attente monstrueuses font la une des journaux télévisés. Des critiques émergent rapidement concernant la taille du parc. Les visiteurs étrangers sont déçus et les Chinois se sentent lésés par un parc au rabais. Il est vrai que plusieurs attractions phares manquent à l’appel : Pirates des Caraïbes, la Maison Hantée, It’s a Small World…elles seront ajoutées progressivement.
Après un an d’activité, le bilan est mitigé, la fréquentation est légèrement inférieure aux prévisions (5.2 millions) mais surtout les retours d’opinion sont contrastés. Outre la taille du parc, les critiques fusent aussi sur le manque de traductions et la longueur des files d’attente. Des parcs d’attractions voisins font même plus d’entrées (deux sont plus grands que le parc Disney!) pour un tarif inférieur.
La prochaine étape : Shanghaï ?
Le parc d’Hong Kong devrait malgré tout continuer à se développer à son rythme selon le schéma maintenant classique de chez Disney. L’objectif est d’atteindre 10 millions de visiteurs à terme. Les regards se tournent dorénavant vers Shanghai, c’est là que devrait être implanté d’ici 3 ou 4 ans le « véritable » parc Disney chinois.
Fort des leçons apprises à Hong Kong, le parc devrait couvrir une superficie environ 5 fois plus grande que son voisin. Les études sont déjà avancées et les autorités locales sont prêtes à investir.
Le test d’Hong Kong va-t-il permettre à Disney de conquérir ce marché si difficile ? L’horizon semble maintenant bien plus dégagé car la notoriété de Disney est en train de s’établir durablement. Pour achever son opération séduction, Disney frappé fort en produisant pour la première fois en 2007 un dessin animé en Chine et spécifiquement pour le marché asiatique basé sur une légende traditionnelle chinoise : « La Gourde Magique ».
Disney c'est maqique ! Cette entreprsise qui est devenue un véritable empire a toujours réussi à tirer les leçons de ses (rares) echecs pour bâtir ses futurs succès. Le marché asiatique on le sait est très difficle à pénétrer pour des entreprises occidentales, surtout pour une entreprise qui symbolise tant le culture américaine. Mais grace à une communication réussie, des vlurs universelles, de la patience et une stratégie digne de Sun Tzu, Disney est en passe de conquérir le plus grand marché du monde dans le secteur pourtant très concurrentiel des parcs d’attractions. Après Shangaï, on succure déjà que deux autres parcs pourraient ouvrir , l’un à Séoul et l’autre en Inde. Cette brêche ouverte en Asie pourraient être empruntée par d’autres entreprises, on parle d’un Futuruscope en Chine d’ici 2011 !
Monk
Image spe © www.asiaworld-expo.com

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