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Des avions, beaucoup d'avions

Publié le 14 décembre 2010 par Toulouseweb
Des avions, beaucoup d’avionsAirbus publie ses prévisions ŕ 20 ans, empreintes d’optimisme.
Comment faire ? Placer un petit pense-bęte sur son bureau, enfermer cet article dans une boîte métallique étanche et l’enterrer au fond du jardin ? En tout cas, il faudrait, nous ou nos successeurs, se souvenir des prévisions de ventes d’avions commerciaux et, dans 20 ans, comparer les chiffres toulousains ŕ la réalité. De deux choses l’une : ou bien nous reconnaîtrons alors que la boule de cristal de l’avionneur européen était au-dessus de tout soupçon. Ou nous éclaterons de rire en ayant la désagréable impression d’avoir été trompés, ou encore considérés comme des observateurs incroyablement crédules. Entendre dire que la demande, en deux décennies, atteindra prčs de 26.000 avions, constitue en effet l’assurance de soutenir le cours en bourse d’EADS. Mais comment prédire avec une précision chirurgicale ce que sera le transport aérien ŕ l’horizon 2030 ?
Aprčs avoir rappelé que Boeing se livre réguličrement au męme exercice, que ses conclusions sont identiques –ou presque- ŕ celles de son grand rival, plongeons-nous avec délice dans les colonnes de chiffres du nouveau Global Market Forecast. Au sortir d’une récession grave, voici enfin de bonnes raisons d’afficher un large sourire : le taux de croissance du trafic aérien devrait ętre, en moyenne, de 4,8% par an, mieux que les 4,7% annoncés il y a 12 mois. Ce repčre, ŕ lui seul, permet de construire une analyse sympathique et de la graver dans le marbre.
Comment ? En transformant cette croissance en passagers/kilomčtres et en tonnes/kilomčtres de fret. Puis en calculant le nombre d’avions anciens ŕ retirer peu ŕ peu du service (10.000 environ) et qu’il faudra remplacer, et les appareils nécessaires pour absorber la hausse de production (16.000). Ensuite, pour impressionner analystes, actionnaires et banquiers, il convient d’exprimer le tout en dollars pour mieux susciter l’optimisme. Soit 3.200 milliards de dollars, des montagnes de billets verts, tout l’avenir devant soi.
Entendons-nous bien, tout est vrai. S’agissant de 20 ans, deux décennies, deux dizaines d’exercices fiscaux, on conçoit que surviendront des surprises sur le chemin des statistiques ŕ venir. Peut-ętre de nouveaux accidents conjoncturels plus ou moins graves, un volcan hostile, pire de nouveaux risques terroristes. Mais les hommes et les femmes de la plančte Terre n’en continueront pas moins de se déplacer et les industries manufacturičres d’exporter leurs produits. Tout cela en supposant que le pic pétrolier ne soit toujours pas en vue ou que les carburants verts de substitution tiennent leurs promesses. Alors que, pour l’instant, ils sont plutôt anecdotiques, outils de communication destinés ŕ créer de la bonne conscience.
John Leahy, directeur commercial d’Airbus (en anglais chief operating officer-customers) est formel : Ťla reprise, plus forte que prévu, démontre d’une part la résilience du secteur aux périodes de repli et, d’autre part, que les gens veulent et ont besoin d’utiliser le transport aérienť. Au-delŕ des slogans, voyons les leçons ŕ tirer, trčs prudemment, de ces prévisions.
L’A380, tout d’abord. Depuis les années quatre-vingt-dix, Airbus et Boeing affichent leurs divergences sur le marché potentiel accessible aux trčs gros porteurs. L’un y croit, l’autre pas. Les Européens persistent et signent, réaffirmant que le marché est estimé ŕ plus de 1.700 exemplaires, 7% seulement du nombre d’avions ŕ livrer en 20 ans mais 18% en valeur. D’oů la confiance absolue dans l’avenir de l’A380, malgré des débuts un peu timides. Les Ťmonocouloirsť, par ailleurs, ont plus que jamais tout l’avenir devant eux, avec des livraisons estimées ŕ 900 exemplaires par an. Encore plus qu’annoncé précédemment, grâce ŕ l’envolée de la demande constatée en Asie-Pacifique et ŕ l’essor soutenu des compagnies low cost. L’occasion, aussi, de glisser une remarque euphorique sur l’A320 NEO remotorisé qui vient d’ętre annoncé.
Le marché va peu ŕ peu se répartir sur des bases nouvelles. Dans 20 ans, affirment les prévisionnistes toulousains, la région Asie-Pacifique, encore elle, accaparera non moins de 33% du trafic mondial, les Etats-Unis et l’Europe suivant ŕ distance respectable avec 23% chacun. Reste évidemment ŕ savoir si le duopole Airbus-Boeing fera alors partie du passé, si le Chinois Comac arrivera ŕ s’implanter solidement avec le C919. Mais c’est lŕ une remarque hors sujet, bien qu’il soit primordial d’admettre sans plus attendre que l’avenir sera davantage chinois et indien qu’américain ou européen. Quoi qu’il en soit, cela fait beaucoup d’avions en perspective.
Pierre Sparaco - AeroMorning

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