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Le FN veut capitaliser sur les peurs et les mécontentements

Publié le 20 décembre 2010 par Hmoreigne

 Grâce à la crise et à la mondialisation, le Front National espère plus que jamais prospérer et pourquoi pas rééditer en 2012 l’exploit du 21 avril 2002. A la différence toutefois de son père Marine Le Pen ne souhaite pas se limiter à incarner la remise en cause de l’establishment mais vise, à l’image de la Ligue du Nord en Italie, à transformer sa formation politique en parti de gouvernement.

Jusqu’où l’aiguillon FN poussera la droite classique ? Lors de son premier conseil national comme secrétaire général de l’UMP, Jean-François Copé s’est exercé à crier au loup, mettant en garde son parti contre une montée de l’extrême droite et agitant le spectre d’un 21 avril à l’envers, avec “un PS capable de tout faire pour arriver au pouvoir”.

L’UMP s’interroge sur la stratégie à adopter face à une formation désormais bien ancrée dans le paysage politique. Faut-il combattre ouvertement l’extrême droite comme le propose Jean-François Copé au risque de le mettre en avant ou, au contraire comme le prône François Fillon, de le traiter par le mépris ?

Poussé par les élus de terrain, le nouveau secrétaire général de l’UMP veut combattre le FN pied à pied en prenant le risque de radicaliser le discours de la formation présidentielle. Il peut s’appuyer dans cette démarche sur Marc-Philippe Daubresse, son secrétaire adjoint, pour combattre comme le décrit l’élu du Nord “le laxisme socialiste et l’outrance du FN“.

Mais cette stratégie se heurte à ceux qui pensent que ce serait une erreur de courir après les thèmes choisis par le FN. Benoist Apparu notamment rappelle que “la force de Nicolas Sarkozy dans la campagne de 2007 avait été d’obliger les autres à se positionner autour de ses thèmes à lui“.

Au PS, François Kalfon est sans doute l’un de ceux qui analysent le mieux la menace FN.  A ses yeux, “Le vrai problème, c’est que le pivot de la société, que sont les classes moyennes, sont en train de décrocher ou craignent ce décrochage : ils ont des problèmes de salaires, de pouvoir d’achat, des régions entières subissent la désindustrialisation. Il y a un sentiment de perte d’avenir, qui alimente la montée du Front national“. 

A contre-courant des autres observateurs, le Secrétaire national du PS délégué aux études d’opinion juge que les leviers xénophobes ne fonctionnent plus, que le moteur de croissance du Front national n’est pas le rapport aux étrangers, mais deux clivages : “les petits contre les gros et la nation contre les mondialistes“. Il estime en conséquence que “si on résout la question sociale, on résoudra celle du FN“.

Le discours de Marine Le Pen donne raison à  l’élu socialiste. Le 14 novembre dernier, elle enflammait un auditoire francilien en dénonçant le système, “l’hyperclasse mondiale” et “la consanguinité et la connivence des élites” mais surtout en vantant le protectionnisme et en fustigeant l’euro.

Pour tout problème complexe il existe une solution simple, claire et fausse disait HL Mencken. Marine Le Pen a la sienne : “une sortie groupée et concertée de l’euro pour redonner de l’oxygène à notre économie“.

Le discours frontiste a opportunément glissé de la stigmatisation de l’immigration à la dénonciation de la crise, au laminage des classes moyennes par la concurrence déloyale de salariés exploités à l’autre bout du monde. La xénophobie n’a pourtant pas disparue, elle s’exprime à travers une islamophobie assumée et un rejet du multiculturalisme accusé de diluer l’identité nationale.

Par un tour de passe-passe la vice-présidente du FN s’est surtout muée en Jeanne d’Arc du nationalisme économique et du modèle social. Marine Le Pen dénonce l’islamisme et le mondialisme, “deux totalitarismes qui risquent de faire disparaitre notre pays, notre civilisation“. Elle s’érige en rempart contre la précarité sociale, en digue contre un monde extérieur jugé hostile qui vient chahuter nos sociétés européennes par un alignement par le bas.

Spécialiste du Front National, Erwan Lecœur juge que le parti d’extrême droite est un “parti famille” dont le discours répond à des aspirations profondes et propose une réponse crédible et satisfaisante à  la crise de sens que traverse notre société. Pour ce sociologue, ce qui fait voter FN, c’est le déclassement vécu ou redouté allié à une nostalgie du temps d’avant.

Sa solution : faire renouer les français avec le rêve, rendre de nouveau l’avenir désirable. Ce que finalement Ségolène Royal avait intuitivement senti en baptisant son courant “désirs d’avenir”.

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