Cela fait trop longtemps que je ne vis plus au Liban pour donner l’avis d’un local. Cela dit, avec quelques souvenirs et une pratique occasionnelle, je pense que je ne me plante pas trop, même si, bien sur, je ne vois qu’une toute petite partie de la scène…
Les Libanais restés au Liban ont développé, pour survivre, une propension à vivre au jour le jour, à ne pas faire de projets à trop long terme, et à profiter pleinement du moment présent. Le résultat, c’est que Beyrouth, la capitale, et ses alentours, fourmillent de monde (on met souvent plus de deux heures trente pour parcourir une vingtaine de kilomètres) et de lieux de sortie : cafés, bars, restaurants, boites, salle de spectacle, terrasse et parfois tout ça en même temps… Il y a suffisamment d’offre pour que ça plaise à tout le monde.
Si la cuisine libanaise, avec ses mezzés, mais aussi ses plats plus familiaux et les plats de fêtes, occupe une part importante dans la vie des Libanais (et mériterait, autant que d’autres, d’être distinguée et reconnue en tant que patrimoine de l’humanité), le Libanais aime bien manger, mais n’est pas, en général, très fin gourmet. Il faut dire que pour beaucoup, il s’agit de survivre ou de ne pas trop mal vivre.
On trouve bien sur différents styles de restaurants locaux. Commençons par les restaurants de cuisine libanaise (ou voisine, arménienne…) :
- Les grands (par la taille) restaurants, proposent en général un large choix de mezzés, et selon la spécialité, des plats principaux à base de poissons, de grillades. Très prisés les week ends et les jours de fêtes, ils accueillent souvent de grandes tablées (parfois une vingtaine de convives!). Disons que c’est l’équivalent des brasseries. Un repas peut y durer trois bonnes heures, surtout si ça se termine au narguileh.
- Des adresses de taille plus modeste (style bistrot), généralement familiaux, avec une liste de mezzés plus ramassée, quelques plats du jour, pour une cuisine plus légère, plus saine et moins pesante.
- Des petits cafés, des snacks, sajs ou des « fours » , qui proposent des préparation simples et faciles à manger (en fonction du moment de la journée, man’ouché, lah bi ajin, falafel…).
Le Liban entretient depuis longtemps des relations avec ses voisins géographiques, mais aussi, grâce à sa communauté chrétienne, avec les pays Européens (surtout la France et l’Italie), puis plus tard, avec l’Amérique du Nord. Bien sur, il y a une grande population d’origine Libanaise en Amérique du Sud, dans une moindre mesure en Australie et en Afrique, mais curieusement, ils n’ont pas ramené avec eux de spécialités culinaires très remarquables.
- Les US, avec leurs chaines de fast food (Mc Do, KFC, Burger King, Pizza Hut, Sbarro, Starbucks…) sont arrivés après la guerre, mais leur politique de franchises agressives, leur côté abordable et populaire et le mirage américain leur ont permis de percer. Le burger, la Caesar Salad avec sa sauce hyper calorique, la pizza à pâte épaisse, le tex-mex existaient déjà avant et sont toujours disponibles dans des restaurants où la qualité est quand même meilleure que celle des chaines.
- Côté cuisines européennes, la française et l’italienne ont droit à quelques adresses dédiées, mais la tendance est plutôt aux cartes « fusion », qui proposent des pâtes carbonarra ou arrabiata, à côté d’un chateaubriand béarnaise frites, d’un tartare minute, d’une pizza calzone ou de sushis et compagnie. En plus de cela, on peut aussi trouver, dans un même restaurant, des propositions de plats libanais!
- Oui, les « sushis » , comme en France, rencontrent un beau succès…
Cela part souvent dans tous les sens, mais cette diversité et cette variété correspondent bien au public libanais, volatile et versatile. Très souvent, c’est un public qui sort faire la fête, avant de sortir au restaurant, ce qui veut dire qu’il ne fait pas toujours très attention à ce qu’il y a dans son assiette, que c’est secondaire…
Alors, la gastronomie (ou sans aller jusque là, la cuisine un tant soit peu raffinée) occidentale, c’est forcément un luxe réservé à une petite frange de la société. La classe sociale supérieure (archi aisée, mais attention, je n’ai pas dit dominante), est, comme beaucoup d’ « élites » de ces petits pays autrefois envahis ou administrés par une puissance coloniale européenne, restée très tournée vers l’occident. Certaines adresses, comme le Gros Bonnet (Val de Zouk), n’ont pas tenu pendant la guerre. D’autres, comme le Vieux Quartier (rue Michel Bustros, à quelques centaines de mètres de l’actuel centre Sofil, à Achrafieh), ont traversé les années difficiles avant de succomber à une concurrence effrénée profitant de la reprise, à des promoteurs court-termistes et à une clientèle rajeunie qui préfère les alcools forts et les DJ au vin rouge, à la viande de boeuf et aux charlottes…
Les « bons restaurants » ne sont pas très prisés par la jeunesse et sont plutôt fréquentés par une clientèle un peu plus âgée et plus posée (couples, parents sans leurs enfants, entre amis, le soir).
Rédigé par chrisos