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L’euro, la mondialisation et nous

Publié le 30 décembre 2010 par Hmoreigne

 Une hirondelle ne fait pas le printemps. L’entrée de l’Estonie, petit pays Balte de 1,4 million d’habitants, le 1er janvier dans le club très fermé de la monnaie européenne ne signifie pas la fin des hostilités autour de l’euro. La trêve des spéculateurs, version moderne de celle des confiseurs, a par essence une durée limitée.

Le discours performatif des dirigeants européens sur la solidarité de l’Union ne parviendra pas à lui tout seul à décourager les marchés financiers. Ceux-ci risquent surtout de ne retenir que la frilosité des dirigeants en refusant d’aller plus loin dans l’intégration politique et économique de l’UE.

La pérennisation du Fonds européen de stabilité financière (FESF) au-delà de 2013 constitue un tout petit pas d’une Europe toujours au milieu du gué certes dotée d’une monnaie unique et d’un marché intérieur mais dépourvue de gouvernance économique.

David Cameron, adepte de la rigueur qui tue a confirmé le rôle trouble de la Grande Bretagne au sein de l’UE. Tel Pénélope, le Premier ministre britannique dans le droit fil de ses prédécesseurs ne cesse de détricoter l’ouvrage de ses homologues continentaux.

Le laisser-faire économique fait le jeu des marchés mais les dirigeants du Royaume-Uni n’en ont cure comme s’ils se refusaient à voir qu’avec la mondialisation les marchés ont pris le pas sur les Etats et disposent désormais d’un pouvoir de nuisance économique susceptible de mettre à genoux un pays.

Plutôt que de jouer collectif, la perfide Albion parie sur le repli insulaire. Thatcher voulait sa money back, Cameron lui veut geler jusqu’en 2020 le budget européen pourtant déjà limité à 1 % du PIB communautaire. Le cavalier seul Britannique a suscité la colère de Joseph Daul, le patron du groupe PPE (conservateur) du Parlement européen qui a estimé que son “Europe n’est pas celle de Cameron, dépourvue d’ambitions politiques et des moyens adéquats pour les réaliser“.

C’est aussi ce que pense Jacques Attali qui défend un approfondissement de la construction européenne. Les préconisations de l’ancien sherpa de François Mitterrand sont, sur le papier, pertinentes.

Tout d’abord doter l’UE d’un véritable budget en lui donnant la capacité de lever l’impôt mais aussi lui permettre de souscrire des emprunts à travers l’émission d’euro-obligations ce qui lui permettrait de reprendre à son compte une partie des dettes publiques des Etats. Une idée séduisante reprise par Jean-Claude Juncker … et aussitôt écartée par la Chancelière Allemande…avec le soutien de Nicolas Sarkozy.

La politique monétaire est une chose, la politique industrielle en est une autre. L’effondrement industriel de la France au cours de la décennie qui s’achève doit nous alerter sur les conséquences d’un échangisme mondialiste caricatural qui ne peut se traduire que par des délocalisations massives. Or, comme le relève le centriste Jean Arthuis auteur en 1993 d’un rapport remarqué sur les délocalisations, l’Europe a raté lors de la signature du Traité de Maastricht l’occasion de mettre des écluses à ses frontières permettant comme le préconisait Maurice Allais de bénéficier d’une concurrence effective et d’échanges nombreux avec l’extérieur mais qui permettrait également de se protéger, par une préférence communautaire, contre les désordres et les dysfonctionnements.

Jean Arthuis, défend l’idée que la notion d’échange juste repose sur un minimum de barrières douanières mais également une TVA sociale de façon à ce que les produits importés participent, comme les salariés français, au financement de la protection sociale.

Ce serait pour l’ancien ministre de l’économie et des finances la moins mauvaise réponse à notre schizophrénie de consommateur, entretenue par la grande distribution, à la recherche permanente du prix bas qui a tendance à oublier qu’il est aussi salarié et contribuable. Acheter Chinois est sans doute avantageux dans l’instant mais à court terme cela revient à tuer le tissu économique dans lequel on vit.

Jean Arthuis, président de la commission des finances du Sénat déplore à cet égard que les deux seules choses qui marchent en France sont l’importation-distribution et la finance. C’est bien aujourd’hui d’un changement de cap dont l’Europe a besoin. Les vagues d’élargissement successives, trop rapides et trop vastes, ont contribué à s’assurer de l’impuissance des institutions européennes. Une obésité handicapante renforcée par un déficit démocratique savamment entretenu.

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