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Qui veut choper des millions ?

Publié le 02 décembre 2010 par Copeau @Contrepoints

Tu es jeune, tu es festif ? Alors toi aussi, rejoins le groupe de joyeux fêtards dans l’événement majeur de ce mois de décembre organisé par Demaerd Entertainment !

Encore une fois, Demaerd Entertainment va marquer cette fin d’année avec un événement de taille mondiale !

Officiellement parrainé par Eric Cantona, le célèbre footballeur / peintre / acteur / économiste, l’opération a déjà reçu des échos dans la presse nationale et le soutient enthousiaste des plus grandes stars de l’économie, comme Christine Lagarde.

L’idée générale est de lancer une nouvelle mode, une véritable révolution (et pas une de celle qui se fait en 360 degrés comme le dit Christine, ou 380 comme le dit Ségolène) : mardi prochain, le 7 décembre, quelques milliers de personnes qui participent en réalité à l’opération Demaerd, réparties sur tout le territoire, vont aller retirer l’intégralité de leur compte auprès du guichet de leur banque.

Oui, tu as bien lu : l’intégralité !

Par ici, le sac à mamie

Si, toi aussi, tu veux participer à cette nouvelle opération qui mélange les concepts de Télé Réalité, de Happening Interactif et de Flash Mob, il te suffit de te rendre, ce mardi 7 décembre, à la sortie d’une des banques que ces personnes seront allées visiter.

Si tu es muni du matériel Demaerd adéquat, il te suffira ensuite de demander poliment, mais fermement, à la personne en question, la remise en main propre de ton prix et toi aussi, tu seras peut-être gagnant d’une somme allant de 50 euros à … plusieurs millions !

Car en effet, parmi l’une des personnes qui retireront un lot des banques se cache, justement, le parrain de l’opération, Eric Cantona lui-même !

Alors, n’hésite plus : toi aussi, procure-toi vite l’un des outils recommandés Demaerd et participe à l’opération Délestage Massif !

Opération Délestage Massif

Cette aventure proposée par Cantona, nouvelle égérie des révolutionnaires en culotte courte, est intéressante à plus d’un titre.

Tout d’abord, sur le plan médiatique, on pourra noter l’emballement subit et quasi-spontané qui aura accompagné la petite vidéo du footballeur se laissant aller à ses réflexions : quelque part, le mythe de la révolution nécessaire et rapide, populaire et joyeuse, est encore fermement ancré dans les esprits parfois un peu trop chevaleresques de certaines salles de rédaction ; on sent que, pour beaucoup de nos folliculaires, le fantasme humide d’un soulèvement populaire contre les banques, symbole parfait du capitalisme, les remplit de joie. Il n’aura pas fallu les pousser beaucoup pour qu’ils nous pondent quelques papiers sur une petite vidéo et une page Facebook qui compte quelques dizaines de milliers de fans. La France reste, définitivement, ce pays où les journalistes ont presque tous un regard tendre pour le Che et voudraient bien en avoir un à la maison.

D’autre part, sur le plan technique, il apparaît évident que l’opération est pour le moins à la fois mal boutiquée et complètement irréaliste. Mal boutiquée parce que pour réussir un bon bank run des familles, l’aspect surprise est primordial. C’est lorsque tout le monde va, le même jour, sans aucune concertation, retirer ses fonds que les guichets sont débordés et la banque est à cours de liquidités. Mais prévenir une grosse semaine à l’avance qu’on va faire quelque chose, peut-être, c’est … donner le temps aux guichets de se préparer, et éviter ainsi le bank run. Et pourquoi irréaliste ? Pour deux constats simples : les gens pauvres ne retireront que des petites sommes, qui ne mettront pas la banque en difficulté. Et les gens riches ne retireront rien : soit ils ne sont déjà plus en France, soit leurs avoirs ne sont pas aussi liquides, soit, tout simplement, les sommes sont suffisamment importantes pour être impraticables au possible en billet.

Cependant, et c’est mon troisième point, même si l’opération proposée par Cantona est une simple pitrerie qui n’aboutira à rien, le fond de sa réflexion, elle, est très intéressant.

En effet, les banques sont, effectivement, assises sur du vent et le fait pour un grand nombre de déposants de retirer physiquement leurs avoirs obligeraient ces dernières à jouer de moins grandes quantités d’argent sur les marchés, ou à en prêter nettement moins. Outre l’aspect déflationniste important (ou, en tout cas, contre-inflationniste notoire), la prise de conscience que les banques travaillent sur le principe de la réserve fractionnaire et que ce principe n’est pas, en soi, parfaitement sain lorsque la fraction est trop basse, cette prise de conscience est nécessaire, car elle entraîne un retour de la responsabilité : une banque qui n’a pas suffisamment de fonds coule. Ou plutôt, devrait couler. Grâce à l’Etat (i.e. le contribuable), les bêtises peuvent continuer – d’un autre côté, si les banques carafent, qui prêtera à l’Etat, indigent incontinent de ses finances ?

Le souci majeur, bien sûr, c’est que personne, actuellement, ne propose d’alternative, ne propose d’avoir des banques avec une réserve fractionnaire minimale (i.e. une fraction importante du cash effectivement en caisse). Tout comme personne ne propose que, pour éviter l’inflation, les monnaies soient à nouveau évaluées sur des biens tangibles qu’on ne peut pas manipuler aussi facilement que le papier… L’or, par exemple.

Personne, sauf, bien sûr, les libéraux…
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