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Perdre de l’argent en mangeant « bio »

Publié le 30 décembre 2010 par Copeau @Contrepoints

La nature dépeinte par les écologistes est largement idéalisée. La nature, l’état sauvage – que le « bio » prétend prendre comme modèle et critère – montre avant tout, d’un côté, des bêtes malades, mal nourries, mal soignées, où une santé éclatante n’est l’apanage que de quelques exceptions, pendant peu de temps, de l’autre, des plantes rachitiques, médiocres, insuffisantes et souvent impropres à la consommation humaine.

Perdre de l’argent en mangeant « bio »
Aujourd’hui, personne n’échappe à la propagande massive destinée à promouvoir le « bio » et le « naturel ». Et on ne se lassera jamais de répéter que « naturel » n’est pas synonyme de « bon ». Après tout, le venin du cobra est parfaitement naturel et tout aussi létal. Mais la mode et le libre marché font que de nombreuses personnes sont disposées à payer deux ou trois fois plus pour des produits « bio » ou « naturel » parce que « la santé et le bien-être n’ont pas de prix ». Les consommateurs qui optent pour un régime alimentaire incluant des produits catalogués « bio » espèrent – en payant plus – améliorer leur santé. Cependant, selon une nouvelle étude, il n’existe actuellement aucune élément solide prouvant la justesse de cette démarche. Les soupçons au sujet de l’« inutilité » alimentaire des produits « bio » ou même, pire, de certains dangers les concernant ne sont pas neufs.

Déjà, en 2005, une étude de l’Université de Berne réalisée sous la conduite du professeur Jürg Blum bousculait l’imagerie d’Épinal qui prête à tout ce qui serait « bio » une qualité supérieure aux produits alimentaires obtenus via l’industrie alimentaire classique. Basées sur une étude en profondeur de la qualité du lait « bio » et de la santé de la vache qui le produit, les conclusions de l’étude publiée dans le journal universitaire UniPress furent ravageuses. Tout d’abord, les vaches « bio » produisent, à cause de la faiblesse de leur alimentation, jusqu’à 12% moins de lait que les autres. Privées des compléments nutritifs, les bêtes manquent de protéines, de minéraux et de vitamines alors que les vaches laitières perdent leurs forces durant les premiers mois de lactation. Ceci n’a certes pas d’effets directs sur la qualité de la production, mais sur le bien-être des animaux. Surtout si l’on tien compte du fait que cet affaiblissement augmente les risques de maladie et les problèmes de fertilité. Le bilan sanitaire du lait « bio » est en revanche plus préoccupant. Parce que les éleveurs « bio » refusent d’utiliser les antibiotiques à titre préventif (notamment pour protéger les animaux sains qui ont côtoyés une bête malade), les pis des vaches sont plus fréquemment infectés. Ces infections, souvent impossibles à reconnaître à l’œil nu, font parfois arriver les germes dans le lait de consommation. Et contrairement à une idée reçue répandue, les restrictions médicamenteuses ne limitent pas le nombre de souches de germes résistantes aux antibiotiques dans le lait « bio ». Le professeur Blum et ses collaborateurs en détectèrent tout autant que dans le lait normal. Un an plus tard, une autre étude menée à la Strathclyde University et publiée dans l’International Journal of Food Sciences and Nutrition indiquait, quant à elle, que le poulet élevé en batterie est bien meilleur, à tous les points de vue, que le poulet « bio ». Mais il est vrai que le premier est nettement moins fashionable.

En France également, Léon Guéguen et Gérard Pascal, chercheurs de l’Institut national de la recherche agronomique (Inra) ont publié un rapport dans lequel ils mettent en évidence le peu de différences observées entre les produits issus de l’agriculture « bio » et ceux issus de l’agriculture conventionnelle. Les résultats publiés dans Les Cahiers de nutrition et de diététique montrent que les faibles différences observées entre aliments « bio » et ceux de la filière classique n’ont aucune répercussion significative sur la nutrition et la santé. Aucune différence marquante n’a été relevée pour les glucides, les minéraux et les oligo-éléments dans les aliments analysés, et l’affirmation faisant cas de teneurs plus élevées en magnésium dans certains légumes n’a pas été confirmée. Ces chercheurs ont également constaté que les céréales « bio » étaient plus pauvres en protéines. Des teneurs plus élevées en vitamine C et en polyphénols, mais des teneurs plus faibles en caroténoïdes, ont souvent été observées en agriculture biologique, sans effet démontré sur le statut antioxydant sanguin. Cette étude confirme donc le rapport publié en 2003 par l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) sur l’évaluation nutritionnelle et sanitaire des aliments issus de l’agriculture biologique. Celui-ci concluait lui-aussi que les différences de composition chimique avec les aliments issus de l’agriculture conventionnelle étaient faibles et sans signification dans le cadre d’un régime alimentaire global.

Cette année, c’est une étude menée en Grande-Bretagne par des chercheurs de la London School of Hygiene and Tropical Medicine et publiée par l’American Journal of Clinical Nutrition, qui arrive à des conclusions similaires. Dans cette étude, les chercheurs ont analysé des articles publiés par la littérature scientifique de ces 50 dernières années et n’ont trouvé aucune preuve de ce que les aliments « bio » et conventionnels diffèreraient significativement dans leur contenu nutritionnel. Par ailleurs, le docteur Alan Dangour et ses collègues pointent le nombre réduit et la mauvaise qualité des études censés démontrés les bienfaits des produits alimentaires de la filière « bio ». On découvre ainsi que ces études se concentraient majoritairement sur les effets à court terme de l’alimentation « bio » – essentiellement autour de l’activité des antioxydants dans le corps – au lieu d’étudier les conséquences pour la santé à long terme. Mais même ainsi, la majorité des études sur les antioxydants ne sont pas parvenues à détecter des différences entre les régimes alimentaires « bio » et conventionnel.

Au final, tous ces chercheurs n’ont rien découvert de bien révolutionnaire. Leurs recherches ont plutôt tendance à valider le sens commun et la logique, qui veulent que les contraintes idéologiques qui s’appliquent à la filière « bio » nuisent tant aux animaux qu’à la qualité de leurs produits. Une fois de plus l’idéologie sous-jacente à la production « bio » entre en conflit avec le monde réel. La nature dépeinte par les écologistes est largement idéalisée. La nature, l’état sauvage – que le « bio » prétend prendre comme modèle et critère – montre avant tout, d’un côté, des bêtes malades, mal nourries, mal soignées, où une santé éclatante n’est l’apanage que de quelques exceptions, pendant peu de temps, de l’autre, des plantes rachitiques, médiocres, insuffisantes et souvent impropres à la consommation humaine. Voilà la réalité de l’état de nature hors de la présence de l’homme, qui fait éclater l’absurdité de la filière « bio » au sujet de produits alimentaires qui sont pratiquement tous des créations artificielles de l’homme.


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