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Primaires à gauche : « Si Martine Aubry et DSK sont candidats ensemble, la situation sera plus facile pour Ségolène Royal »

Publié le 02 décembre 2010 par Delits

En une semaine, la course à la présidentielle s’est particulièrement accélérée au Parti Socialiste. Les problématiques des primaires, de son calendrier et les favoris proclamés par les derniers sondages parus sur la question ont incité plusieurs candidats à s’annoncer rapidement et à d’ores et déjà partir en campagne sur les plateaux télés. La balle est désormais dans le camp de Dominique Strauss-Kahn, dont on attend de connaître sa position et de Martine Aubry qui va devoir éteindre les débuts d’incendie, éviter le sentiment de cafouillage et de guerres internes, tout en faisant de son parti une force de proposition et de préserver sa stature de présidentiable.

Sur ces questions, Délits d’Opinion a rencontré Bruno Jeanbart, Directeur Général Adjoint d’Opinion Way.

Délits d’Opinion : A la lumière du dernier sondage Ifop qui indique un soutien de 41% des sympathisants PS pour DSK contre 14% pur Royal, la stratégie du « hors-jeu » (DSK reste au FMI) est offensive et ambitieuse… A-t-elle des chances de réussir ?

Bruno Jeanbart : Il est clair que DSK, en cas de candidature, fait figure de favori, mais à un an du scrutin, le jeu demeure ouvert, pour 4 raisons :

Il ne faudra pas seulement être le favori des sympathisants PS ou de gauche pour l’emporter, mais être surtout celui des des sympathisants PS ou de gauche qui iront voter. Or le profil de ces électeurs sera décalé par rapport aux sympathisants au sens large et donc leur préférence peut être sensiblement différente.

Tant que DSK est à Washington, il bénéficie d’une position de retrait par rapport à la vie politique française dont on sait qu’elle est classiquement favorable à celui qui l’occupe (cf la popularité de Michel Rocard avant et après sa prise du PS en 1993, ou de Séguin au RPR en 1997). S’il décide d’être candidat, il faudra mesurer l’impact de cette « réintégration » dans le jeu. Attention, dire cela ne veut pas dire qu’elle sera obligatoirement néfaste pour lui.

L’offre électorale finale n’est pas connue aujourd’hui. Or elle aura un impact sur le choix des électeurs. Si Martine Aubry et DSK sont par exemple candidats ensemble, la situation sera plus facile pour Ségolène Royal que si seulement l’un d’eux se présente.

Enfin, si les primaires réussissent, le peuple de gauche va s’emparer du scrutin et la campagne peut faire bouger sensiblement les lignes dans l’opinion.

Délits d’Opinion : Plusieurs petits candidats se sont déjà déclarés officiellement quand on parle d’un pacte de non-agression parmi les principaux favoris : dans quelles mesures le fait de se déclarer avant les autres et de leur griller la politesse risque-t-il de raviver les tentions ou de donner l’impression d’une forte confusion au sein du parti ?

Bruno Jeanbart : Bien évidemment, les adversaires du PS se saisiront de l’occasion pour dénoncer les divisions du parti. Mais je ne crois pas réellement à ce danger, dans la mesure où le principe des primaires est populaire dans l’opinion. Or des primaires sans candidats priveraient les électeurs de gauche de la promesse qui leur a été faite de choisir le candidat PS eux-même et les videraient de leur substance. L’enjeu, ce n’est pas le débat avant ou pendant la campagne des primaires, mais la capacité du parti à se rassembler à l’issue du scrutin et du vainqueur à fédérer les vaincus. C’est ce qui n’a pas marché en 2006 en France, mais a parfaitement fonctionné aux Etats-Unis en 2008. Pourtant, entre Clinton et Obama, la bataille fut longue et violente et les électeurs de HC étaient réticents à se rallier naturellement à Obama. Toutes les enquêtes post-électorales aux États-Unis ont toutefois démontré que le ralliement fut massif.

Délits d’Opinion : Voir les « petits candidats » se déclarer en premier vous parait-il être une bonne stratégie ? Ces déclarations accélérées ont-elle comme principal objectif d’empêcher une candidature de DSK ?

Bruno Jeanbart : Tout d’abord, je trouve cocasse et inexacte de présenter Ségolène Royal comme une « petite candidate ». Le principe des primaires doit par ailleurs nous conduire à abolir ce concept : en effet, la logique des primaires, c’est de sortir des jeux partisans pour le choix d’un candidat et de ce fait, de laisser à un outsider la chance de remporter l’investiture.

De manière générale, dans une campagne électorale, moins vous êtes favori, plus votre intérêt est de lancer tôt la campagne, avec le secret espoir de renverser la tendance. En 2006 la stratégie de Ségolène Royal était plutôt de limiter au maximum les débats et celle de DSK d’en souhaiter le plus possible (souvenons nous des affrontements sur la nécessité ou non de débats télévisés à l’époque). En 2010, la situation s’est inversée et SR espère, en lançant la campagne dès aujourd’hui, forcer DSK à faire part de ses intentions et occuper le terrain pendant son absence pour remonter son retard. La réussite de cette stratégie dépendra, au delà de l’éventuel effet bénéfique conjoncturel de court terme dont elle peut espérer bénéficier, de la capacité de la candidate Royal à faire vivre la campagne dans la durée et sans adversaires. L’avantage est qu’elle aura le temps de développer son projet et ses propositions. La difficulté sera d’intéresser les Français au scrutin aussi loin de celui-ci et de ne pas lasser ou tourner en rond.

Propos recueillis par Olivier.


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