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Une ONG dénonce les méthodes de fabrication inhumaines de l'Ipad en Chine

Publié le 22 novembre 2010 par Arnaudmilitantassociatif

Alertée par une vague de scuicide impressionnante chez un fournisseur chinois d'Ipad, l'organisation SACOM (Students & Scholars Against Corporate Misbehaviour), basée à Hong Kong, a réalisé une enquetes et des entretiens avec le personnel d'une usine de fabrication de l'Ipad. Résultats scandaleux !

A-t-on idée du coût humain que représente la production d'un iPhone ou d'un iPad? Malgré l'image de marque exemplaire dont elle jouit auprès du grand public, la compagnie Apple – tout comme ses concurrents Dell, HP, Nokia ou Sony – serait en grande partie responsable de l'infraction aux droits du travail par ses fournisseurs, à commencer par Foxconn. Cette gigantesque compagnie chinoise, employant plus de 900 000 personnes rien qu'en Chine, 112e fortune mondiale, est le plus grand fournisseur électronique au monde, notamment de toutes les compagnies citées plus haut.
Entre janvier et août derniers, pas moins de dix-sept de ses employés avaient tenté de se suicider, attirant le regard des ONG et des médias sur les conditions de travail déplorables au sein de Foxconn. La compagnie avait alors promis des améliorations.
Infiltrer les usines
L'organisation SACOM (Students & Scholars Against Corporate Misbehaviour), basée à Hong Kong, a entrepris depuis, dans le plus grand secret, quelques cent entretiens avec des employés de Foxconn. L'association a également infiltré des chercheurs parmi les travailleurs afin de déterminer les sources de détresse et d'évaluer si des changements avaient bien eu lieu. Les résultats, publiés le mois dernier dans le rapport «Workers as machines: Military management at Foxconn»1, sont très alarmants. L'oeuvre d'entraide suisse Pain pour le prochain les résume ainsi: «des heures supplémentaires imposées et excessives, des salaires maigres, une organisation militaire et des systèmes punitifs humiliants».
Un travailleur raconte: «Pour produire la première génération de iPad, nous avons dû travailler douze heures par jour pendant six mois. Nous avions un jour de repos tous les treize jours et ne recevions pas de prime salariale pour le week-end.»
Les salaires des employés, inférieurs aux minimums légaux chinois jusqu'aux suicides, ont été augmentés de manière à être tout juste dans le droit. Selon SACOM, ils sont toutefois largement inférieurs au minimum vital.
«Moi aussi, je me serais suicidée»
Les heures supplémentaires, qui avant la vague de suicides atteignaient des proportions monstrueuses, ont été limitées. Néanmoins, la compagnie force aujourd'hui ses employés à signer un «engagement volontaire à des heures de travail supplémentaires» qui les contraint à travailler dix heures par jour, six jours par semaine. Ce qui équivaut à quatre-vingt heures supplémentaires par mois. Foxconn enfreint donc toujours largement le droit national, qui en fixe le maximum à trente-six. De plus, certains témoignages révèlent qu'en raison du nouveau contrôle, les heures dépassant le seuil ne sont aujourd'hui tout simplement plus enregistrées, et donc pas rémunérées.
Aux salaires et horaires s'ajoutent les conditions de travail elles-mêmes. Selon le rapport, elles ont tout de militaire. Chaque matin, avant de commencer le travail, un responsable demande: «comment ça va?» et les travailleurs sont forcés de crier en choeur: «bien! très bien! très, très bien!» Toute la journée, les ouvriers doivent maintenir un rythme de fabrication effréné et la cadence des machines est accélérée constamment, de manière à atteindre la production quotidienne moyenne de 5000 pièces. Un travailleur du site de Longhua confirme: «Je pense que nous sommes même plus rapides que des machines.»
A Foxconn, il est interdit de discuter, de s'étirer ou de prendre une pause. Une jeune ouvrière venant de démissionner de Hangzhou avoue aux chercheurs de Hong Kong: «Si j'avais continué à travailler dans cet environnement déprimant, moi aussi je me serais suicidée.»
Pis, au cas où ils ne respectent pas les règles, n'arrivent pas à suivre le rythme infernal ou à déjouer les pièges que leurs supérieurs introduisent parfois, les travailleurs subissent des punitions humiliantes, voire violentes. Les superviseurs les réprimandent en criant, les forcent à faire des excuses publiques, les frappent même parfois, comme en témoignent les traces de coups retrouvées sur le corps de certains employés suicidés.
Les ouvriers étant dans l'interdiction de se parler, et les unions de travailleurs à la solde de la direction, la révolte peine à venir.
La responsabilité des marques
Si l'on en croit le rapport de SACOM, la tragique histoire de Sun Danyung, ingénieur de 25 ans, pourrait bien se répéter. L'année dernière, il a eu le malheur de perdre l'un des seize iPhone de quatrième génération. Après avoir laissé un message en ligne à des amis confiant que l'enquête menée par l'entreprise avait été l'une des expériences les plus humiliantes de sa vie, il a sauté du douzième étage.
Or, Apple, de même que ses concurrents, a sa part de responsabilité dans ces mauvais traitements, accuse Chantal Peyer, responsable de la campagne «High Tech – No Rights» chez Pain pour le prochain. «Ces firmes dégagent des marges de profit de plus de 40%, mais poussent leurs fournisseurs – dont les marges sont très inférieures, environ 4% – à réduire les coûts», relève-t-elle.
De même, les clients de Foxconn et consorts font pression pour restreindre le temps de livraison. Du coup, les fournisseurs répercutent cette pression sur leurs salariés pour qu'ils travaillent toujours plus longtemps, plus vite et à moindre coût.
Pourtant, du côté d'Apple, on vante volontiers un code de conduite auquel tous ses prestataires doivent souscrire. Celui-ci fixe par exemple la semaine de travail à 60 heures volontaires, contraint au respect du salaire minimum légal ainsi qu'à la rétribution majorée des heures supplémentaires et exclut toute forme de harcèlement ou pression sur le lieu de travail. Apple s'engage à contrôler le respect de ces règles et menace de rompre le contrat, voire d'entamer une action en justice contre un fournisseur qui ne s'y plierait pas.
Du pain sur la planche, donc, si la marque, comme ses concurrentes, souhaite que ses engagements soient pris au sérieux, et non pas pour de belles paroles en l'air. I


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