Lumière de Yerushalayim

Aujourd'hui dimanche chrétien, la première lecture de la liturgie est le texte du prophète Yéchâya (Isaïe) 60, 1-6, parlant de la gloire de Yerushalayim, Jérusalem.
Le texte est empli d'expressions évoquant la lumière, "Resplendis, elle est venue ta lumière... la gloire (le rayonnement) du Seigneur s'est levée sur toi (comme le soleil se lève)... sur toi se lève le Seigneur, sa gloire brille sur toi...ta lumière, la clarté de ton aurore...tu seras radieuse".
L'humeur générale était plutôt sombre, "l'obscurité recouvre la terre, les ténèbres couvrent les peuples".
Le prophètes cultive l'espérance.
Nous sommes dans les années 525-520 avant notre ère,
c'est-à-dire une quinzaine ou une vingtaine d'années après le retour de l'exil à Babylone.
Les déportés à Babylone sont rentrés au pays, et ont cru que le bonheur allait s'installer. En réalité, ce fameux retour tant espéré n'a pas répondu à toutes les attentes.
D'abord, il y avait ceux qui étaient restés au pays et qui avaient vécu la période de guerre et d'occupation.
Ensuite, il y avait ceux qui revenaient d'Exil et qui comptaient retrouver leur place et leurs biens.
Or si l'Exil a duré 50 ans, cela veut dire que ceux qui sont partis sont morts là-bas, et ceux qui revenaient étaient leurs enfants ou leurs petits-enfants. Ceux qui rentraient ne pouvaient pas prétendre récupérer l'héritage de leurs parents.
Et il y avait tous les étrangers qui s'étaient installés dans la ville de Jérusalem et dans tout le pays à la faveur de ce bouleversement et qui y avaient introduit d'autres coutumes, d'autres religions.
Difficile donc de vivre ensemble.
La discorde, ce fut la reconstruction du Beth Hamikdach, le Temple car, dès le retour de l'exil, autorisé en 538 par le roi Cyrus, les premiers rentrés au pays avaient rétabli l'ancien autel du Temple de Jérusalem, et avaient recommencé à célébrer le culte comme par le passé, et en même temps, ils entreprirent la reconstruction du Temple lui-même.
Mais des gens qu'ils considéraient comme hérétiques ont voulu s'en mêler. C'étaient ceux qui avaient habité Jérusalem pendant l'Exil, mélange de Juifs restés au pays et de populations étrangères, donc païennes, installées là par l'occupant. Il y avait eu inévitablement des mélanges entre ces deux population, et même des mariages, et tout ce monde avait pris des habitudes jugées hérétiques par les Juifs qui rentraient de l'Exil.
La communauté du retour s'est resserrée et a refusé cette aide dangereuse pour la foi.
Le Temple de D.ieu unique ne peut pas être construit par des gens qui, ensuite, voudront y célébrer d'autres cultes.
Le projet de reconstruction du Temple s'arrêta.
Les années ont passé et on s'est installés dans le découragement. Mais la morosité, l'abattement ne sont pas dignes du peuple porteur des promesses de D.ieu.
Alors, Yéchâya et un autre prophète, Haggai (Aggée) décident de réveiller leurs compatriotes et qu'avec l'espérance ils se mettent au travail pour reconstruire le Temple.
On le voit dans ce texte.
Le langage presque triomphant est un langage assez habituel chez les prophètes. Ils promettent la lumière. C'est pendant la nuit qu'on guette les signes du lever du jour, et justement le rôle du prophète est de redonner courage, de rappeler la venue du jour.
Pour faire reprendre espoir les deux prophètes donnent l'argument que Jérusalem est la Ville Sainte, la ville choisie par D.ieu, pour y faire demeurer le signe de sa Présence.
C'est parce que D.ieu lui-même s'est engagé envers le roi Salomon en décidant "Ici sera Mon Nom", que le prophète Yéchâya, des siècles plus tard, peut oser dire à ses compatriotes "Debout, Jérusalem ! Resplendis...".
Le message de Yéchâya est que le jour vient où tout le monde reconnaîtra en Jérusalem la Ville Sainte. Il faut donc se mettre au travail pour reconstruire le Temple.
Yéchâya nous dit que quand on est croyants, la lucidité ne parvient jamais à étouffer l'espérance.
Quant à la promesse elle ne vise pas un triomphe politique. Le triomphe attendu est celui de D.ieu, et de l'humanité qui sera un jour enfin réunie dans une harmonie parfaite dans la Cité Sainte.
Si Jérusalem resplendit, c'est de la lumière et de la gloire du Seigneur, "Debout, Jérusalem ! Resplendis : elle est venue ta lumière, et la gloire du Seigneur s'est levée sur toi... sur toi se lève le Seigneur, et sa gloire brille sur toi...".
Et quand Yéchâya parle de Jérusalem, déjà à son époque, ce nom désigne plus le peuple choisi de D.ieu que la ville elle-même.
Le projet de D.ieu est celui pour le peuple d'Israël, qui doit s'étendre à toute l'humanité.